COURS | GRAPHIQUES | ACTUS | FORUM |
L'agence de notation Fitch Ratings a confirmé la note souveraine de long terme en devises étrangères de la Côte d'Ivoire à ‘BB-', assortie d'une perspective stable, saluant la robustesse économique du pays tout en relevant la nécessité de veiller à la stabilité politique à l'approche de l'élection présidentielle.
Cette évaluation, rendue publique ce 20 juin, confirme la reconnaissance des investisseurs internationaux pour le cadre macroéconomique ivoirien, tout en soulignant les défis structurels que le pays devra encore surmonter pour espérer une amélioration de sa notation.
Des fondamentaux solides, mais encore des défis à relever
Fitch salue la croissance soutenue du pays, avec un PIB réel en hausse de 6,1 % en 2024 – bien au-dessus de la médiane des pays notés ‘BB' (3,7 %). Les projections restent positives, à 6 % en 2025 et 6,5 % en 2026, portées par la dynamique des secteurs extractifs, l'industrialisation agricole (cacao), une consommation des ménages en hausse et l'investissement public.
L'inflation demeure maîtrisée, le cadre budgétaire reste globalement prudent, et la politique monétaire bénéficie de l'ancrage régional via la BCEAO.
Mais Fitch met en lumière des insuffisances structurelles persistantes : un revenu par habitant relativement bas, des recettes fiscales modestes (16,5 % du PIB en 2024), et un endettement public relativement élevé, attendu à 55,2 % du PIB en 2026, contre une médiane de 54 % pour la catégorie ‘BB'.
Consolidation budgétaire
La consolidation des finances publiques est amorcée, avec un déficit budgétaire réduit à 4,0 % du PIB en 2024, contre 5,2 % un an plus tôt. Fitch table sur un déficit en baisse à environ 3 % du PIB d'ici 2026, en grande partie grâce à la hausse attendue des recettes fiscales, notamment sous l'effet décalé de la flambée des cours du cacao.
Voir aussi - La Côte d'Ivoire de nouveau distinguée à l'international pour la qualité de la gestion de sa dette
Toutefois, la dette rapportée aux recettes reste très élevée (313 % en 2026, contre une médiane de 225 % pour la catégorie), de même que la charge d'intérêt sur les recettes (15,5 % en 2026, au-dessus de la médiane de 11 %).
Le succès du plan de mobilisation des recettes adopté en avril 2024, incluant la réforme de la fiscalité foncière, sera déterminant pour inverser durablement cette trajectoire.
Au niveau des réserves internationales de la BCEAO – dont la Côte d'Ivoire est membre – le portefeuille a fortement progressé, passant de 15,9 milliards USD fin 2023 à 29,6 milliards en mai 2025, soit 5 mois de couverture des importations, un niveau qui rassure les marchés sur la liquidité externe.
Cette amélioration résulte de la hausse des recettes d'exportation (cacao, pétrole) et de la reprise des financements multilatéraux, dont les décaissements du FMI.
Entre discipline budgétaire et résilience institutionnelle
L'élection présidentielle d'octobre 2025 s'annonce comme un test crucial de stabilité politique selon Fitch qui s'inquiète toutefois de risques potentiels de tensions. Cependant, le scénario central de l'agence suppose une continuité des politiques économiques, sans crise politique majeure ni impact significatif sur les agrégats macroéconomiques.
Une amélioration de la note souveraine de la Côte d'Ivoire serait envisageable si plusieurs conditions sont réunies. D'abord, un maintien de la stabilité politique, notamment durant la période électorale à venir, constituerait un signal fort de consolidation institutionnelle. Ensuite, une accélération tangible de la mobilisation des recettes publiques, combinée à une trajectoire clairement descendante de l'endettement, renforcerait la crédibilité budgétaire du pays. Enfin, la confirmation d'une croissance soutenue et équilibrée, s'inscrivant dans un cadre macroéconomique stable et prévisible, viendrait appuyer cette dynamique positive.
À l'inverse, une détérioration de la note interviendrait si des troubles politiques ou sécuritaires venaient fragiliser les équilibres économiques, notamment en affectant les recettes de l'État ou en forçant une augmentation des dépenses. Un dérapage budgétaire menant à une progression continue du ratio dette/PIB constituerait également un signal négatif. Enfin, un ralentissement marqué de l'activité économique, rompant avec la trajectoire actuelle de croissance robuste, compromettrait durablement la position financière du pays aux yeux des agences de notation.
Jean Mermoz Konandi
Publié le 24/06/25 15:10
Vous avez aimé cet article ? Partagez-le avec vos amis en cliquant sur les boutons ci-dessous :