C'est un nouveau rendez-vous au sommet, dans une région qui en a déjà connu beaucoup sans véritable tournant. Le 18 juillet 2025, les chefs d'État de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) et de la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC) se réuniront à Yaoundé, capitale du Cameroun, dans l'optique de raviver le projet de fusion de leurs deux organisations. Un objectif affiché depuis plus de quinze ans, mais dont les contours restent encore flous, et la concrétisation incertaine.
Cette rencontre survient un an après la sixième réunion ministérielle du Comité de pilotage de la rationalisation des communautés économiques régionales d'Afrique centrale (Copil CER-AC), qui s'était tenue en juin 2024, à Yaoundé. Lors de ces discussions, les ministres des onze pays concernés avaient entériné plusieurs principes directeurs – progressivité, viabilité budgétaire, solidarité communautaire – censés orienter la transition vers une architecture unifiée. Toutefois, les étapes les plus décisives du processus restent à définir, à financer et, surtout, à mettre en œuvre.
Des avancées timides, un horizon incertain
En quinze ans, la rationalisation du paysage institutionnel sous-régional a généré une succession de rapports, d'accords-cadres et de déclarations d'intention. Mais dans les faits, les mécanismes de convergence peinent à prendre corps. Certes, le Copil a récemment adopté des projets de textes sur la création d'une Haute autorité monétaire et d'une Haute autorité des marchés financiers, qui pourraient constituer les premiers jalons d'une future union économique et financière. Mais ces annonces, pour l'heure, restent largement symboliques, faute de traduction concrète dans les dispositifs institutionnels.
Même dans des domaines à plus faible enjeu politique, comme la formation professionnelle, les tentatives d'harmonisation montrent leurs limites. Quatre établissements ont été sélectionnés pour porter l'intégration en matière d'éducation, mais leur rôle exact dans la future organisation commune n'a pas encore été précisé. Par ailleurs, le projet de convention sur la création d'une Haute cour de justice régionale reste en suspens, en raison de désaccords persistants sur les modalités de désignation des juges ou encore la nature de leurs compétences.
La dynamique institutionnelle est par ailleurs fragilisée par un contexte politique tendu. Le retrait du Rwanda de la CEEAC, officialisé lors du sommet de Malabo en juin 2025, en est l'illustration la plus marquante. Kigali invoque une entorse aux règles de rotation de la présidence tournante, qui lui aurait été indûment refusée. Mais en arrière-plan, c'est surtout le différend croissant avec la République démocratique du Congo – également membre de la CEEAC – qui semble avoir pesé lourd dans cette décision. Ce départ d'un acteur majeur de la sous-région jette une ombre sur les perspectives d'unité.
Certes, le processus de fusion peut théoriquement se poursuivre sans le Rwanda, mais cette défection envoie un signal préoccupant. Elle souligne les limites d'un projet d'intégration qui bute régulièrement sur les rivalités bilatérales, les logiques de souveraineté et le manque de mécanismes d'arbitrage véritablement fonctionnels.
Une patience qui s'effrite chez les partenaires extérieurs
Ce climat de stagnation commence à irriter les partenaires techniques et financiers de la région. Présent à la réunion de juin 2024, Adama Ekberg Coulibaly, haut responsable de la Commission économique pour l'Afrique (CEA), a exprimé publiquement son exaspération. ''Il faut sortir de la phase des études et des diagnostics'', a-t-il plaidé, appelant à des décisions opérationnelles. Même tonalité chez certains responsables régionaux, qui s'inquiètent de la multiplication des démarches parallèles entre organisations censées converger.
La question du rôle de la Communauté économique des pays des Grands Lacs (CEPGL), qui devait initialement être intégrée au processus de fusion, n'a d'ailleurs pas été abordée lors des dernières discussions. Un oubli symptomatique du peu d'empressement à traiter les sujets sensibles ou complexes.
Face à ces nombreux blocages, le sommet du 18 juillet apparaît à la fois comme une opportunité de relance et comme un test de crédibilité. Les chefs d'État devraient y valider plusieurs textes préparés par le Copil CER-AC et réaffirmer leur engagement pour une union plus structurée. Mais ces déclarations, aussi solennelles soient-elles, risquent de peser peu si elles ne s'accompagnent pas d'un véritable plan d'action et d'un engagement concret des États.
Perton Biyiha
La Rédaction
Publié le 11/06/25 11:09
306,17 -0,23%
13/06/2025 Côte d’Ivoire : Plus de 27 millions de tentatives de cyberattaque détectées en 2024
13/06/2025 Cameroun: Le cimentier Suisse Lafarge renforce ses capacités de production et vise le Tchad
13/06/2025 Congo: L'italien Eni se dote d'une nouvelle base logistique pour renforcer ses activités gazières
13/06/2025 Sénégal : Les raisons de la suspension du contrat de fourniture d’électricité de la SENELEC au Congo
13/06/2025 ‘’Soyons des créateurs d’avenir’’ : La BOAD s’affirme comme catalyseur du développement dans l’UEMOA
13/06/2025 Wave s’allie à CBC Bank pour proposer une gamme de services de paiement au Cameroun
12/06/2025 Ghana : Une usine de production de véhicule électrique en projet
Pour poster un commentaire, merci de vous identifier.