Ghana : Face à des revenus du cacao devenus incertains, les producteurs s’inquiètent

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Malgré des prix mondiaux en forte hausse, les producteurs de cacao au Ghana risquent une nouvelle désillusion. À l'approche de la grande récolte, les aléas climatiques font craindre un échec de l'objectif de 650 000 tonnes, pendant que le système de rémunération laisse les planteurs à l'écart des bénéfices du marché. Le pays est-il en train de perdre le pari d'un cacao équitable et durable ?

Sur les marchés mondiaux, le cacao est devenu une matière première aussi précieuse qu'instable. Depuis fin 2023, les prix ont atteint des sommets historiques, alimentés par une rareté croissante due aux baisses de production en Afrique de l'Ouest. Pourtant, dans les zones rurales du Ghana, l'ambiance est bien loin de cette euphorie boursière. Le pays, deuxième producteur mondial de cacao, fait face à une nouvelle menace, la météo.

Des pluies excessives, un manque de soleil et la recrudescence des maladies fongiques, en particulier la pourriture brune, font planer un doute sur la récolte de la saison 2024/2025. Selon les estimations du COCOBOD, l'organisme régulateur du secteur, l'objectif de 650 000 tonnes est désormais incertain.

Des plantations asphyxiées par le climat

La sonnette d'alarme a été tirée par les agriculteurs eux-mêmes. Regroupés autour de l'Association des planteurs de cacao, ils ont alerté sur les effets néfastes des conditions climatiques actuelles. ‘'Les rendements chutent, les maladies se propagent rapidement. Nos arbres sont sous tension'', a déclaré leur président, Nana Oboadie Bonsu, après une tournée dans 72 districts de culture du cacao.

Dans son communiqué, le COCOBOD reconnaît la gravité de la situation. Il a lancé en urgence des campagnes de pulvérisation de masse et accéléré la distribution de fongicides, dans l'espoir de limiter la casse avant la récolte. Mais pour beaucoup, l'heure est à l'inquiétude.

Des revenus déconnectés des prix mondiaux

Plus inquiétant encore, alors que les marchés internationaux flambent, cette embellie ne se traduit pas dans les revenus des producteurs. Le Ghana, comme la Côte d'Ivoire, fixe un prix d'achat garanti aux planteurs en début de campagne, largement inférieur aux cours réels du marché. Or, avec une baisse de production, le revenu global des familles risque de s'éroder encore davantage, même si le prix payé aux producteurs est maintenu.

Cette situation met en lumière une contradiction criante au sein de la filière où les producteurs des fèves, maillons essentiels de la chaîne de valeur, restent les moins bien rémunérés. Dans un contexte de flambée mondiale, ce découplage pose la question de l'équité du système et de sa soutenabilité.

L'orpaillage, l'autre peine des producteurs

Au-delà du climat, les planteurs ghanéens sont aussi confrontés à des menaces structurelles. L'orpaillage illégal, en constante expansion, détruit des hectares de plantations et pollue les sols. Les jeunes, eux, se détournent du cacao, faute de rentabilité, aggravant le vieillissement des exploitations.

La baisse de la production n'est donc pas uniquement conjoncturelle. Elle révèle une fragilité structurelle du secteur. Le Ghana, qui a longtemps misé sur une régulation stricte et un soutien aux petits producteurs, voit aujourd'hui son modèle sous tension.

La situation actuelle appelle à un réexamen en profondeur des mécanismes de rémunération et de soutien aux producteurs. Il ne s'agit plus seulement de sauver une récolte, mais de repenser l'avenir du cacao au Ghana. À l'heure où la demande mondiale reste soutenue, le pays doit se donner les moyens d'être non seulement un acteur incontournable des marchés, mais aussi un modèle d'équité et de durabilité.

La Rédaction

Publié le 16/07/25 10:35

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