La Fondation Bill & Melinda Gates vient de poser un jalon historique dans le domaine de la santé sur le continent africain. L'organisation philanthropique a en effet annoncé dans un communiqué publié ce 4 août, un investissement massif de 2,5 milliards de dollars, soit 1 414,3 milliards FCFA, d'ici 2030, exclusivement destiné à la santé des femmes en Afrique et dans les pays à revenu faible. Cet engagement marque l'un des plus importants financements jamais octroyés d'un seul coup par la Fondation appartenant au milliardaire américain, fondateur de Microsoft, qui prépare un tournant stratégique d'ici sa fermeture prévue en 2045.
Cet investissement ne représente qu'un premier volet d'un programme plus vaste, par lequel Bill Gates entend redistribuer l'intégralité de sa fortune estimée à près de 200 milliards de dollars, soit 113 145 milliards FCFA. Au total, ce geste représenterait à lui seul plus de 5% de l'aide au développement international sur les deux prochaines décennies.
‘'La santé des femmes reste l'un des domaines les plus négligés de la recherche médicale. Trop de femmes continuent de mourir de causes évitables, ou vivent dans la douleur à cause de maladies mal comprises'', a déclaré Bill Gates. A travers ce programme, la Fondation espère remédier à des décennies d'invisibilisation de la santé féminine, en soutenant plus de 40 projets innovants dans cinq domaines clés, identifiés comme à fort impact mais chroniquement sous-financés.
Les domaines ciblés par cette initiative sont : les soins obstétricaux et la vaccination maternelle pour rendre la grossesse et l'accouchement plus sûrs. La santé maternelle et la nutrition, pour favoriser des grossesses plus saines et réduire la mortalité néonatale. La santé gynécologique et menstruelle, avec des innovations pour diagnostiquer et traiter des affections comme l'endométriose ou les saignements abondants. La contraception non hormonale, afin de proposer des options accessibles et acceptables, surtout pour les femmes qui souffrent d'effets secondaires liés aux contraceptifs classiques. Et enfin, la lutte contre les Infections sexuellement transmissibles (IST), notamment via des avancées comme la PrEP (stratégie de prévention du VIH) pour les femmes.
Cette initiative entend également combler le déficit criant de données sur la santé des femmes, améliorer le diagnostic médical, et s'appuie sur les besoins exprimés directement par les femmes concernées dans les pays en développement.
Un signal fort aux investisseurs publics et privés
Au-delà du soutien financier, la fondation Gates appelle à une mobilisation collective. ‘'Nous ne pouvons pas réussir seuls. Nous avons besoin que les gouvernements, les investisseurs et le secteur privé s'engagent à nos côtés'', a plaidé Anita Zaidi, responsable du programme Égalité des sexes à la Fondation.
Selon elle, l'investissement dans la santé des femmes n'est pas qu'une cause morale, c'est une opportunité économique. Des études montrent qu'un dollar investi dans la santé féminine génère trois dollars de croissance économique. Fermer l'écart entre les sexes en matière de santé pourrait rapporter jusqu'à 1 000 milliards de dollars par an à l'économie mondiale d'ici 2040.
Une réponse à l'affaiblissement des financements publics
Cette montée en puissance de la philanthropie intervient alors que l'aide publique au développement s'essouffle. La fermeture récente de l'agence américaine USAID, par exemple, illustre le désengagement progressif des Etats. Dans ce contexte, les Fondations privées, et en particulier les Fondations américaines, prennent de plus en plus le relais.
Pour Bruno Cabrillac, économiste à la Fondation pour les études et la recherche sur le développement international (Ferdi), cette évolution est doublement significative. D'un côté, elle comble les lacunes budgétaires des gouvernements. De l'autre, elle soulève la question de la soutenabilité et de la gouvernance des priorités de développement, désormais influencées par des acteurs privés aux logiques et calendriers propres.
Narcisse Angan
Publié le 05/08/25 09:35