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Par Moez HADIDANE
Tera Finances-Tera Training
L'économie tunisienne est encore et largement considérée comme une économie d'endettement (par opposition à une économie de marché). Le financement de l'économie est assuré essentiellement par le système bancaire.
L'encours des crédits à l'économie accordé par le système financier résident à évolué en 2022 de 8,3% totalisant un encours de 114,68 milliards de dinars, soit un accroissement de 8,77 milliards de dinars.
Sur cet encours, 104,46 milliards de dinars sont détenus par les banques dont 9,4 milliards de dinars d'encours sur avance de la Banque centrale et 95,1 milliards de dinars sur ressources des banques, soit une augmentation de 4,9 milliards de dinars (+5,4%). La part du Leasing a augmenté entre 2021 et 2022 de 55,7 millions de dinars totalisant un encours de 4 milliards de dinars.
En dehors du système financier (i.e. banques et établissements de crédits), le financement de l'économie est assuré à travers le marché financier, la microfinance et le capital investissement. À ce titre, l'encours des crédits des IMF (Institutions de microfinances) est passé de 1,75 milliard de dinars à 1,9 milliard de dinars, soit un additionnel de 159,7 millions de dinars (+9,1%). Cette augmentation fait suite à la hausse des décaissements de nouveaux microcrédits en 2022 de 1,74 milliard de dinars, contre 1,67 milliard de dinars en 2021.
Sur le marché financier, les financements des entreprises ont pris la forme de :
- Levées de fonds propres par les sociétés admises à la cote pour un montant de 61,9 Millions de dinars ;
- Levées de fonds propres (réservée) pour 240 millions de dinars par une banque non cotée ;
- Des emprunts obligataires avec appel public à l'épargne d'une valeur de 480 millions de dinars et ;
- Des emprunts obligataires privés pour un montant de 365 millions de dinars.
Ces financement levés sur le marché financier totalisent 1,14 milliard de dinars dont seulement 542 millions de dinars par appel public à l'épargne.
Enfin le financement assuré par le capital risque (données 2021) a porté sur des investissements de 335 millions de dinars (154 opérations d'investissements) pour des levées de fonds, la même année, de 552,4 millions de dinars.
Financement des entreprises et des professionnels
À fin 2022, l'encours des crédits aux entreprises et aux professionnels a atteint 83,8 milliards de dinars, en progression de plus 8,5% (+6,2 milliards de dinars) par rapport à fin 2021. Même si les opportunités d'investissements et de nouveaux projets, dans ce contexte d'instabilité et d'attentisme, se font de plus en plus rares, les banques continuent à financer les entreprises et les professionnels, leurs cycles d'exploitation, leurs investissements d'extension ou de remplacement, leurs initiatives d'efficacité et de transition énergétiques, etc...
Ceci dit, des efforts restent à consentir davantage, par tout l'écosystème et tous les intervenants avec un cadre institutionnel mieux adapté pour mieux accompagner et répondre aux besoins de financement des TPME.
Financement des particuliers
L'encours des crédits aux particulier accordés (uniquement) par les banques a totalisé 27,8 milliards de dinars à fin 2022 enregistrant un additionnel de 950 millions dinars par rapport à 2021, soit une progression de 3,5%.
La part des crédits logement est de 45% (83% si on tient compte des crédits aménagements logements). Le reste étant défalqué entre des crédits autos et autres crédits à la consommation. Depuis plus de trente ans, les crédits à l'habitat ont largement contribué pour permettre aux Tunisiens d'accéder à la propriété de logement.
Financement de l'État : des priorités s'imposent
Le financement du déficit budgétaire n'est pas une exception des banques tunisiennes. Les bons de Trésor représentent 9,6% du total actif des banques en Tunisie en 2022 contre plus de 12,8% pour les banques marocaines.
Les banques tunisiennes détiennent 61% de l'encours circulant des bons de trésor contre 65,5% en 2021. Elles détiennent également 45% de l'encours des emprunts nationaux au 31 décembre 2022 contre 24,8% à fin 2021. Par ailleurs, les bons de trésor représentent 59,1% des fonds propres (provisions comprises) des banques et 102,6% de leur fonds propres hors provisions.
Le taux de rendement des valeurs de trésor se réfère aux prix et conditions de marché selon une courbe de taux contrôlée par 4 intervenants : la BCT, le CMF, le ministère des Finances et Tunisie Clearing.
Il est vrai qu'un accroissement des bons du Trésor dans le portefeuille des banques, inhérent à un déséquilibre budgétaire structurel et persistant, pourrait produire un effet d'éviction dans le sens où des ressources qui auraient financé des projets seraient orientées vers le financement du déficit budgétaire. Mais c'est une question de priorité et de " survie ".
Le gap entre recettes et dépenses fait que l'État emprunte pour continuer à payer des salaires, assurer les transferts sociaux et continuer à importer les produits de base pour subvenir à des besoins de première nécessité.
Par ailleurs, les banques emploient près de 15 mille collaborateurs dont plus de 10 mille de diplômés de l'enseignement supérieur. La masse salariale annuelle (en brut) des banques cotées a atteint en 2022 la somme de 1.788 millions de dinars, soit l'équivalent de la masse salariale de la fonction publique d'un mois.
En plus des recettes d'impôts revenant à l'État sous forme d'IRPP, les banques cotées et non cotées ont décaissé en 2022 au profit de l'État au titre de l'exercice 22021, une charge de l'impôt sur les sociétés de 570 millions de dinars, des contributions conjoncturelles de 36,2 millions de dinars et des dons accordés à l'État pour 132,6 millions de dinars.
En 2023, les banques devront s'quitter d'une charge d'IS de 757 millions de dinars sur un total de 5 Mrds de dinars de recettes en IS (Impôts sur les sociétés pétrolières et non pétrolières) prévue dans le budget de l'État pour l'année 2023.
Les prêts syndiqués en devises
Les dépenses du budget de l'État au-dessus de ses moyens et les difficultés d'accès au financement extérieur, ont contraint les gouvernements depuis 2017 à solliciter des ressources en devises sur le marché local. Il faut dire que l'État n'a pas manqué à aucune échéance de crédits en devises ni de bons de Trésor ou d'emprunt national. Le fait qu'il y ait un remboursement suivi d'une nouvelle émission ou même d'une adjudication d'échange, ne veut pas dire un défaut.
D'ailleurs le fait que la loi des finances prévoit pour l'endettement intérieur un remboursement en principal de plus de 9 milliards de dinars et une nouvelle mobilisation pour quasiment le même montant, ceci montre que les échéances remboursées seront quasiment remplacées par de nouvelles émissions.
Pour les prêts syndiqués en devises, la valeur en dinars à fin mai 2023 est de 2,4 milliards contre 3,4 milliards de dinars fin 2022 et 4,1 milliards fin 2021. Cela représente 18% des dépôts en devises des banques. Que les banques soient exposées au risque d'utiliser des dépôts en devises à vue et à terme dans des crédits à l'État sur 4 ans, ceci est vrai et cela constitue l'activité de transformation de la banque.
Toutefois, les banques mesurent ce risque et prennent la décision en conséquence. La baisse de l'encours des crédits syndiqués en devises, depuis fin 2021 (-40%), malgré le besoin de mobiliser des ressources extérieures, montre bien que le risque est atténué.
L'essence même du métier de la banque c'est son activité de transformation et d'intermédiation : soit collecter des dépôts à vue, d'épargne et à terme pour accorder des crédits et investir dans des titres.
L'activité d'une banque n'est pas illimitée. Elle dépend d'exigences contrôlées par la Banque Centrale mais aussi des agences de rating internationales. Le potentiel d'une banque à accorder des nouveaux crédits est subordonné à la taille des fonds propres (ratio de solvabilité), à la taille de ses dépôts (ratio Loan To Deposit), à la qualité de ses actifs et le niveau de ses liquidités (LCR).
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