Alors que le gouvernement réaffirme son ambition de porter la production nationale d'alliages de manganèse à 2 millions de tonnes d'ici 2029, une question centrale reste étrangement absente du débat, le Gabon dispose-t-il réellement des capacités énergétiques nécessaires pour soutenir une telle montée en puissance industrielle ? Vendredi 14 novembre, lors d'une séance de travail avec le Directeur Général d'Eramet-Comilog, Paulo Castellari, le ministre des Mines, Gilles Nembe, a rappelé la vision présidentielle. Mais la faisabilité technique, notamment sur le plan énergétique, demeure un angle mort majeur de cette stratégie minière.
Transformer du minerai en alliages métalliques exige une infrastructure lourde avec des fours électriques, alimentation stable, puissance élevée, sécurisation des pics de consommation. Or, le Gabon fait toujours face à un déficit structurel d'électricité, marqué par des centrales vieillissantes, des capacités de production insuffisantes et des tensions récurrentes sur le réseau. Aucune indication n'a été donnée quant à l'extension des réseaux, la construction de nouvelles unités de production ou le renforcement des capacités hydroélectriques pour absorber la charge supplémentaire que représente l'objectif de 2 millions de tonnes.
Cette fragilité énergétique est d'autant plus problématique que la transformation industrielle du manganèse est l'une des activités les plus électro-intensives du pays. Sans plan énergétique, le scénario d'une industrie opérant à pleine capacité reste hypothétique. Le risque est réel de voir les ambitions minières dépendre de solutions transitoires ou coûteuses, comme des alimentations thermiques supplémentaires ou des investissements publics massifs non budgétisés.
En réaffirmant sa volonté politique, le gouvernement pose donc les bases d'une stratégie de montée en gamme de la filière minière. Mais pour passer du discours à la réalité, il faudra répondre à la question essentielle que tous les acteurs industriels se posent en coulisse : quelle énergie pour soutenir la transformation locale du manganèse ? Sans réponse, l'objectif de 2029 pourrait davantage relever de la projection que de la planification industrielle.
La Rédaction
Publié le 18/11/25 15:54