2025, n'a pas été une année simple au Sénégal. Entre dette cachée, absence d'accord avec le FMI et baisse de notations souveraines, le gouvernement a connu des vertes et des pas mûrs. Cependant l'exploitation du pétrole et du gaz constitue un éclairci dans la grisaille et offre d'intéressantes perspectives.
L'omniprésente dette cachée
En 2025, le débat sur la dette publique a cristallisé les attentions au Sénégal. Cette question a été pour la première fois évoquée par le premier ministre Ousmane Sonko, le 27 septembre 2024. Le Chef du Gouvernement faisait ainsi état d'un tripatouillage des données publiques, avec un endettement au mois de décembre 2023 atteignait 99% du PIB au lieu du taux de 76% officiellement déclaré.
En 2025, au fil du temps, ce taux d'endettement grimpait. Ainsi, au mois d'avril, le Fonds monétaire international (FMI) déplorait une dette cachée de 7 milliards de dollars. En même temps, le taux d'endettement a été réévalué à 119% du PIB. C'est dans ce contexte que le Gouvernement du Sénégal avait commandité un audit confié au Cabinet Mazars. Les résultats ont par la suite confirmé un endettement estimé à 130%.
Une situation combinée aux différentes baisses de la notation du pays par Standard & Poors, à B-, au mois de juillet, puis à Caa1 par Moody's en octobre, ensuite à CCC+ au mois de novembre par S&P. Ces notations souveraines ont fait chuter à plusieurs reprises, les euro-obligations du Sénégal, favorisant un climat de risque et d'incertitudes sur les marchés.
Statu quo relance FMI
En 2025, En 2025, l'actualité économique et financière du Sénégal est également marquée par l'absence d'accord concret avec le Fonds monétaire international (Fmi). Pendant 12 mois, les missions et travaux entre Dakar et Washington n'ont pas donné grand-chose. Ainsi, le pays est resté 18 mois sans décaissement de l'institution de Bretton Woods, alors que 230 milliards FCFA étaient attendus en mai 2024.
Le retard dans la mise en place d'un nouveau cadre de partenariat a été causé par l'audit des finances publiques qui a révélé un taux d'endettement à 119% du PIB à décembre 2023. Par la suite, l'audit du cabinet Mazars a fait état d'un endettement estimé à 132% du PIB. Devant cette situation, le FMI, dans ses multiples sorties s'est félicité de la dynamique de transparence tout en assurant être en train d'examiner les différentes informations financières.
Cependant le FMI a demandé que l'éclairage soit fait concernant la manipulation des chiffres et la dette cachée. Récemment, au mois d'octobre, l'institution s'est également engagée à revoir son dispositif interne afin que pareille situation ne se reproduise.
Quatre emprunts obligataires
Avec des marges de manœuvre quasiment nulles sur le marché international, le Sénégal s'est rabattu en 2025, sur le marché régional de l'UEMOA. Entre avril et octobre, le pays a réussi trois emprunts obligataires. Les différentes opérations ont permis au total de lever près de 1220 milliards FCFA.
Le premier emprunt par appel public à l'épargne a eu lieu, au mois d'avril. Le pays a levé 405 milliards FCfa sur un objectif de 150 milliards FCfa. Ainsi, le Gouvernement nouvellement installé se félicitait d'une couverture réussie. La deuxième opération en juillet a permis de lever 364 milliards FCfa, alors que 300 milliards FCFA étaient recherchés.
Ensuite, l'APE lancé le 18 septembre 2025, a été clôturé le vendredi 10 octobre 2025. Structurée par Impaxis Securities, arrangeur principal et chef de file, en collaboration avec la Société Générale, l'opération a permis de lever 450 milliards Fcfa. Et au début du mois de décembre, un nouvel APE de 400 milliards FCFA a été lancé. Il doit être clôturé, ce vendredi 26 décembre 2025.
En 2025, le Sénégal a été très dynamique sur le Marché des Titres dans le cadre de sa stratégie de mobilisation de l'épargne domestique. La dernière opération en date, organisée le 24 décembre a permis de mobiliser 59 milliards FCFA, à travers une émission simultanée d'Obligations et de Bons assimilables du Trésor.
Les projections pétrolières montent réévaluées à 34,5 millions de barils
En 2025, le Sénégal a poursuivi l'exploitation de ses ressources pétrolière et gaziers. Pour la réserve de Sangomar, dont l'exploitation a démarré le 11 juin 2024, les estimations pour l'année 2025 ont été revues à la hausse. Elles sont passées de 30,53 millions de barils, à 34,5 millions.
Pour le Gouvernement, cela est favorisée bonne dynamique des réservoirs, de la bonne tenue des puits et à la robustesse des performances opérationnelles. Ainsi, seulement en novembre 2025, trois cargaisons de pétrole brut ont été expédiées et commercialisées sur le marché international, pour un volume total de 2,93 millions de barils.
Concernant le gaz, l'exploitation de Grand Tortue Ahmeyim a démarré le 31 décembre 2024. De ce fait, entre janvier et novembre 2025, huit cargaisons de gaz naturel liquéfié (GNL) ont été exportées au cours du mois, représentant un volume total de 1,8 million de mètres cubes de GNL.
Lancement du New deal technologique
En février 2025, le New deal technologique a été lancé par le président de la République Bassirou Diomaye Faye. La stratégie et les programmes connexes sont évalués à 1 105 milliards FCFA. Ils sont arrimés à l'Agenda de transformation nationale dénommé Sénégal 2050, présenté le 14 octobre 2024.
La stratégie de financement repose sur un budget prévisionnel de 800 milliards FCFA; un financement privé disponible de 150 milliards FCFA et un montant restant à financer de 155 milliards FCFA. Pour le président sénégalais, le projet fixe les jalons d'une société́ ancrée dans des valeurs fortes et tournée vers un développement inclusif et durable.
Ainsi, avec le New deal technologique, il est attendu la simplification et la standardisation des procédures, un accès universel à Internet, une connectivité́ de qualité, performante et à un coût abordable, une identité numérique unique, basée sur la biométrie, et permettant de générer des identités secondaires et fonctionnelles, pour des usages sectoriels dans la santé, l'éducation, la justice, l'économie, donc dans tous les évènements de vie.
Le New deal permettra également un guichet unique citoyen, seule interface entre les usagers et l'administration, pour toutes les démarches, une plateforme numérique centralisée et intégrée, permettant aux usagers d'accéder aux informations et services de base tels que la création d'entreprise, les impôts, le cadastre, ou les services de paiement.
Sans oublier, un programme d'incubation et de financement pour accompagner les startups locales et encourager l'innovation technologique. Il y aura également une dématérialisation des procédures et la digitalisation des documents, permettra d'éliminer les intermédiaires, de réduire les délais de traitement.
Une année " avec un sentiment de lucidité et d'inquiétude "
Pour l'économiste, Seydou Sow, l'année 2025 s'achève au Sénégal sur un sentiment mêlé de lucidité et d'inquiétude. Pour lui, rarement l'actualité économique n'aura été aussi dense, aussi scrutée, aussi commentée. Car estime-t-il, entre tensions budgétaires, incertitudes financières et attentes sociales fortes, le pays a traversé douze mois marqués par des choix difficiles et des équilibres fragiles.
Au cœur de cette séquence, dit-il, la question de la dette publique s'est imposée comme le principal fil conducteur. " Les discussions avortées avec le Fonds monétaire international, la controverse autour de l'existence d'une dette non déclarée et les dégradations successives de la notation souveraine ont profondément affecté la perception du risque sénégalais ", analyse l'économiste. Pour lui, les marchés ont réagi sans détour : repli des investisseurs, hausse des primes de risque et chute marquée des cours des euro-obligations.
Cependant, il considère que réduire l'année 2025 à une simple crise serait une lecture incomplète. L'économie sénégalaise, à ses yeux, a également démontré une capacité de résistance notable. " La mise en production des hydrocarbures, la poursuite de l'activité dans les secteurs clés et une inflation contenue ont permis d'enregistrer une croissance robuste, dépassant les 12 % au premier trimestre. Ces performances rappellent que les fondamentaux existent et que le potentiel reste intact ", explique le spécialiste.
Mouhamadou Dieng
Publié le 29/12/25 09:10