Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l'Organisation mondiale de la santé (OMS)
Le système de santé africain traverse une période sensible. Les coupes drastiques opérées par Washington dans son aide au développement, près de 10 milliards de dollars en moins par rapport à l'an dernier, fragilisent les programmes sanitaires sur le continent.
Mais pour l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), cette crise pourrait aussi être une opportunité ; celle de repenser le financement de la santé et de renforcer l'autonomie des pays africains.
Une saignée budgétaire inédite
Selon les estimations de l'OMS, l'aide à la santé devrait chuter de 40% en deux ans, passant de 25 milliards de dollars à 15 milliards. Une baisse qualifiée de ‘'précipice'' par le directeur général de l'institution, Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, lors de la 75e session du Comité régional de l'organisation à Lusaka.
Cette contraction a déjà quelques effets concrets : cliniques fermées, personnels de santé licenciés, campagnes de vaccination interrompues, médicaments bloqués dans des entrepôts. Les progrès contre le VIH, le paludisme et la tuberculose stagnent, voire reculent, tandis que le fardeau des maladies non transmissibles explose.
Si l'urgence est réelle, Dr Tedros a rappelé que cette crise pouvait être un catalyseur : ‘'Il est temps de se libérer du joug de la dépendance à l'aide et d'entrer dans une ère de souveraineté sanitaire''.
Certains pays montrent déjà la voie. Le Ghana a relevé de 60% le budget de son assurance maladie en supprimant le plafond sur les taxes affectées. Plusieurs États, du Botswana à l'Afrique du Sud, ont introduit des taxes sur le tabac, l'alcool ou les boissons sucrées, générant des ressources nouvelles tout en réduisant les risques sanitaires.
L'OMS elle-même fragilisée
La crise n'épargne pas l'organisation onusienne. Son budget biennal 2026-2027 a été réduit à 4,2 milliards de dollars, contre 5,3 initialement prévus. L'institution a dû engager une cure d'austérité : rationalisation des départements, réduction de moitié de l'équipe de direction, suppressions d'emplois (environ 600 postes) devraient disparaître.
Au-delà des chiffres, un constat s'impose : la dépendance structurelle de l'Afrique aux financements extérieurs rend ses systèmes de santé vulnérables. La chute de l'aide américaine agit comme un révélateur et oblige à explorer d'autres modèles.
Entre mobilisation fiscale innovante, investissements domestiques et solidarité régionale, l'avenir de la santé africaine pourrait bien dépendre de la capacité des pays à transformer cette crise en tremplin vers une véritable souveraineté sanitaire.
La Rédaction
Publié le 25/08/25 16:34