Face aux lenteurs du développement de sa filière bauxite, le Ghana fait volte-face. En annulant un contrat de 1,2 milliard de dollars avec la société locale Rocksure, le pays s'ouvre désormais à des investisseurs internationaux de premier plan, comme Emirates Global Aluminium ou des groupes chinois. Une stratégie audacieuse pour valoriser l'un des plus importants gisements d'Afrique de l'Ouest.
Le Ghana, riche de près de 900 millions de tonnes de bauxite, opère un virage stratégique dans la gestion de ses ressources minières. Le gouvernement vient d'annuler un bail de 1,2 milliard de dollars octroyé à Rocksure International, société locale qui devait développer, en partenariat avec la Ghana Integrated Aluminium Development Corporation (GIADEC), le très convoité gisement de Nyinahin, dans le centre du pays. En cause, un contrat jamais ratifié par le Parlement, et donc considéré comme nul par la justice depuis une décision de la Cour suprême de 2019.
Cette rupture marque un tournant. Plutôt que de s'enfermer dans une coentreprise à portée limitée, le Ghana vise désormais un partenariat avec un acteur mondial de l'aluminium, capable de mobiliser des capitaux, une expertise technologique, et de sécuriser des débouchés industriels.
Emirates Global Aluminium dans le viseur
Parmi les prétendants pressentis, Emirates Global Aluminium (EGA), un mastodonte basé à Dubaï, tient la corde. L'entreprise, qui a récemment perdu sa licence d'exploitation en Guinée pour des retards de construction d'une raffinerie, pourrait voir au Ghana une opportunité de diversification. En juin, EGA a signé un protocole d'accord avec GIADEC, première étape vers une éventuelle exploitation conjointe.
‘'EGA évalue actuellement les paramètres techniques et commerciaux d'une telle collaboration'', a confirmé la société à Reuters, tout en précisant qu'aucun accord contraignant n'a encore été signé.
Des entreprises chinoises sont également sur les rangs, attirées par les réserves du Bloc B de Nyinahin, estimées à 376 millions de tonnes de bauxite. GIADEC, en quête active de partenaires, souhaite débuter les extractions dès le premier trimestre 2026.
Une relance attendue d'un géant endormi
Premier producteur africain d'or, le Ghana est pourtant à la traîne dans la filière bauxite, dominée par la Guinée. Malgré son potentiel, le pays peine depuis des années à attirer des investissements à la hauteur de ses ambitions. Le partenariat avorté avec Rocksure illustre cette difficulté : depuis sa signature, aucune mine ni raffinerie n'avait vu le jour.
L'objectif désormais est de tirer parti de la conjoncture favorable de l'aluminium sur les marchés mondiaux, attirer des investisseurs à forte capacité et sécuriser une transformation locale. Le pays vise une production de 2 millions de tonnes dès 2025.
Derrière cette manœuvre, se joue aussi une question de gouvernance. En annulant un bail non ratifié, le gouvernement montre qu'il souhaite remettre de l'ordre et privilégier la transparence, notamment dans la gestion des actifs stratégiques. En parallèle, les autorités cherchent à éviter les pièges d'une ‘'nationalisation à tout prix'' qui ralentirait l'industrialisation, tout en maintenant une part publique dans les futures coentreprises.
La Rédaction
Publié le 28/07/25 16:58