Du coltan au spodumène, les récentes découvertes minières confortent l'ambition d'Abidjan de diversifier sa carte géologique. Une stratégie encore balbutiante, mais déjà soutenue par des acteurs publics et privés, dans un contexte mondial de course aux métaux critiques.
Longtemps absente des grandes conversations sur les minerais stratégiques, la Côte d'Ivoire s'invite désormais dans la course aux métaux critiques. Le 22 mai 2024, le gouvernement ivoirien a officialisé sa montée au capital d'Ivoire Coltan, la première société d'exploitation de colombo-tantalite (coltan) du pays. Détenue à 51% par la Sodemi, bras minier de l'État, à 10% par l'État lui-même et à 39% par un partenaire chinois, cette entité marque l'entrée officielle du pays dans le cercle des producteurs potentiels de terres rares et métaux stratégiques.
Coltan, lithium : les jalons d'une nouvelle carte minière
Le coltan, essentiel pour les condensateurs des téléphones portables et des équipements électroniques, fait ainsi son apparition dans l'offre minière ivoirienne. Une première unité d'exploitation devrait voir le jour à l'horizon 2025 dans l'ouest du pays, à Sipilou, sur un site aux réserves estimées à 160 millions de tonnes. Le projet, mené par la société NOCI (Nickel de l'Ouest Côte d'Ivoire), a reçu le feu vert du gouvernement en juin 2023 pour une exploitation prévue sur vingt ans.
Autre signal fort : la multiplication des permis de recherche sur les terres rares, le lithium ou le coltan. En septembre 2023, un permis a été accordé à la Sodemi dans les départements de Béoumi, Botro et Sakassou, situés dans le centre du pays. Une stratégie active de prospection menée par l'État, qui entend positionner la Côte d'Ivoire dans les filières critiques de demain.
Une première découverte de lithium
Le 22 mai 2025, la compagnie australienne Atlantic Lithium, par le biais de sa filiale Khaleesi Resources SARL, annonçait la découverte d'une pegmatite à spodumène, minerai porteur de lithium, sur les permis contigus de Rubino et Agboville, dans le Sud-Est du pays. Les échantillons prélevés révèlent des teneurs en lithium atteignant 1,25%, un niveau significatif pour une phase d'exploration.
Les anomalies géologiques s'étendent sur environ 2,5 km de long et 2 km de large, suggérant un potentiel prospectif important. Pour Atlantic Lithium, cette avancée s'inscrit dans une stratégie plus large : l'entreprise développe déjà le projet Ewoyaa au Ghana, considéré comme l'un des gisements les plus prometteurs d'Afrique de l'Ouest.
Atex et GEM : une dynamique encore en germination
Au nord, à 40 km de Boundiali, le projet Atex, porté par Firering Strategic Minerals (Royaume-Uni) et Ricca Resources (Australie), entre dans sa phase d'évaluation finale. Premier véritable projet de lithium-tantale du pays, Atex est l'un des marqueurs de cette dynamique émergente. En parallèle, la société GEM (Global Energy & Minerals) a obtenu en octobre 2024 un permis de recherche couvrant Sakassou, Tiébissou et Bouaké, dans le centre.
Tous ces projets témoignent d'un frémissement nouveau. La Côte d'Ivoire affiche une volonté claire : intégrer ces filières stratégiques dans son portefeuille minier national et se positionner sur les marchés du lithium et des terres rares.
Une stratégie embryonnaire, mais structurante
Si le chemin reste encore long avant de rejoindre les grands producteurs africains de minerais critiques, la Côte d'Ivoire pose désormais les premiers jalons d'une stratégie minière étendue aux matériaux du XXIe siècle. Dans un monde dominé par la transition énergétique, l'électrification des mobilités et la souveraineté industrielle, ces ressources deviennent capitales.
La présence d'acteurs expérimentés, britanniques, australiens ou chinois, combinée au retour stratégique de la Sodemi sur des permis d'exploration-clé, ouvre une nouvelle séquence. Celle d'un repositionnement discret, mais structuré, de la Côte d'Ivoire dans l'économie mondiale des ressources stratégiques.
La Rédaction
Publié le 16/10/25 12:28