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L'économie industrielle ivoirienne traverse une phase d'ajustement marquée par une hausse soutenue des prix à la production. Sur les quatre premiers mois de l'année 2025, les prix de production des produits industriels ont enregistré une augmentation de 14,3% en glissement annuel, selon les chiffres officiels.
Derrière cette poussée inflationniste se cache une dynamique contrastée, où certains secteurs connaissent un véritable boom tarifaire, tandis que d'autres peinent à maintenir leurs prix à flot. Cette situation soulève une question centrale : s'agit-il d'un signal de vitalité ou d'un symptôme d'instabilité ?
Les prix de production des métaux s'envolent, tandis que ceux des hydrocarbures reculent
Premier moteur de cette hausse, les industries extractives, dont les prix de production ont progressé de 22% sur la période. Ce bond est entièrement tiré par l'explosion des prix des minerais métalliques, en hausse de 36,9%, avec une contribution significative de 7,32 points de pourcentage à l'évolution globale des prix industriels.
Cette flambée est liée à la hausse mondiale des cours des métaux stratégiques tels que le nickel, le manganèse, le cobalt, fortement utilisés dans la transition énergétique (batteries, panneaux solaires, etc.), combinée à une pression accrue sur les chaînes d'approvisionnement mondiales.
En revanche, l'industrie des hydrocarbures, habituellement moteur du secteur extractif ivoirien, affiche une baisse de 7,5% des prix, signe de la volatilité persistante des cours du pétrole sur les marchés internationaux. Sa contribution négative de -0,59 point vient tempérer l'effet de la hausse des métaux, mais reste marginale dans le mouvement d'ensemble.
Une poussée manufacturière des prix alimentée par l'agroalimentaire et la chimie
Deuxième pôle de tension, l'industrie manufacturière, qui enregistre une hausse de prix de 12,5% sur la période. Là aussi, certains sous-secteurs concentrent l'essentiel de la pression tarifaire haussière.
Dans le détail, les prix de production des produits alimentaires ont grimpé de 30,9%, avec une contribution de 6,08 points à la hausse générale. Cette progression est probablement liée à l'inflation des matières premières agricoles, aux coûts logistiques accrus et à la répercussion des hausses de prix en amont sur le consommateur.
De même, les prix de production des produits chimiques ont explosé littéralement, avec une flambée de 55,1%, ajoutant 2,54 points à l'indice global. Ce renchérissement pourrait être dû à des tensions sur les intrants importés et à la hausse des prix de l'énergie et du transport, qui pèsent lourdement sur ce segment.
À l'inverse, certains secteurs manufacturiers subissent une pression déflationniste. Il s'agit du raffinage pétrolier et la cokéfaction qui a enregistré une baisse de prix de 5,4%, en lien direct avec le recul des prix du brut.
Le secteur de l'habillement accuse, lui aussi, un recul de 7,9% des prix de production, reflet probable d'une demande atone ou d'une surcapacité de production.
Stabilité tarifaire dans les services de base
Dans un contexte d'instabilité des prix industriels, les prix de production de l'électricité, du gaz et de l'eau sont restés stables sur la période, depuis l'ajustement tarifaire de janvier 2024. Cet effet de palier réglementaire, bien qu'il limite l'inflation sectorielle, pourrait masquer des tensions financières chez les opérateurs d'énergie, si les hausses de coûts en amont ne sont pas répercutées.
Du côté des industries environnementales, les prix sont inchangés depuis 2020, signe d'un secteur encore peu dynamique en termes de tarification, mais aussi possiblement sous-financé.
Dr Ange Ponou
Publié le 02/07/25 18:01
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