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Le Fonds monétaire international (FMI) alerte sur les risques budgétaires que fait peser le contrat d'achat d'électricité signé entre Eneo, la compagnie nationale d'électricité, et Nachtigal Hydro Power Company (NHPC), filiale d'EDF. Dans son rapport publié en juin 2025 à l'issue de la septième revue du programme économique et financier avec le Cameroun, l'institution met en lumière les déséquilibres économiques du secteur électrique et les tensions croissantes liées à l'exploitation de la centrale hydroélectrique de Nachtigal.
Depuis le 18 mars 2025, date de mise en service complète de la centrale, Eneo est tenu de verser chaque mois environ 10 milliards de FCFA à NHPC, en vertu d'un contrat de type ''take or pay''. Ce mécanisme oblige l'acheteur à régler l'intégralité de l'électricité produite, indépendamment du volume effectivement consommé. Le FMI souligne que ''les charges liées au fonctionnement de la centrale de Nachtigal […] devraient exercer de nouvelles pressions sur le budget''. En effet, d'après des informations obtenues auprès de sources crédibles, l'Etat devrait, en cas de défaillance d'Eneo, s'acquitter personnellement de ce paiement.
L'investissement total pour la construction de l'infrastructure s'élève à 786 milliards de FCFA. D'une capacité de 420 MW, elle devrait permettre d'augmenter de près de 30 % la production électrique nationale, et renforcer la part de l'hydroélectricité dans le mix énergétique du pays.
Malgré la montée en puissance de Nachtigal, l'absorption de sa production se heurte à l'insuffisance des infrastructures de transport. Une ligne de 225 kV relie la centrale à Yaoundé, mais celle en direction de Douala, principal pôle industriel et grande zone de consommation, n'est pas encore finalisée. Cette situation limite l'utilisation immédiate de la totalité de la production.
Le FMI relève que cette inadéquation entre production et distribution pourrait accentuer les tensions dans un secteur déjà sous pression. En septembre 2024, un contrat d'accès au réseau a été signé entre NHPC et la Société nationale de transport de l'électricité (Sonatrel), mais cela ne suffit pas encore à garantir une évacuation optimale de l'énergie produite.
Au-delà de Nachtigal, le rapport du FMI dresse un constat préoccupant sur l'ensemble du secteur électrique camerounais. Il le décrit comme ''non viable sur le plan financier'', en raison d'un ensemble de faiblesses structurelles. L'institution financière cite le faible taux de recouvrement, les pertes techniques élevées, les subventions massives, et les tarifs de vente inférieurs aux coûts de production.
Citant une analyse de la Banque mondiale, le FMI indique que ''l'écart entre le tarif moyen et le coût réel de production est de 18,2 %''. Pour compenser ce déficit, l'État verse régulièrement des subventions et accorde des avances de trésorerie à Eneo, l'opérateur en charge de la distribution.
Malgré ces soutiens, Eneo reste en difficulté. La dette publique envers le distributeur avoisine 120 milliards de FCFA, selon les autorités, tandis que l'entreprise réclame un total de 266 milliards de FCFA, dont 60 milliards pour l'éclairage public. ''Une grande partie de cette dette est contestée par l'État, faute de moyens de comptage fiables'', note encore le rapport.
Perton Biyiha
La Rédaction
Publié le 27/06/25 15:39
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