L’Afrique pourrait générer jusqu’à 1 430 milliards USD par an de ressources internes en plus

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Malgré des vents contraires mondiaux persistants, l'Afrique avance. Telle est la conviction portée par le rapport phare de la Banque africaine de développement (BAD), Perspectives économiques en Afrique 2025, présenté ce 27 mai 2025 lors des Assemblées annuelles qui se tiennent cette semaine à Abidjan.

Intitulé ‘'Tirer le meilleur parti du capital de l'Afrique pour favoriser son développement'', ce rapport dresse un constat lucide mais porteur d'espoir : l'Afrique est riche, mais mal capitalisée. Si elle sait mieux mobiliser ses ressources humaines, naturelles, fiscales, financières et commerciales, elle peut financer elle-même sa transformation.

Une croissance qui tient, envers et contre tout

La BAD annonce une hausse du taux de croissance économique africain de 3,3% en 2024 à 3,9% en 2025, pour atteindre 4% en 2026. Ces chiffres, bien que révisés à la baisse, dépassent encore la moyenne mondiale, exception faite de l'Asie émergente.

Dans le détail, 21 pays africains devraient dépasser 5% de croissance en 2025, et quatre (Éthiopie, Niger, Rwanda, Sénégal) franchiront le seuil critique de 7%, nécessaire à une réduction significative de la pauvreté.

Selon la BAD, cette résilience repose sur des réformes macroéconomiques efficaces, des ajustements budgétaires prudents et des efforts nationaux en matière de gouvernance.

Une croissance inégale selon les régions

La croissance économique du continent africain en 2025 affiche des disparités marquées selon les sous-régions.

L'Afrique de l'Est domine le paysage continental avec une progression attendue de 5,9%, soutenue par la vigueur économique de l'Éthiopie, du Rwanda et de la Tanzanie. Ces pays bénéficient d'un fort dynamisme dans les infrastructures, l'agriculture et les services numériques.

En Afrique de l'Ouest, la croissance devrait atteindre 4,3%, portée par l'exploitation de nouveaux gisements de gaz et de pétrole, notamment au Niger et au Sénégal.

L'Afrique du Nord connaîtrait une expansion plus modérée, estimée à 3,6%, en raison de contraintes structurelles persistantes, qu'il s'agisse de vulnérabilités budgétaires, de dépendance énergétique ou de tensions géopolitiques.

L'Afrique centrale, quant à elle, enregistre un ralentissement avec une croissance prévue à 3,2%, affectée par la volatilité des recettes extractives et un recul des investissements publics et privés.

Enfin, l'Afrique australe affiche la performance la plus faible, avec une croissance limitée à 2,2%. La région est particulièrement pénalisée par la faiblesse de l'économie sud-africaine, qui peine à dépasser 0,8% de croissance.

Des fragilités toujours vives : dette, inflation, fuite de capitaux

En dépit de ce regain de dynamisme dans plusieurs régions, le tableau économique du continent reste assombri par des fragilités structurelles préoccupantes. L'inflation atteint des niveaux à deux chiffres dans quinze pays, érodant le pouvoir d'achat des ménages.

Le poids de la dette publique s'est fortement alourdi : le service de la dette absorbe désormais 27,5% des recettes publiques, contre 19% en 2019, limitant la capacité des États à financer les investissements sociaux et productifs.

À cela s'ajoutent des pertes financières massives, estimées à 587 milliards de dollars. Parmi ces fuites de capitaux, 90 milliards sont liés aux flux financiers illicites, 275 milliards à l'évasion fiscale des multinationales, et 148 milliards à des pratiques de corruption.

‘'L'Afrique ne peut pas continuer à exporter sa richesse et importer sa pauvreté'', avertit Kevin Urama, économiste en chef et vice-président de la BAD.

Un capital africain sous-exploité : jusqu'à 1 430 milliards USD mobilisables

Selon le rapport, l'Afrique dispose de leviers internes considérables qui, une fois pleinement activés, pourraient mobiliser jusqu'à 1 430 milliards de dollars pour financer sa transformation structurelle.

Le premier levier réside dans le capital fiscal. Une numérisation accrue des administrations fiscales, combinée à un élargissement de l'assiette et à un renforcement du contrat social entre l'État et les citoyens, permettrait de stimuler le civisme fiscal et d'accroître durablement les recettes publiques.

Le deuxième levier concerne le capital naturel. Le continent abrite environ 30% des réserves minérales mondiales et pourrait capter une part significative des 16 000 milliards de dollars de revenus attendus sur les minéraux verts à l'horizon 2030, à condition de valoriser localement ces ressources dans un cadre réglementaire transparent et équitable.

Le capital humain représente également un atout décisif. Avec un âge médian de 19 ans, l'Afrique est le continent le plus jeune du monde. Si le plein emploi des jeunes devenait une réalité, il pourrait générer jusqu'à 47 milliards de dollars additionnels de produit intérieur brut.

Le capital financier constitue un autre gisement important. Les fonds de pension africains disposent déjà de plus de 1 100 milliards de dollars d'actifs sous gestion. Par ailleurs, les transferts de fonds de la diaspora pourraient atteindre 500 milliards de dollars d'ici 2035, à condition de réduire significativement les coûts de transfert.

Enfin, le capital commercial offre une perspective prometteuse à travers la mise en œuvre intégrale de la Zone de libre-échange continentale africaine. Celle-ci pourrait générer 560 milliards de dollars d'exportations supplémentaires et jusqu'à 450 milliards de revenus additionnels d'ici 2035, en stimulant les chaînes de valeur régionales et la compétitivité des entreprises africaines.

‘'Lorsque l'Afrique allouera efficacement son propre capital, les capitaux mondiaux suivront'', insiste Urama. ‘'Il est temps de transformer la richesse du potentiel africain en richesse réelle, visible et partagée'', a-t-il poursuivi.

Dr Ange Ponou

Publié le 28/05/25 18:57

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