Face à une situation financière critique, le gouvernement sénégalais a dévoilé un train de 14 mesures pour redresser la Société nationale de commercialisation des oléagineux du Sénégal (SONACOS SA), pilier stratégique de la filière arachidière et de l'industrie agroalimentaire nationale.
Réuni en conseil interministériel ce 22 août à Dakar, la capitale, le premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a dressé un constat sans complaisance sur l'état de santé de la SONACOS. L'entreprise, qui occupe une place centrale dans la transformation de l'arachide et la production d'huile au Sénégal, fait face à de graves difficultés financières. Il s'agit des pertes cumulées de 33 milliards FCFA entre 2023 et 2024, capitaux propres négatifs de 9,5 milliards FCFA, installations industrielles vétustes et environnement concurrentiel défavorable.
Créée pour être l'un des bras armés de la souveraineté alimentaire, la SONACOS a longtemps pâti d'une privatisation jugée inefficace avant son retour sous le giron de l'État. Depuis 2018, Dakar a injecté plus de 140 milliards FCFA pour soutenir la société, sans parvenir à enrayer l'hémorragie financière. La faiblesse de la régulation de la filière arachidière, dominée par l'exportation massive des meilleures graines et la concurrence étrangère, a accentué la vulnérabilité de l'entreprise. Pourtant, malgré deux années d'arrêt, la nouvelle direction a su relancer la collecte en 2024-2025, passant de 12 900 tonnes à 155 000 tonnes de graines, et créer plus de 2 300 emplois en redémarrant les usines. Une dynamique que le gouvernement entend désormais consolider.
Le plan annoncé par Ousmane Sonko repose sur trois axes, à savoir la reconstitution des fonds propres, le renforcement de la compétitivité et la modernisation de la gouvernance. Parmi ces mesures phares, figurent entre autres, l'injection de capitaux pour reconstituer les fonds propres et sauver l'équilibre financier, la prise en charge par l'Etat de la différence entre le prix au producteur et le prix économique, pour un montant de 9 milliards FCFA en 2026, les allègements fiscaux et douaniers pour redonner de la compétitivité aux huiles et tourteaux produits localement.
En outre, la protection contre les importations à travers quotas et révision de la fiscalité, la facilitation des financements via des partenariats public-privé et l'accompagnement des bailleurs internationaux, et la révision du cadre réglementaire, avec notamment une dérogation au code des marchés publics pour permettre plus de flexibilité. L'objectif est clair, à savoir permettre à la SONACOS de redevenir un acteur moteur de la souveraineté alimentaire et industrielle du Sénégal.
A moyen terme, la société devra se recentrer sur son cœur de métier, notamment la collecte, la transformation et la commercialisation de l'arachide, tout en valorisant son important patrimoine foncier. D'ici 2031, la SONACOS est appelée à financer elle-même ses campagnes de commercialisation et à verser des dividendes à ses actionnaires, dont l'Etat est largement majoritaire.
Cette relance de la SONACOS s'inscrit dans le cadre plus large de l'Agenda national de transformation économique ‘'Vision Sénégal 2050'', qui met en avant souveraineté alimentaire et industrialisation. Pour le premier ministre, ce plan représente un test grandeur nature : ‘'Le redressement de la SONACOS est une question de souveraineté nationale et de justice sociale'', a insisté Ousmane Sonko, convaincu que l'entreprise peut redevenir un levier stratégique pour l'économie et l'emploi.
Narcisse Angan
Publié le 23/08/25 09:19