COURS | GRAPHIQUES | ACTUS | FORUM |
Le ministère gabonais des comptes publics a indiqué ce 13 janvier dans un communiqué que la Banque mondiale avait suspendu ses décaissements en faveur du pays. L'institution sanctionne ainsi Libreville suite à son insolvabilité sur les prêts antérieurs, notamment un volume d'impayés estimé à 17 milliards FCFA (environ 26,6 millions USD) au 10 janvier 2025.
Le gouvernement explique que cette "situation ponctuelle" est due à 3 facteurs : "l'insuffisante mobilisation sur le marché international des ressources prévues dans la loi de finances ; la prise en charge volontariste des mesures sociales additionnelles fortes, particulièrement attendues de longues dates par les populations ; l'affectation circonstancielle de ressources importantes à des opérations stratégiques pour le pays". Le communiqué précise que lesdits arriérés seront apurés "dans les meilleurs délais" sans fixer une échéance précise.
Péril sur les projets en cours
C'est la deuxième fois en l'espace de 6 mois que le Gabon se trouve en incapacité d'honorer ses échéances vis-à-vis de la Banque mondiale, traduisant des soucis de trésorerie en interne. En juillet 2024, le pays avait manqué le paiement de 8,5 milliards FCFA (environ 17 millions de dollars) évoquant des "raisons techniques" et un “endettement considérable” hérité du précédent régime, qui affectait les finances publiques. Cette suspension avait ensuite été levée après que le pays se soit acquitté de sa dette.
Voir aussi : La suspension des décaissements de la Banque mondiale met le Gabon dos au mur
Cette nouvelle sanction de l'institution de Bretton Woods devrait freiner l'avancée de nombreux projets qu'elle finance actuellement dans le pays. On peut notamment citer le projet Gabon Digital qui vise à digitaliser l'administration publique gabonaise et pour lequel la BIRD devait décaisser une enveloppe de 56,2 millions d'euros. Il y a également le projet d'harmonisation et d'amélioration des statistiques en Afrique de l'Ouest et du Centre (Hiscawa) financé à hauteur de 83,1 millions d'euros par le même guichet.
Voir aussi : Moody's abaisse la note souveraine du Gabon à Caa2 anticipant une forte hausse de la dette
Le défi de la planification
Les motifs évoqués par Libreville traduisent à suffisance les soucis de trésorerie exacerbés par un défaut de planification et d'anticipation de la part des autorités de transition. Certes, l'exécutif militaire qui a pris le contrôle du pays après le coup d'État d'août 2023 a hérité d'une situation budgétaire peu reluisante, marquée notamment par une sous-déclaration de certaines dettes et dépenses. Malgré le fardeau de la dette et l'amoindrissement des soutiens financiers internationaux, le gouvernement de transition a quand même engagé un certain nombre de dépenses sociales et d'investissements afin de répondre aux attentes populaires. À titre d'exemple, le budget 2024 prévoyait une augmentation de 12% de la masse salariale du secteur public, de nouveaux transferts et subventions, et une augmentation de 67% des investissements publics. "Des besoins de financements publics plus importants exacerbent les pressions sur les liquidités dans un contexte d'options de financement relativement limitées, ce qui entraînera un déficit de financement", anticipait déjà Moody's.
Face aux contraintes de liquidités qui se dessinaient, l'agence américaine de notation estimait que le Gabon n'avait pas d'autres choix que de se recentrer sur le marché domestique de la dette. Mais là encore Libreville éprouve de nombreuses difficultés à mobiliser des financements. En novembre dernier, le gouvernement a sollicité un allègement de ses taux de pondération auprès de la COBAC pour la période de novembre 2024 à décembre 2025, faute de quoi l'exécution budgétaire serait négativement impactée "au regard de la contribution attendue des emprunts à lever sur notre marché financier".
Cédrick JIONGO
La Rédaction
Publié le 14/01/25 12:44
Vous avez aimé cet article ? Partagez-le avec vos amis en cliquant sur les boutons ci-dessous :