La suspension des décaissements de la Banque mondiale met le Gabon dos au mur

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Dans une correspondance signée le 1er juillet dernier, le vice-président du groupe de la Banque mondiale a informé les autorités gabonaises de la suspension des décaissements de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), guichet non concessionnel de l'institution de Washington, en faveur du pays. La suspension qui a pris effet le même jour concerne “le droit du Gabon d'effectuer des retraits au titre des prêts de la BIRD, des avances du Mécanisme de préparation des projets, des dons du Fonds de développement institutionnel et de certains prêts et dons financés par les fonds fiduciaires administrés par la BIRD”, peut-on lire. 

La Banque mondiale reproche au pays son insolvabilité sur les prêts antérieurs notamment un volume d'impayés estimé à 17 millions de dollars (8,5 milliards FCFA) au 30 juin 2024. La réaction des autorités gabonaises ne s'est pas fait attendre. Dans un communiqué rendu public deux jours plus tard, le Ministère des comptes publics évoque des “raisons techniques” pour justifier ces retards, mais aussi un “endettement considérable” hérité du précédent régime qui affecte les finances publiques. Toutefois, rassure-t-il, les paiements ont été effectués et le pays est désormais à jour de ses obligations vis-à-vis de l'institution financière multilatérale et des autres créanciers. 

Péril sur des projets de développement mais pas que…

“L'ensemble des échéances de dette au profit des autres créanciers multilatéraux est en cours de paiement et devrait être totalement apuré d'ici quelques jours”, souligne le ministère qui précise que 136 milliards FCFA de dettes ont été réglés sur le seul mois de juin 2024. 

Reste donc à savoir si cette réactivité du Gabon amènera la Banque mondiale à réactiver ses décaissements car la suspension annoncée hypothèquerait l'avancée de nombreux projets en cours. On peut notamment citer le projet Gabon Digital qui vise à digitaliser l'administration publique gabonaise et pour lequel la BIRD devait décaisser une enveloppe de 56,2 millions d'euros. Il y'a également le projet d'harmonisation et d'amélioration des statistiques en Afrique de l'Ouest et du Centre (Hiscawa) financé à hauteur de 83,1 millions d'euros par le même guichet. 

Voir aussi : Le Gabon négocie un prêt de 140 millions d'euros auprès de la BIRD

Bien plus, cette suspension jetterait davantage l'anathème sur la crédibilité de la signature du Gabon, confirmant les craintes de Moody's qui a récemment dégradé la note du pays évoquant “des risques de liquidités accrus”. Certes, l'exécutif de Transition a hérité d'une gestion approximative du précédent régime, mais en lieu et place d'une politique budgétaire stricte, il s'est engagé dans des dépenses sociales et d'investissement afin de répondre immédiatement aux attentes des populations. 

À titre d'exemple, le budget 2024 prévoit une augmentation de 12 % de la masse salariale du secteur public, de nouveaux transferts et subventions, une baisse des coûts du carburant et une augmentation de 67 % des investissements publics. "Des besoins de financement publics plus importants exacerberont les pressions sur les liquidités dans un contexte d'options de financement relativement limitées, ce qui entraînera un déficit de financement", prévient Moody's. 

Voir aussi : Moody's abaisse la note souveraine du Gabon à Caa2 anticipant une forte hausse de la dette

Le risque est réel et place désormais les autorités dans une situation délicate car il faut régler la dette et assurer les nouvelles dépenses budgétaires alors même que les options de financements sont de plus en plus limitées. Outre les sanctions d'institutions multilatérales, le marché régional de la dette est peu profond et ne permet pas au pays de lever les fonds dont il a besoin. En début d'année, Libreville avait même inscrit dans son budget 2024, l'hypothèse d'une émission obligataire internationale ; une hypothèse rapidement écartée au mois d'avril par le ministre du Budget.

Cédrick JIONGO

La Rédaction

Publié le 04/07/24 13:17

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