UMOA : Le marché des titres publics sous forte tension

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L'année 2023 s'annonce pleine de rebondissement sur le marché obligataire de la zone UEMOA. L'inflation reste toujours élevée, chiffrée à 6% en janvier, loin de la norme communautaire de 3%. Réuni le 9 décembre 2022 à Dakar, le Comité de Politique Monétaire (CPM) de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) a décidé de relever pour la 3ème fois son principal taux directeur pour contrer cette inflation galopante. Le principal taux directeur auquel la BCEAO prête ses ressources aux banques commerciales est donc passé de 2,50% à 2,75% en décembre 2022. Cette succession de hausses a des revers sur le marché obligataire. 

Depuis la hausse du principal taux directeur à 2,75% en décembre 2022, les levées sur le marché des titres publics sont en repli. Sur pratiquement le premier trimestre 2023, le marché des titres publics a mobilisé 1 062 milliards FCFA, soit une baisse de 33,8% comparé au premier trimestre 2022qui avait permis de mobiliser 1 421 milliards FCFA.

Si dans le détail le montant levé sur le marché par adjudication en janvier a augmenté de 21,8% à 507,89 milliards FCFA (une tendance mensuelle qui devrait normalement se maintenir tout le long de l'année selon les données historiques), l'on a enregistré un retournement de situation depuis le mois de février en raison de la politique monétaire qui commence à peser sur les banques. 

En février, le montant levé est passé à 403,42 milliards FCFA contre 528 milliards FCFA en février 2022, soit une baisse de 23,59% milliards FCFA. Dans le même temps, le montant disponible pour le refinancement des banques est passé de 6 000 milliards de FCFA à 5 800 milliards FCFA le 21 février 2023. Le 28 février, ce montant disponible au refinancement est passé à 5 600 milliards FCFA. 

Le 1er mars 2023, à l'issue de sa réunion ordinaire, le CPM (Comité de politique monétaire) de la BCEAO décide de relever de 25 points de base le principal taux directeur, le portant donc à 3% et cela à compter de 16 mars 2023. À la suite de cette annonce, l'on remarquera une baisse drastique des offres des investisseurs sur le marché régional des titres publics concomitamment à une hausse des exigences (taux d'intérêt) des investisseurs, entrainant en conséquence une chute des enveloppes mobilisées par les Etats. Ajouté à cela, le montant disponible au refinancement des banques a continué à reculer. Le 7 mars 2023, il passe à 5 500 milliards FCFA, soit une baisse de 8,33% du montant disponible en 1 mois.

Cette hausse du taux directeur couplé au retrait brutal et massif de la liquidité disponible au refinancement a asphyxié les banques et a entrainé une panique sur les marchés des titres publics et interbancaire. Ainsi, depuis le 1er mars 2023, et ce jusqu'au 27 mars, le montant levé s'évalue à 159 milliards FCFA contre 476 milliards FCFA en mars 2022, soit une chute de 66,60%. 

Dans le détail, suivant l'annonce de la hausse du principal taux directeur à 3%, dès le 1er mars, le marché a été chamboulé. Le premier effet fut le report de l'émission du Burkina et l'annulation de celle du Niger le 1er et 2 mars 2023. La semaine qui a suivi, la Guinée Bissau, recherchant 5 milliards FCFA, n'a reçu que 1,06 milliards FCFA, montant qui fut rejeté certainement à cause des taux demandés par les investisseurs. Le Mali a suivi avec un taux de couverture à 34,5% et le Togo termina la semaine avec un taux de couverture à 38,7%. 

Le mardi 13 mars, c'est la Côte d'Ivoire qui reportait son émission, et à partir de là, les investisseurs ont commencé à n'investir principalement que sur les émissions de leurs pays d'origine. Le jour suivant, le 14 mars, le Burkina émettait des titres pour un montant de 30 milliards FCFA ; une émission qui a reçu des offres de 10,76 milliards FCFA dont 10,24 milliards FCFA émanant des investisseurs locaux. Il en fut de même pour le Niger le jour d'après 15 mars, avec 34,6 milliards FCFA retenus dont 34 milliards FCFA provenant des investisseurs nigériens.

La Cote d'Ivoire, le 17 mars, a retenu 80 milliards FCFA dont 78 milliards FCFA provenant des investisseurs ivoiriens. Sur la semaine du 20 mars, l'Etat ivoirien a reçu 8,24 milliards FCFA dont 8,2 milliards FCFA venant des investisseurs ivoiriens mais aucun montant n'a été retenu et cela pour un montant sollicité de 85 milliards FCFA. Le Mali et le Benin ont par la suite reporté leurs émissions.

  

Montants obligataires de l'Union sur T1 2023 sur UMOA-Titres (en milliards FCFA)

A l'évidence nous pouvons noter que la politique monétaire de la BCEAO a assurément eu un impact sur l'issue des émissions de titres publics surtout dans ce mois de mars 2023. Sûrement la BCEAO, en augmentant de 200 milliards de FCFA le montant du refinancement qui est passé de 5 500 milliards FCFA à 5 700 milliards FCFA le lundi 27 mars, a certainement voulu apporter une bouffée d'oxygène au marché obligataire. 

La semaine du 20 mars 2023, la FED et la BCE ont encore remonté leur taux. Si la BCEAO fait de même dans les semaines à venir, devront nous nous attendre à une désertion des investisseurs sur le marché obligataire de UMOA-Titres et éventuellement de la BRVM ? 

Sekou Karamoko

La Rédaction

Publié le 28/03/23 15:18

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