Barnabé OKOUDA, Directeur exécutif du CAMERCAP-PARC : "La timidité de notre décollage économique est la conséquence d’un déficit avéré en infrastructures de diverses natures"

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Barnabé OKOUDA, Directeur exécutif du Centre d'analyse et de recherche sur les politiques économiques et sociales du Cameroun (CAMERCAP-PARC) :

La timidité de notre décollage économique est la conséquence d'un déficit avéré en infrastructures de diverses natures

Dans cette entrevue avec Barnabé OKOUDA, Directeur exécutif du Centre d'analyse et de recherche sur les politiques économiques et sociales du Cameroun (CAMERCAP-PARC), la question centrale concerne le rôle crucial des infrastructures dans le développement économique et social du Cameroun. OKOUDA évalue les avancées du pays dans ce domaine, mettant en évidence les défis auxquels il est confronté.

Il souligne la nécessité d'une gouvernance efficace et d'une gestion judicieuse de la dette pour surmonter les retards persistants dans la réalisation des projets d'infrastructures.

L'interview explore également l'importance d'une approche sectorielle, les priorités actuelles, le rôle essentiel du secteur privé, et avance des recommandations pour maximiser le potentiel infrastructurel du Cameroun à court et moyen terme.

Dans le cadre de la Vision 2035, le Cameroun a fait du développement des infrastructures une priorité en annonçant de grands projets dans les secteurs de l'énergie, le transport, les télécoms… À mi-chemin, comment appréciez-vous les efforts du pays en la matière ?

C'est vous qui parlez de mi-chemin. Oui comme dans un processus normal de planification, le dispositif de suivi évaluation prévoit des revues périodiques intermédiaires avant terme. Et une étape importante dans cette démarche est la revue à mi-parcours. Rendu à novembre 2023, partant de janvier 2010, le Cameroun en est à sa 14ème année de marche vers l'émergence. Plus exactement, nous sommes à 167 mois sur les 300 prévus pour le parcours (au plus tard). Il est donc juste et opportun de se poser les bonnes questions, et surtout d'y apporter des réponses convenables, si nous ne voulons pas manquer le rendez-vous des agendas de développement durable auxquels le Cameroun a souscrit. Et cet exercice se fait généralement lors de la revue à mi-parcours.

A date et à ma connaissance, il n'est pas établi de rapport officiel dans ce sens. Ce que nous disons donc ici relève de notre observation empirique et de nos analyses propres.

Ainsi, il a été officiellement établi que la première étape n'a pas été un grand succès. Le bilan du DSCE (Document de stratégie pour l'emploi et la croissance sur la période 2010-2019) a été dressé par les plus hautes autorités compétentes de la République. La seconde étape, la SND30 (Stratégie Nationale de Développement 2020-2030) censée procéder d'abord au rattrapage des manquements de la première phase, semble avoir été engagée avec du plomb dans l'aile depuis 2020. Devrait-on à date (novembre 2023) maintenir le même rythme ? Les mêmes objectifs et la même approche ?

L'horizon de 2035 reste-t-il réaliste pour atteindre les objectifs en termes d'infrastructures ?

Le Kenya a bien réalisé une autoroute urbaine de 27 km, suspendue, reliant la banlieue d'affaires Westlands à l'aéroport Jomo-Kenyatta de Nairobi en moins de 3 ans avec la même compagnie chinoise qui traîne sur l'autoroute Yaoundé-Nsimalen, section rase campagne, pour faire 10 km en 12 ans !

Tout est possible dès que l'on se donne les moyens, et que l'on met en place une combinaison optimale des capacités et des compétences dont regorge le pays. La bonne question est selon moi, la première des 3 ci-dessus, à savoir : la question sur le rythme et l'approche, au vu des résultats et des analyses subséquentes après la moitié du parcours. Et cela ne concerne pas seulement les infrastructures.

Le Kenya a bien réalisé une autoroute urbaine de 27 km, suspendue, reliant la banlieue d'affaires Westlands à l'aéroport Jomo-Kenyatta de Nairobi en moins de 3 ans avec la même compagnie chinoise qui traîne sur l'autoroute Yaoundé-Nsimalen, section rase campagne, pour faire 10 km en 12 ans ! D'autres pays africains que vous connaissez ont bien réalisé et mis en fonctionnement des barrages hydroélectriques en très peu de temps et à moindre coût que le Cameroun sur Lom-Pangar, Mekin et Memvele. 

Pour le moment, seul Nachtigal semble tenir le bon timing ! Cela confirme ma première proposition : tout est possible dès que l'on se donne les moyens.

La structure économique du Cameroun est-elle adaptée pour soutenir cette dynamique ?

C'est pour cela que le vecteur principal et l'un des piliers de cette stratégie est la transformation structurelle de l'économie.

L'adoption et la mise en œuvre de la SND_30 donne la réponse des autorités camerounaises à votre question. C'est pour cela que le vecteur principal et l'un des piliers de cette stratégie est la transformation structurelle de l'économie. Un chronogramme assorti d'indicateurs et de déclencheurs a été validé. La question maintenant est de savoir ce qu'il en est, et ce que l'on en fait ? Des rapports d'évaluation annulés depuis le lancement, il y a 4 années, auraient dû nous fournir des éléments de réponse.

Qu'est-ce qu'un boom infrastructurel apporterait à une économie comme celle du Cameroun ?

La timidité de notre décollage économique est la conséquence d'un déficit avéré en infrastructures de diverses natures (énergie, routes, chemin de fer, aéroports, télécoms et TIC, logements sociaux et capacités hôtelières, etc.), comparativement à des pays dits de niveau comparable.

Nul besoin ici de s'étendre en démonstrations sur les effets et les impacts d'une mise en service de toutes les infrastructures dites de première génération (inscrites dans le DSCE depuis 2010). Ce ne sera pas faire preuve de génie (rires). Cela a déjà été fait et c'est ce qui a justifié que le secteur des infrastructures soit retenu comme la priorité dans la phase 1 de la Vision. Par la contraposée, nous pouvons cependant l'admettre et l'affirmer : la timidité de notre décollage économique est la conséquence d'un déficit avéré en infrastructures de diverses natures (énergie, routes, chemin de fer, aéroports, télécoms et TIC, logements sociaux et capacités hôtelières, etc.), comparativement à des pays dits de niveau comparable.

Malgré tous les chantiers dans lesquels il s'est lancé, le Cameroun peine toujours à les boucler à temps. Qu'est ce qui, selon vous, justifie ces retards permanents ? Et quelles en sont les conséquences pour le pays ?

La gouvernance. Les conséquences sont visibles pour tous. Pas besoin d'être un expert.

Retrouvez la suite de cette interview la version numérique de la 14e édition du Magazine Sika Finance à télécharger gratuitement via ce lien ou en cliquant sur l'image ci-dessous.

Cédrick JIONGO

La Rédaction

Publié le 24/04/24 10:25

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