L'An 1 de Diomaye Faye : Entre contraintes budgétaires, ambitions économiques et mesures sociales

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Élu le 24 mars 2024, le président Bassirou Diomaye Faye vient de boucler sa première année à la tête du Sénégal. L'occasion de revenir sur les principales orientations politiques engagées et les défis économiques encore à surmonter.

" Les marges de manœuvre budgétaire et financière n'existent quasiment plus "

Ce premier anniversaire coïncide avec une situation macroéconomique marquée par une forte contrainte budgétaire. La Cour des comptes a récemment révélé que l'endettement public s'élève à 99,67 % du PIB, un niveau largement supérieur au plafond communautaire fixé à 70 %. Dans le même temps, le déficit budgétaire cumulé entre 2019 et 2023 est estimé à 12 %.

Ces indicateurs limitent fortement la capacité de l'État à mettre en œuvre certaines politiques publiques. Le chef de l'État l'a lui-même reconnu : " Nous sommes un État contraint, dont les marges de manœuvre budgétaire et financière n'existent quasiment plus ", a déclaré le président, évoquant un héritage économique et social lourd à assumer.

Autre obstacle pointé par le président : une administration "républicaine mais figée", qu'il juge en décalage avec les transformations contemporaines, notamment la digitalisation et les nouveaux usages liés à l'intelligence artificielle.

Contexte social tendu et suppressions d'emplois

La situation socio-économique reste fragile. Plusieurs entreprises publiques et parapubliques ont procédé à des vagues de licenciements. Le Grand Théâtre de Dakar a remercié une soixantaine d'agents. Au Port autonome de Dakar, près de 700 contrats à durée déterminée n'ont pas été renouvelés.

Le ministère de la Santé a mis fin à la mission de 156 agents contractuels, à la suite d'un audit sur les 4 500 personnes recrutées sur contrats annuels. À l'Aéroport international Blaise Diagne (AIBD), un plan de réduction des effectifs est en cours. Un audit a mis en lumière une inflation des recrutements entre 2022 et 2024 : les effectifs sont passés de 275 à 938 agents, créant un déséquilibre financier préoccupant.

Pétrole, gaz et industrie : les nouveaux leviers de croissance

Le mois de juin 2024 a marqué une étape importante pour le Sénégal avec le début de l'exploitation du champ pétrolier de Sangomar. Selon le ministère des Énergies et du Pétrole, la production annuelle a atteint 16,9 millions de barils, contre un objectif initial de 11,7 millions.

L'opérateur Woodside estime les recettes à 950 millions de dollars, soit environ 595,5 milliards FCFA. Dans le même temps, les réserves prouvées ont été revues à la hausse, avec une augmentation de 54,9 millions de barils.

Le 31 décembre 2024, le projet gazier Grand Tortue Ahmeyim (GTA), partagé avec la Mauritanie, a franchi une étape clé avec l'ouverture du premier puits. Mené par un consortium comprenant SMH, Petrosen, BP et Kosmos Energy, le projet vise une production annuelle de 2,5 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié.

Un recours renforcé aux marchés financiers

Sur le plan financier, l'année a été marquée par une forte présence du Sénégal sur les marchés de capitaux. Entre mars et décembre 2024, le pays a levé 800 milliards FCFA via le marché régional des titres publics de l'UEMOA. À cela s'ajoutent environ 200 milliards FCFA mobilisés au premier trimestre.

En juin 2024, le Sénégal a également procédé à l'émission d'un eurobond de 453 milliards FCFA, libellé en dollars, avec un taux d'intérêt de 7,75 % et une maturité de 7 ans. Cette opération, structurée avec JP Morgan, visait à couvrir les besoins budgétaires.

En octobre, une levée de 300 millions de dollars adossée à une couverture contre le risque de change, a été réalisée avec un coupon de 6,33 %.

Abaissement de la note souveraine par Moody's et S&P

Malgré ces performances sur les marchés, les agences de notation ont revu à la baisse la note souveraine du Sénégal. Moody's a abaissé la note à B3, avec perspective négative, invoquant des " indicateurs budgétaires nettement plus faibles " et des " failles de gouvernance " révélées par le rapport de la Cour des comptes.

Une semaine plus tard, le 28 février 2025, S&P a dégradé la note de crédit souverain de B+ à B, également avec une perspective négative. L'agence a toutefois maintenu la note à court terme à B. Dans son rapport, la Cour des comptes évalue la dette de l'administration centrale budgétaire à 18 558,91 milliards FCFA, soit 99,67 % du PIB au 31 décembre 2023.

Baisse des prix à la consommation : un signal social fort

Sur le plan social, l'une des premières mesures visibles du nouveau régime a été la baisse du prix de plusieurs produits de première nécessité dès le premier trimestre 2024.

Le prix de la baguette de pain est passé de 175 à 160 FCFA. Le sucre cristallisé est désormais vendu à 600 FCFA le kilo, contre 650 FCFA auparavant. Le riz brisé non parfumé coûte 410 FCFA, soit une baisse de 40 FCFA. Pour le riz parfumé, le sac de 50 kg a connu une réduction de 2 000 FCFA.

Le litre d'huile raffinée est passé de 1 300 à 1 200 FCFA. Sur le ciment destiné à l'habitat, la taxe parafiscale de 2 000 FCFA a été suspendue de façon ciblée. Le coût global de ces mesures est estimé à 120 milliards FCFA, un effort budgétaire significatif dans le contexte actuel.

Mouhamadou Dieng

Publié le 01/04/25 11:29

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