Financement climatique : Comment les pays du Sud remboursent plus qu’ils ne reçoivent

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Un paradoxe inquiétant s'impose dans l'économie climatique mondiale. Alors que les pays du Sud sont les plus exposés à l'élévation des températures, à l'érosion des sols, aux cyclones ou aux sécheresses prolongées, ils reçoivent un financement climatique massivement structuré… sous forme de prêts. Résultat, loin d'alléger le fardeau, le financement censé soutenir leur adaptation au changement climatique nourrit un cycle d'endettement qui profite avant tout aux pays riches.

Une nouvelle étude d'Oxfam et CARE révèle des chiffres glaçants sur cette réalité. Pour chaque 5 dollars de financement climatique reçus, les pays en développement en remboursent 7. Les créanciers engrangent des bénéfices jusque dans la crise climatique qu'ils prétendent combattre.

Une architecture financière climatiquement injuste

Les pays développés déclarent avoir mobilisé 116 milliards de dollars de financements climatiques en 2022. La réalité est bien différente : entre 28 et 35 milliards seulement correspondent à un soutien véritable, selon Oxfam, soit moins d'un tiers du montant annoncé.

La raison principale de cette distorsion réside dans la structure des financements : 65% des ressources climatiques sont des prêts, souvent non concessionnels.

Ce mécanisme alimente un cercle vicieux : la dette globale des pays en développement atteint désormais 3 300 milliards de dollars, affaiblissant leur capacité à investir dans la résilience, l'inclusion sociale ou la transition énergétique. Pire encore, ils deviennent malgré eux une source de revenus pour leurs bailleurs. En 2022, 62 milliards de prêts climatiques devraient générer 88 milliards de remboursements, soit 42% de profit pour les créanciers, parmi lesquels figurent notamment la France, le Japon et l'Italie.

Une distribution profondément inéquitable

L'analyse révèle aussi une géographie du financement climatique marquée par l'injustice. Les pays les moins avancés n'ont reçu que 19,5% des financements climatiques publics en 2021-2022.

Les petits États insulaires, pourtant en première ligne face à l'élévation du niveau des mers, n'ont obtenu que 2,9%, dont la moitié sous forme de prêts.

À peine 3% des financements ont été dédiés à l'égalité de genre, alors même que les femmes sont les plus touchées par les crises environnementales.

Cette sous-allocation intervient alors que les catastrophes climatiques s'intensifient : sécheresses extrêmes dans la Corne de l'Afrique, 13 millions de personnes affectées aux Philippines, 600 000 déplacées par les inondations au Brésil en 2024. Les pays les plus vulnérables doivent réagir avec des ressources en constante diminution.

L'étude souligne un autre phénomène alarmant : les coupes drastiques dans l'aide au développement. Selon l'OCDE, l'aide internationale a reculé de 9% en 2024, et pourrait chuter de 9 à 17% supplémentaires en 2025.

Ces arbitrages budgétaires, opérés principalement dans les pays du Nord, réduisent l'espace fiscal indispensable aux pays du Sud pour renforcer leurs systèmes agricoles, moderniser leurs infrastructures hydrauliques, ou développer des systèmes d'alerte précoce.

‘'Les pays riches transforment la crise climatique en opportunité commerciale'', déplore Nafkote Dabi d'Oxfam, dénonçant une mécanique qui perpétue des inégalités historiques.

Bien que les pays en développement soulignent régulièrement que l'adaptation, c'est-à-dire la capacité à vivre avec les effets du changement climatique, est une priorité absolue, elle ne représente que 33% du financement climatique mondial.

Les investisseurs privilégient l'atténuation, perçue comme plus rentable, au détriment d'actions essentielles comme la gestion de l'eau, la protection des littoraux ou le renforcement des infrastructures sociales.

La Rédaction

Publié le 21/11/25 14:39

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