Malgré les menaces américaines, le Gabon veut loger les fonds de restauration des sites pétroliers à la BEAC

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Le 26 avril prochain, Libreville devrait signer une convention avec les entreprises pétrolières actives sur son territoire pour encadrer la gestion des fonds dits de Remise en État des Sites (RES). Ces fonds, alimentés par les compagnies pour restaurer les zones d'exploitation en fin de vie, devront désormais être logés à la Banque des États de l'Afrique centrale (BEAC), conformément à un engagement pris par les chefs d'État de la région fin 2024.

L'objectif est de garantir l'utilisation effective de ces ressources à des fins environnementales, mais aussi de renforcer les réserves de change de la CEMAC, mises sous tension ces dernières années. Selon les estimations de la BEAC, ces fonds pourraient représenter jusqu'à 6 000 milliards FCFA, soit environ 9,6 milliards de dollars, constituant ainsi un matelas de sécurité appréciable pour soutenir la stabilité monétaire régionale.

Voir aussi- Un projet de loi américain veut restreindre l'aide du FMI aux pays de la CEMAC

Mais ce mécanisme suscite l'hostilité de certains acteurs internationaux, notamment aux États-Unis. Le 25 mars 2024, un projet de loi a été introduit au Congrès américain visant à suspendre le soutien des États-Unis à toute opération du Fonds monétaire international (FMI) en faveur des pays de la CEMAC. En ligne de mire : l'inclusion des fonds RES dans les réserves de change officielles.

Le texte, porté par le républicain Bill Huizenga, considère que ces ressources, affectées à des dépenses environnementales spécifiques, ne devraient pas être comptabilisées comme des actifs liquides disponibles. Il rappelle que les réserves de change doivent être facilement mobilisables par les autorités monétaires, ce qui ne serait pas le cas des fonds RES, strictement encadrés et conditionnés à des obligations contractuelles. Selon ce projet de loi, ''le FMI a la responsabilité de clarifier les critères d'éligibilité des actifs comptabilisés dans les réserves afin de garantir la fiabilité des données financières des pays membres''.

Le texte reflète aussi les tensions grandissantes entre la CEMAC et plusieurs multinationales du secteur extractif, notamment américaines. Chevron, ExxonMobil ou encore Vaalco Energy ont exprimé, à travers des relais institutionnels, leur inquiétude face aux nouvelles règles de change imposées par la BEAC depuis 2019, qui exigent un rapatriement accru des devises. Le lobbying de ces entreprises semble aujourd'hui trouver un relais puissant au sein du Congrès américain.

Dans un communiqué publié le 9 avril, la Chambre africaine de l'énergie, dirigée par NJ Ayuk, a salué l'initiative américaine, estimant qu'elle ouvre la voie à une réforme des politiques de change en Afrique centrale. Elle appelle à un équilibre entre protection des investisseurs et soutien à la croissance économique locale.

Malgré ce contexte tendu, le Gabon poursuit la mise en œuvre de sa stratégie. Le ministre de l'Économie et des Participations, Mark-Alexandre Doumba, a réaffirmé le 16 avril dernier, lors d'une séance de travail avec les compagnies pétrolières, la volonté du pays de faire aboutir la convention sur les fonds RES. ''Cette initiative traduit l'engagement des autorités gabonaises en faveur du développement durable et de la transparence'', a-t-il déclaré, se disant satisfait de l'évolution des discussions avec les entreprises concernées.

Pour la BEAC, la signature de ces conventions représente une priorité. Elle a été mandatée pour conclure ces accords avant le 30 avril 2025, avec la possibilité d'imposer des sanctions en cas de non-respect. À la clé : un renforcement des réserves de change, qui s'élevaient à 7 515 milliards FCFA au 31 janvier 2025, assurant une couverture extérieure de la monnaie de 74,9 %.

La Rédaction

Publié le 22/04/25 14:27

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