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Trois entreprises sont désormais en compétition pour concevoir et piloter un ambitieux dispositif national de géolocalisation et de traçabilité, destiné à préserver l'accès du cacao camerounais au marché européen, premier débouché du pays.
Le Fonds de développement des filières cacao et café (Fodecc) a lancé un appel d'offres international restreint, en procédure accélérée, pour sélectionner un prestataire technologique capable de renforcer le Guichet Producteurs et bâtir un système de traçabilité des fèves, depuis la parcelle jusqu'à l'exportation. Ce processus s'inscrit dans la droite ligne de la future réglementation européenne sur les produits exempts de déforestation (EUDR), qui impose désormais une traçabilité rigoureuse pour toute importation de cacao, de café ou d'huile de palme.
Parmi les candidats en lice : Edenred Belgium, géant européen des services numériques ; un consortium local formé par Dimsoft et AEF Audit Conseil ; ainsi que le Groupe Kabemo, également basé au Cameroun. Ces trois prétendants ont été présélectionnés à l'issue d'un appel à manifestation d'intérêt lancé en septembre 2024, et concourent pour deux lots d'une valeur globale de 1,7 milliard de FCFA.
Le premier lot, estimé à 995 millions FCFA, concerne l'extension fonctionnelle et géographique du Guichet Producteurs, plateforme numérique actuellement en phase pilote. Il prévoit l'intégration de nouvelles fonctionnalités, le déploiement auprès de 50 000 producteurs supplémentaires, l'adaptation à d'autres filières agroalimentaires, ainsi que la distribution de bons électroniques pendant une période de dix mois.
Le second lot, doté d'un budget de 705 millions FCFA, porte quant à lui sur la conception d'une solution de traçabilité intégrale des chaînes cacao et café. La mission inclut une cartographie complète des flux – de la plantation au port ou à l'usine locale – ainsi que le développement d'outils logiciels et matériels dédiés. Un projet pilote auprès de 10 000 producteurs est prévu, avec en ligne de mire la compatibilité avec les exigences européennes.
En toile de fond, la pression normative exercée par l'Union européenne pousse le Cameroun à accélérer sa mue numérique. En 2023/2024, 78 % des 185 613 tonnes de fèves exportées ont été destinées à l'UE, selon l'Office national du cacao et du café (ONCC). Or, Bruxelles interdira bientôt l'importation de tout produit issu d'une zone déboisée après décembre 2020, et exige désormais des preuves de géolocalisation précises pour chaque cargaison.
Conscients de l'enjeu, les principaux acteurs du secteur se mobilisent. Le 28 août 2024, un accord de mutualisation des données géospatiales a été signé entre le Conseil interprofessionnel du cacao et du café (CICC) et six structures majeures : Fodecc, Telcar Cocoa, Ofi Cam, Neo Industry, Sic-Cacaos et Atlantic Cocoa. Cette entente, appuyée par le ministère du Commerce, vise à créer une base de données unifiée, centralisée et évolutive, afin de garantir une traçabilité conforme aux exigences européennes et protéger les exportateurs locaux, notamment les plus petits.
Le prestataire finalement retenu devra non seulement déployer une solution techniquement robuste, mais aussi garantir son interopérabilité avec les autres systèmes existants, tout en assurant la transparence de bout en bout.
Perton Biyiha
La Rédaction
Publié le 19/06/25 13:53
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