UE : Taxée sur ses véhicules électriques, la Chine riposte sur le cognac

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La Chine met le cognac (une eau-de-vie de vin) européen dans la ligne de mire. A compter du 5 juillet 2025, Pékin appliquera des droits antidumping sur les importations de brandy européen, une mesure ciblant en particulier le cognac français, dans un contexte de bras de fer commercial avec l'Union européenne (UE). Ce durcissement intervient en représailles à l'enquête lancée par Bruxelles sur les subventions accordées par la Chine à ses constructeurs de véhicules électriques, accusés de fausser la concurrence sur le marché européen.

La nouvelle a fait l'effet d'un coup de massue pour la filière française des spiritueux. Le ministère chinois du Commerce a confirmé l'imposition de droits pouvant atteindre jusqu'à 34,9 % sur les expéditions de brandy européen conditionné dans des récipients de moins de 200 litres. Les poids lourds du cognac, à savoir Hennessy, Rémy Cointreau et Martell, étaient initialement visés. Leurs produits, très prisés en Chine qui représente à elle seule près de 25 % des exportations mondiales de cognac, risquaient de subir un ralentissement brutal.

Selon la Fédération française des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS), les pertes mensuelles pour la filière s'élevaient déjà à 50 millions d'euros, soit 32,8 milliards FCFA, depuis l'instauration de mesures temporaires, comme le dépôt obligatoire d'une caution douanière en Chine depuis l'automne 2024.

Un compromis in extremis pour les grandes maisons

À la suite de longues négociations, Pékin a accepté de substituer ces taxes par des hausses de prix négociées avec 34 producteurs européens, dont les trois géants du cognac. En échange, ces maisons échappent aux droits antidumping, qui frapperont tout de même les producteurs n'ayant pas conclu d'accord, à hauteur de 24,9 % à 34,9 %.

Le Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC) parle d'une issue ‘'moins défavorable'', bien que le montant exact de la hausse des prix n'ait pas été rendu public. Des sources proches du dossier évoquent une fourchette de 12 à 16 % d'augmentation, selon les précédentes propositions avancées par la FEVS.

L'Union européenne dénonce une tactique de représailles

Du côté de Bruxelles, la commission européenne ‘'regrette'' la décision chinoise, qu'elle juge non fondée et disproportionnée. Un porte-parole a dénoncé ‘'une tendance inquiétante'' de Pékin à utiliser les instruments de protection commerciale pour répondre à des différends diplomatiques et économiques, sans base solide.

Le contexte géopolitique ajoute une dose supplémentaire de tension. Pékin s'est montré de plus en plus virulent ces derniers mois, en particulier depuis l'instauration de droits de douane européens pouvant aller jusqu'à 35 % sur les véhicules électriques chinois, en octobre 2024. Une plainte chinoise est désormais à l'étude à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), et un groupe d'experts devrait être constitué.

Au-delà de la question du cognac, c'est bien la relation commerciale sino-européenne qui s'envenime. Le différend illustre la fragilité des relations entre les deux blocs, alors même qu'un sommet bilatéral est prévu ce mois-ci à Pékin pour marquer le 50ème anniversaire des relations diplomatiques UE-Chine. Selon des indiscrétions relayées par Bloomberg, la Chine pourrait même annuler une journée de l'événement, en signe de protestation. Le différend autour du cognac, produit emblématique du luxe et du savoir-faire français, prend ainsi une dimension hautement stratégique. Il reflète la complexité croissante des relations commerciales dans un monde où les tensions géopolitiques, les politiques industrielles et les rivalités technologiques se superposent.

Si la solution temporaire d'une hausse de prix semble avoir sauvé les meubles pour les géants du cognac, l'avenir reste incertain pour les petits producteurs non couverts par ces accords. Et surtout, le contentieux plus large entre l'UE et la Chine reste entier. Le vin, les spiritueux, ou d'autres secteurs stratégiques pourraient être les prochains sur la liste des représailles. Dans ce contexte volatile, les professionnels du secteur appellent à une stratégie européenne concertée pour protéger les intérêts économiques tout en préservant la diplomatie commerciale. Le cognac pourrait n'être que le début d'une série de bras de fer entre Bruxelles et Pékin.

Narcisse Angan

Publié le 04/07/25 13:58

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