Avec des pertes estimées à plus de 40 millions de dollars et 86% des organisations présentant une mauvaise hygiène réseau, le VINKA Cyber Index 2025 alerte : la cybersécurité est l'enjeu de compétitivité le plus critique en Afrique francophone.
Dans le monde hyper-connecté d'aujourd'hui, la cybersécurité n'est plus l'affaire exclusive des départements informatiques. En Afrique francophone, elle est devenue un pilier fondamental de la survie économique, de la souveraineté nationale et de la compétitivité régionale, tout autant que la finance ou l'énergie. C'est l'enseignement clé du VINKA Cyber Index 2025, le baromètre panafricain qui mesure l'état de la cybermenace pesant sur les entreprises et institutions.
"En Afrique francophone, la cybersécurité ne doit plus être cantonnée à la technologie. C'est un sujet de survie économique", affirme Patricia Pedhom Nono, associée de VINKA en charge du Conseil. À mesure que nos économies se numérisent – avec l'essor du mobile money, de l'e-gouvernement, du commerce électronique et des interconnexions financières – nos vulnérabilités s'exposent. Protéger cette digitalisation est donc une priorité absolue.
L'illusion d'une sécurité suffisante : un risque sous-estimé
Le VINKA Cyber Index 2025 a analysé plus de 250 organisations dans neuf pays d'Afrique de l'Ouest et centrale. Le constat ? Un niveau de maturité global qualifié d' "intermédiaire", avec un score moyen oscillant entre 770 et 775 sur notre échelle. C'est une progression, certes, mais nous sommes encore loin d'une cybersécurité pleinement maîtrisée.
Ce diagnostic, loin d'être anodin, peut être trompeur. "Un niveau de maturité intermédiaire est parfois plus dangereux qu'un niveau faible, car il crée une illusion de contrôle", prévient Patricia Pedhom Nono. Notre rapport est clair : les organisations qui ne dépassent pas le seuil "avancé" sont jusqu'à cinq fois plus exposées au risque de cyberattaque que celles qui ont intégré la cybersécurité au cœur de leur stratégie.
Sur le terrain, les pratiques révèlent des lacunes préoccupantes. Alors que pare-feu et antivirus sont généralement en place, la cybersécurité est souvent réactive, isolée et rarement portée au plus haut niveau de décision. Une telle fragilité affaiblit l'ensemble de l'écosystème : une PME vulnérable peut, sans le savoir, devenir la porte d'entrée d'une attaque majeure ciblant un grand groupe, une banque ou une infrastructure critique. Une "chaîne de valeur est aussi forte que son maillon le plus faible".
Le rapport met en lumière l'ampleur de ces vulnérabilités structurelles :
- 86 % des organisations présentent une mauvaise "hygiène réseau" (c'est-à-dire une gestion laxiste des accès et des configurations).
- 87 % affichent des vulnérabilités technologiques, souvent dues à des systèmes obsolètes ou mal mis à jour.
- 27 % sont exposées à des comportements utilisateurs à risque, par manque de sensibilisation ou de formation.
Ces chiffres révèlent un déficit de gouvernance et de culture cyber, bien plus que de simples problèmes techniques.
La porte d'entrée des cyberattaques : l'humain
Contrairement à une idée répandue, les cyberattaques les plus dévastatrices ne requièrent pas toujours des outils ultra-sophistiqués. "Dans plusieurs organisations que nous accompagnons, l'attaque ne débute pas par un logiciel malveillant complexe, mais par un simple e-mail ouvert trop vite", observe Patricia Pedhom Nono.
Le phishing (hameçonnage) et l'ingénierie sociale (manipulation psychologique) restent les principaux vecteurs d'intrusion, facilités par un manque de sensibilisation des employés. Quant aux ransomwares (logiciels de rançon), ils représentent aujourd'hui la menace la plus critique. Ils ciblent spécifiquement les secteurs où l'interruption d'activité est intolérable – banques, administrations, santé, télécommunications – afin de maximiser les chances de paiement.
Les menaces internes, qu'elles soient volontaires ou accidentelles, complètent ce tableau déjà complexe, dans des environnements où les contrôles d'accès sont parfois trop faibles. Si les attaques DDoS (qui saturent les services pour les rendre indisponibles) sont très visibles, elles sont souvent moins dévastatrices à long terme que celles qui compromettent l'intégrité et la confidentialité des données. La cybersécurité devient ainsi un enjeu vital de continuité d'activité, au même titre que la gestion des risques financiers ou logistiques. "La vraie question pour un dirigeant n'est plus : sommes-nous protégés ? mais sommes-nous prêts à encaisser une attaque sans mettre en péril notre activité ?", insiste l'experte.
Vulnérabilités sectorielles : quand les piliers économiques vacillent
Le Cyber Index révèle de fortes disparités par secteur. Les fintechs (entreprises de technologie financière) affichent les meilleurs scores, grâce à des architectures modernes et une culture de "security by design" (la sécurité est intégrée dès la conception). Cependant, leur exposition directe aux flux financiers en temps réel en fait des cibles de choix.
Les banques, malgré des cadres de gouvernance plus formalisés, restent fragilisées par leurs "systèmes legacy" (des infrastructures logicielles et matérielles anciennes), des applications mobiles vulnérables et des menaces internes sous-estimées. La situation des télécommunications est encore plus critique : une mauvaise hygiène réseau, des failles technologiques importantes et une exposition massive aux attaques en font un risque systémique pour toute l'économie numérique.
Or, sans télécommunications sécurisées, pas de mobile money fiable, pas d'interopérabilité financière solide, ni d'e-gouvernement robuste. Le rapport souligne un risque de contagion économique encore largement sous-estimé : la compromission d'un acteur insuffisamment protégé peut rapidement se propager à l'ensemble de l'écosystème – fournisseurs, partenaires, clients, institutions financières – transformant un incident isolé en crise sectorielle, voire régionale.
Les pertes estimées dues à la cybercriminalité dépassent les 40 millions de dollars en Afrique francophone, un chiffre largement sous-évalué selon nos experts. "Le vrai coût d'une cyberattaque ne se mesure pas seulement en dollars, mais en confiance perdue", rappelle Patricia Pedhom Nono. Au-delà des pertes financières directes, les impacts sont durables : paralysie des services publics, interruption des chaînes de valeur, atteinte à la vie privée, fuite des investisseurs, augmentation des primes d'assurance et dégradation de l'image internationale des États.
Cadres réglementaires : des progrès, mais un besoin d'action concrète
Face à l'escalade des menaces, de nombreux États africains ont, fort heureusement, adopté des lois sur la protection des données et créé des agences nationales de cybersécurité. Une avancée à saluer, mais qui, selon nous, reste insuffisante. "Le cadre réglementaire existe, mais il manque souvent de muscles opérationnels", résume l'associée de VINKA. Le manque de moyens, la pénurie de talents spécialisés, une coordination régionale encore limitée et une forte dépendance technologique étrangère freinent l'efficacité réelle de ces dispositifs. La rapidité d'évolution des menaces surpasse bien souvent celle des réponses réglementaires.
Dans ce contexte crucial, "VINKA s'engage clairement : accompagner l'Afrique vers une maturité cyber robuste et proactive", confie Patricia Pedhom Nono. Le cabinet propose un accompagnement qui va au-delà de la technique : conseil stratégique, audits approfondis, programmes de formation ciblés, promotion du dialogue public-privé, et bien sûr, la production d'un baromètre de référence comme le VINKA Cyber Index. L'objectif affiché est de bâtir une cybersécurité souveraine, pragmatique et parfaitement adaptée aux réalités africaines.
"Les prochaines années ne distingueront pas les entreprises qui seront attaquées de celles qui ne le seront pas, mais celles qui auront anticipé de celles qui auront subi", conclut Patricia Pedhom Nono. Pour les espaces UEMOA et CEMAC, la cybersécurité ne sera plus une contrainte, mais un levier décisif de compétitivité, une condition sine qua non à l'intégration régionale, à la finance digitale et, surtout, à la confiance des investisseurs. C'est une invitation à l'action pour tous les leaders.
Communiqué
Publié le 23/12/25 15:55


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