Le gouvernement camerounais a signé avec le fonds britannique Actis-CPH la convention portant sur le rachat de la totalité des 51 % de parts que ledit fonds détenait dans Eneo. La transaction, bouclée pour un montant de 78 milliards de FCFA, met un terme à plus d'un an de négociations menées entre les deux parties et confère désormais à l'État un contrôle proche de l'intégralité du capital, soit 95 %, un niveau inédit depuis la libéralisation du secteur il y a une quinzaine d'années.
La cérémonie s'est tenue au ministère des Finances, qui représente l'État dans ce dossier aux côtés du ministère de l'Eau et de l'Energie. Louis Paul Motaze, le ministre des Finances a présenté l'opération comme l'aboutissement d'un processus " conduit avec rigueur et responsabilité ". Le membre du gouvernement a rappelé que ce rachat s'inscrit dans l'orientation politique fixée par le président Paul Biya, une orientation qui vise " à restaurer la souveraineté économique du pays, à renforcer la capacité nationale dans un secteur jugé stratégique et à replacer sous contrôle public une entreprise longtemps fragilisée par des pertes techniques élevées, une dette croissante et une qualité de service régulièrement contestée "
Cette reprise en main intervient dans un contexte où Eneo, concessionnaire chargé de la distribution de l'électricité au Cameroun, fait face à des tensions opérationnelles persistantes. Pour les autorités, cette acquisition n'est pas seulement un changement d'actionnariat mais un levier pour stabiliser l'entreprise. Louis Paul Motaze a insisté sur ce point en expliquant que le passage sous contrôle quasi intégral de l'État constitue une " opportunité pour redresser l'opérateur, moderniser son fonctionnement et relancer des investissements indispensables à l'amélioration du réseau. "
L'annonce du rachat a également permis de répondre aux préoccupations exprimées ces derniers mois par le personnel de l'entreprise, inquiet des conséquences sociales d'un retour massif de l'État dans le capital. Le ministre des Finances a assuré que l'opération ne modifie ni les statuts ni les droits des employés, qualifiant ces craintes " d'infondées " et précisant que l'exercice du droit de préemption par l'État ne remet en cause ni les postes ni les protections existantes.
Malgré la signature, le processus n'est pas totalement achevé. Le gouvernement a indiqué que s'ouvre désormais une phase dite " d'interim ", période transitoire précédant le closing définitif. Plusieurs engagements, dont les autorités n'ont pas dévoilé la teneur, doivent encore être finalisés entre les deux parties avant l'entrée en vigueur juridique complète de la cession.
Cette opération trouve son origine dans la décision prise en 2023 par Actis-CPH d'annoncer officiellement son intention de quitter le capital d'Eneo. Yaoundé avait immédiatement manifesté son intérêt pour une reprise, avant de mettre en place un comité interministériel chargé des discussions techniques, juridiques et financières. Selon le ministère des Finances, Actis a ensuite donné son accord de principe pour la vente, ouvrant la voie à un cycle de négociations.
Pour mener cette opération, l'État s'est entouré de deux cabinets spécialisés. Le cabinet Chazai Wamba, en charge du conseil juridique, et KPMG Corporate Finance S.A.S, mandaté pour l'accompagnement financier. L'accord signé marque ainsi, selon le ministère des Finances, " l'aboutissement d'un processus stratégique majeur pour le secteur électrique camerounais et ouvre une nouvelle phase de développement, dans un contexte où la demande intérieure croît rapidement et où la stabilité du réseau reste l'un des défis économiques les plus sensibles du pays. "
Perton Biyiha
La Rédaction
Publié le 19/11/25 14:48