La plus grande raffinerie d'Afrique propriété du richissime homme d'affaires nigérian Aliko Dangote, est au cœur d'un conflit social majeur. Après le licenciement annoncé dans le courant de la semaine de centaines de travailleurs, le syndicat Pengassan vient d'ordonner la suspension immédiate de l'approvisionnement en brut et en gaz de la raffinerie.
Selon plusieurs correspondances datées du 26 septembre, l'Association des cadres supérieurs du pétrole et du gaz naturel du Nigéria (Pengassan) a enjoint ses sections implantées dans les grandes compagnies pétrolières (TotalEnergies, Chevron, Shell Nigeria Gas, Oando, Seplat, entre autres) de fermer toutes les vannes alimentant la raffinerie de Dangote. L'ordre inclut également la suspension immédiate des opérations de chargement de navires à destination du site.
Cette décision intervient après le licenciement d'environ 800 travailleurs nigérians de la raffinerie, officiellement présenté par la direction comme un exercice de ‘'réorganisation'' destiné à améliorer la sécurité et l'efficacité opérationnelle, après des cas de sabotage rapportés. Le syndicat rejette cette version et accuse l'entreprise de désengagement abusif lié à l'adhésion des salariés à Pengassan. Dans une lettre signée par son secrétaire général, Lumumba Okugbawa, citée par Reuters, le syndicat dénonce une stratégie de ‘'désinformation et de propagande''.
Mise en service effective en 2024 et conçue pour traiter 650 000 barils par jour, la raffinerie de Dangote représente un projet colossal estimé à 20 milliards de dollars. Elle était censée réduire la dépendance du Nigeria aux importations de carburant et renforcer la sécurité énergétique du pays.
Mais depuis plusieurs mois, l'installation fait face à de multiples turbulences, en l'occurrence une suspension annoncée des ventes d'essence en naira dès le 28 septembre, faute de brut libellé en monnaie locale et en raison des distorsions de taux de change ; des inquiétudes persistantes sur la disponibilité du carburant et son impact sur le prix à la pompe ; et une contestation sociale d'ampleur qui menace de paralyser totalement son approvisionnement en matières premières.
La décision du syndicat pourrait perturber l'approvisionnement en carburant du Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique, déjà confronté à une volatilité des prix et à une pression accrue sur le naira. En bloquant l'accès au brut et au gaz, Pengassan accroît la pression sur la direction de Dangote, mais aussi sur le gouvernement fédéral, qui suit la situation de près. Dans un entretien accordé à la presse locale, le président de Pengassan, Festus Osifo, a prévenu que le syndicat exige la réintégration immédiate des travailleurs licenciés, faute de quoi la mobilisation pourrait s'étendre.
Narcisse Angan
Publié le 27/09/25 18:21