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Le 20 janvier 2025, une ordonnance présidentielle a mis un terme à une situation juridique ambiguë qui persistait depuis 2010. La Société Tchadienne d'Eau et d'Électricité (STEE), dissoute sur le plan opérationnel il y a 15 ans, n'avait jamais vu son démantèlement acté formellement dans les textes. C'est désormais chose faite. L'ordonnance présidentielle officialise non seulement la fin de cette entité publique créée en 1983, mais consacre aussi le transfert de l'ensemble de ses actifs et passifs à ses deux héritières que sont la SNE pour l'électricité et la STE pour l'eau potable.
Le texte a été présenté à l'Assemblée nationale tchadienne le 16 juin 2025, par le ministre du Commerce, Guibolo Fanga Mathieu, représentant son homologue de l'Eau et de l'Énergie. Présidée par Ali Kolotou Tchaïmi, président de l'Assemblée nationale, la session visait à faire ratifier ce dispositif par voie législative. Un impératif pour mettre les deux sociétés publiques en conformité avec la loi de 2024 sur la gouvernance des entreprises à participation publique.
Née d'une volonté de rationalisation exigée dans le cadre du Programme d'Ajustement Structurel (PAS) soutenu par le FMI en 1999, la scission de la STEE avait été entérinée dès 2010 par une assemblée générale extraordinaire. Deux décrets pris en 2011 avaient désigné la SNE et la STE comme les nouvelles entités délégataires des services publics d'électricité et d'eau. Mais sans texte fondateur clair, les deux entreprises ont opéré pendant plus d'une décennie dans un vide juridique, sans statuts ni transfert officiel de patrimoine.
Avec cette ordonnance, le gouvernement tchadien affirme vouloir inscrire durablement ces entités dans le cadre de la réforme structurelle du secteur public, dans l'optique de mieux répondre aux besoins des populations en matière d'accès à l'eau et à l'électricité.
Un accès encore très limité
Le défi reste immense. En matière d'électricité, le Tchad affiche l'un des taux de couverture les plus faibles de la Cemac. Le précédent plan d'urgence pour l'électrification, couvrant la période 2021-2023, visait un taux de 38 % à l'échelle nationale, mais les objectifs sont loin d'avoir été atteints. Le nouveau cap s'appuie sur le Projet d'accroissement de l'accès à l'énergie électrique au Tchad (PAAET), lancé en janvier 2025 à Massakory. Financé à hauteur de 180 milliards de FCFA par la Banque mondiale, ce projet prévoit l'équipement de 12 villes en mini-réseaux solaires avec stockage sur batteries (1,5 à 6 MW), permettant de desservir 50 000 foyers et d'éclairer l'espace public.
Par ailleurs, le projet d'interconnexion électrique sous-régional offre un espoir concret. À partir de 2027, le Cameroun s'est engagé à fournir 100 MW au Tchad via le barrage hydroélectrique de Nachtigal (420 MW), en cours d'achèvement.
Sur le front de l'eau potable, les efforts s'intensifient également. À N'Djaména, un projet majeur de réhabilitation et d'extension du réseau a été lancé en octobre 2024, pour un coût total de 40 milliards de FCFA. Réalisés par la société française Sogea-Satom, les travaux financés conjointement par l'État tchadien, l'Union européenne, l'AFD et Invest International prévoient la réhabilitation de 33 forages et 12 châteaux d'eau, ainsi que la construction de deux nouveaux réservoirs de 2 000 m³ et d'un forage profond pour capter les nappes du pliocène.
Selon le Premier ministre Allah-Maye Halina, l'objectif est de porter le taux d'accès à l'eau potable à N'Djaména à 65 % d'ici fin 2025, contre 45 % en 2021. À terme, la deuxième phase du projet vise les 80 % à l'horizon 2030. Un bond nécessaire, alors que l'amélioration reste lente depuis 2019 malgré une progression de 15 points sur la période 2019-2021.
Perton Biyiha
La Rédaction
Publié le 17/06/25 09:02
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