Le marché africain des fusions-acquisitions dans le secteur pétrolier et gazier entre dans une phase d'expansion inédite. Selon les Perspectives 2026 de la Chambre africaine de l'énergie, l'année à venir devrait marquer un tournant, avec une multiplication des transactions entre majors, compagnies indépendantes et opérateurs nationaux. Cette vague s'appuie sur deux leviers : les cessions d'actifs matures des compagnies internationales et de nouveaux appels d'offres dans les bassins matures et émergents, notamment en Algérie, Libye et Afrique de l'Ouest.
À l'échelle mondiale, les transactions du secteur amont ont atteint 51 milliards de dollars au premier semestre 2025, un volume modéré mais révélateur d'une transition : les entreprises privilégient désormais la rationalisation de leurs actifs et le renforcement de leurs positions stratégiques. L'Afrique, quant à elle, se distingue par une attractivité renouvelée, dans un contexte de stabilité réglementaire accrue et de revalorisation des ressources locales.
Le Nigeria, épicentre du mouvement
Le Nigeria concentre une part significative des grandes manœuvres. En mars 2025, Shell a finalisé la cession de sa filiale onshore, la SPDC, au consortium nigérian Renaissance, réunissant cinq sociétés locales. Cette transaction emblématique confirme la stratégie des majors de se retirer des champs terrestres pour se recentrer sur les gisements en eaux profondes, plus rentables et moins exposés.
Dans le même temps, ExxonMobil, Eni et TotalEnergies ont cédé plusieurs de leurs actifs à des opérateurs nigérians comme Seplat Energy, Oando ou Chappal Energies Offshore. Résultat, les sociétés locales contrôlent désormais une part croissante du portefeuille pétrolier du pays. La décision finale d'investissement de Shell sur le projet Bonga Nord révèle, elle, la confiance retrouvée des investisseurs dans le cadre réglementaire nigérian, remodelé par la Petroleum Industry Act.
Des transactions à forte valeur en Afrique centrale et de l'Ouest
Hors Nigeria, la dynamique s'étend. Vitol a déboursé 1,65 milliard de dollars pour reprendre des actifs d'Eni en Côte d'Ivoire et en République du Congo, consolidant ainsi sa présence sur le continent et sécurisant ses approvisionnements en gaz naturel liquéfié (GNL). De son côté, Shell a acquis la participation de 12,5% de TotalEnergies dans le champ de Bonga pour 510 millions de dollars, un signe clair de repositionnement stratégique autour de projets à haute rentabilité.
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Ces opérations s'inscrivent dans un contexte de restructuration des portefeuilles mondiaux : les majors cherchent à financer leurs programmes de transition énergétique, tandis que les opérateurs africains profitent de conditions de financement plus souples et d'un environnement fiscal amélioré.
La relance des appels d'offres est un autre moteur du redémarrage des transactions.
En Algérie, le premier round depuis dix ans a abouti à l'attribution de cinq blocs sur six, avec des conditions fiscales révisées et un régime de partage de production plus attractif.
En Libye, le retour sur la scène internationale après 17 ans d'interruption s'est matérialisé par 22 blocs proposés aux investisseurs, assortis de dispositifs incitatifs.
Cette évolution traduit un tournant ; l'Afrique cherchant à combiner sécurité énergétique, attractivité fiscale et ouverture aux partenariats internationaux.
Selon NJ Ayuk, président exécutif de la Chambre africaine de l'énergie, 2026 devrait être marquée par une vague de consolidations entre compagnies de taille moyenne et opérateurs indépendants africains.
‘'Le secteur pétrolier et gazier africain entre dans une phase de maturité, avec des regroupements qui renforceront la compétitivité et l'efficacité des acteurs locaux'', explique-t-il.
Autre tendance émergente, l'essor des échanges d'actions comme mode de transaction, complémentaire aux paiements en liquidités. Cette évolution illustre une sophistication croissante du marché, portée par la montée en puissance des bourses régionales et des fonds d'investissement africains.
La Rédaction
Publié le 06/11/25 13:29