Le continent africain est peut-être à l'aube d'une transformation majeure de la gestion de ses ressources stratégiques. En effet, un protocole d'accord historique intervenu ce 30 décembre, entre la Banque africaine d'import-export (Afreximbank) et la Banque centrale d'Égypte (BCE), ont posé les fondations de ce qui est appelé à devenir ‘'la première banque panafricaine de l'or'', instrument inédit destiné à capter et préserver la valeur aurifère au profit du continent.
L'accord, paraphé au Caire, la capitale égyptienne, par le gouverneur de la BCE, Hassan Abdalla, et le président d'Afreximbank, le Dr George Elombi, marque une inflexion stratégique majeure. Il ne s'agit plus seulement de produire de l'or, mais d'en maîtriser l'ensemble de la chaîne de valeur, depuis l'extraction jusqu'au raffinage, au stockage, à l'évaluation et à la commercialisation, dans une logique résolument panafricaine, relève le communiqué publié à cet effet par Afreximbank.
Mettre fin à l'extraversion de l'or africain
Malgré son statut de producteur mondial de premier plan, l'Afrique reste largement dépendante de plateformes étrangères pour le raffinage et le négoce de son or. Cette dépendance structurelle se traduit par une perte massive de valeur ajoutée et par une faible intégration de l'or dans les stratégies de réserves et de stabilité monétaire des pays africains.
La future banque panafricaine de l'or entend rompre avec ce modèle. Le protocole prévoit en réalité, la réalisation d'une étude de faisabilité pour la création d'un écosystème intégré de banque d'or dans une zone franche en Égypte, avec la participation de plusieurs pays africains. Au cœur du projet : une raffinerie accréditée internationalement, des installations de coffres-forts sécurisés et une gamme complète de services financiers et commerciaux dédiés à l'or.
Pour les promoteurs du projet, l'enjeu dépasse la simple industrie minière. Il s'agit de repositionner l'or comme levier de stabilité financière et monétaire. ‘'L'or africain doit servir les Africains'', a insisté le Dr George Elombi, soulignant que cette banque africaine de l'or permettra d'augmenter efficacement les réserves aurifères, à l'image des grandes économies mondiales. Une telle évolution renforcerait la résilience du continent face aux chocs externes, améliorerait la stabilité et la convertibilité des monnaies africaines et offrirait aux banques centrales de nouveaux outils de gestion des réserves. En filigrane, c'est aussi la crédibilité financière de l'Afrique sur les marchés internationaux qui est en jeu.
Une initiative alignée sur l'intégration africaine
L'ambition est clairement continentale. Le projet vise à impliquer l'ensemble des parties prenantes, à savoir gouvernements, banques centrales, sociétés minières et acteurs privés, afin d'harmoniser les meilleures pratiques, renforcer la coopération institutionnelle et faciliter un commerce durable et transparent de l'or en Afrique.
Cette démarche s'inscrit dans la droite ligne de l'action d'Afreximbank en faveur de l'intégration économique, de l'industrialisation et de la mise en œuvre de la ZLECAf. En s'attaquant à la question de l'or, actif stratégique par excellence et valeur refuge, la Banque ajoute une pièce maîtresse à l'architecture financière africaine. Si elle se concrétise, la banque panafricaine de l'or pourrait devenir l'un des instruments les plus puissants de relocalisation de la valeur, de souveraineté financière et de création de richesse endogène pour l'Afrique.
Narcisse Angan
Publié le 30/12/25 12:35