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La Côte d'Ivoire a de grandes ambitions pour sa filière hévéicole dont les performances sont particulièrement remarquables et ont de quoi faire pâlir le cacao, sa spéculation phare. Ces vingt dernières années, la production a décuplé passant de 168 000 en 2005 à 1,6 million de tonnes fin 2023. Un chiffre qui a hissé le pays au statut de troisième producteur mondial de caoutchouc naturel, avec 12% de l'offre mondiale, et premier africain avec … 82% de la récolte du continent. Mais plus, le pays qui opère une première transformation de la quasi-totalité de sa production, veut aller plus loin.
Au cours de ses ‘'Journées du caoutchouc naturel'' tenues du 24 au 26 octobre 2024, les autorités ont repris en échos le discours très ambitieux de Charles-Emmanuel Yacé, le président du conseil d'administration de l'APROMAC, l'organisation professionnelle regroupant à la fois producteurs et industriels de la filière. L'idée est désormais de franchir de nouveaux paliers pour une filière qui se veut un modèle de l'agriculture pérenne en Côte d'Ivoire.
" Un avenir prometteur "
" L'avenir est prometteur " pour une filière qui se prépare à relever tous les défis du secteur, a assuré Charles-Emmanuel Yacé. En effet, bien avant la directive de l'Union européenne, l'APROMAC avait déjà initié le processus d'identification et de géolocalisation des 205 000 hectares de plantations actuellement exploités. Une initiative qui assure la traçabilité et la lutte contre la déforestation, anticipant les potentiels freins au développement de la spéculation. Mieux, pour mettre en avant ses pratiques durables, l'organisation travaille à la labellisation de l'hévéa made in Côte d'Ivoire. Un sésame qui devrait contribuer à mieux valoriser la production sur le marché international.
" Cette labellisation vise à garantir une qualité irréprochable de ce caoutchouc, en mettant en avant les pratiques agricoles durables et responsables de nos producteurs et les technologies innovantes de transformation " et " elle permettra non seulement de renforcer notre compétitivité, mais aussi de répondre aux exigences croissantes des consommateurs et des industriels en matière de traçabilité et de durabilité ", a-t-il relevé.
Mais le grand défi est de passer à la deuxième, puis à la troisième transformation après avoir gagné la bataille de la première transformation qui consiste juste à traiter le caoutchouc naturel pour les deux autres étapes.
Avec une capacité de traitement installée de 1,8 million de tonnes portée par la quarantaine d'usines qu'enregistre le pays, l'enjeu est désormais de passer à une deuxième, puis une troisième transformation qui donnera à terme de produire des pneus localement, ce qui sera alors une belle consécration pour la filière agricole introduite par le colon dans le pays il y a 7 décennies. " Des biens finis et semi-finis en matière plastique, des semelles de chaussures, des gants, des pneus, … ", a égrené Charles-Emmanuel Yacé, convaincu d'un " potentiel immense " pour l'économie ivoirienne. Une transformation industrielle qui reste une priorité absolue, a affiché le Premier ministre ivoirien Beugré Mambé, patron de ces journées. Ce, d'autant plus que la Côte d'Ivoire ne perçoit pour l'heure que " 1% des 350 milliards de dollars de valeurs créées dans l'hévéa ", a-t-il indiqué.
Le potentiel insoupçonné de la filière s'étend jusqu'à la production de biocarburant et de biogaz. Des activités de recherche ont démontré que les graines de l'hévéa, autrefois déchets agricoles abandonnés dans la nature, permettent de produire du carburant ; et les premières expérimentations qui ont démarré en Côte d'Ivoire.
" Passer au rang de deuxième producteur mondial "
Pour le chef du gouvernement, outre la création de valeur ajoutée par la transformation, il faut aller plus loin, rappelant non sans fierté que " l'agriculture est la chance inouïe de la Côte d'Ivoire ". Il a cet effet exhorté les acteurs de la filière à relever le défi de faire du pays le deuxième producteur mondial. Un rang aujourd'hui occupé par l'Indonésie dont la production était évaluée à 3,13 millions de tonnes en 2022.
Un tel pari qui revient donc à doubler la production au cours des prochaines années, mais reste accessible au regard de la remarquable croissance observée sur la dernière décennie. Dans ces conditions, faut-il pour autant craindre pour le couvert forestier ivoirien ?
Pour les acteurs de la filière ivoirienne, l'hévéa est un arbre forestier, et donc facteur de reforestation dans les zones où la culture est pratiquée. Et pour attester de ce point de vue largement admis au sein des pays producteurs, la culture de l'hévéa va s'étendre à des nouveaux espaces, dans les zones de savanes arborées de l'ouest (dans la zone de Touba) et de l'est ivoirien propices à la spéculation selon Charles-Emmanuel Yacé. Une expansion dans des zones non forestière présentée comme " un rempart contre l'avancée du désert ".
Pépinière
L'un des grands chantiers structurants de l'APROMAC en vue de consolider la dynamique de la filière est le projet de la création d'une Académie des métiers de l'hévéa. Un institut " à portée internationale ", et " construit sur une superficie de 236 ha à Taabo (centre ivoirien, ndlr) ", a présenté Charles-Emmanuel Yacé qui veut en faire une " pépinière " pour la formation depuis la plantation " jusqu'à la seconde voire la troisième transformation ".
Jean Mermoz Konandi
Publié le 29/10/24 10:22
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