Le Mauritanien Sidi Ould Tah élu 10e président de la BAD

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La Banque africaine de développement (BAD) entre dans une nouvelle ère. Ce 29 mai 2025, à l'issue d'un vote décisif des 81 actionnaires réunis à Abidjan pour les Assemblées annuelles, le Mauritanien Sidi Ould Tah a été élu président du Groupe de la BAD, succédant à Akinwumi Adesina, dont le mandat de dix ans a marqué un tournant dans le rayonnement institutionnel de la Banque.

Sidi Ould Tah s'est en effet détaché au troisième tour de ce scrutin avec une victoire écrasante, recueillant 76,18% des suffrages, dont 72,37% des voix régionales. Il devance largement le Zambien Samuel Maimbo, pourtant arrivé en tête au premier tour avec 40,41%, mais qui termine finalement avec 20,26%. Le Sénégalais Amadou Hott complète le trio de tête avec 3,55% des voix.

Cette élection constitue à bien des égards un choix stratégique et symbolique. Face à un panel de candidats hautement qualifiés, le profil de Sidi Ould Tah s'est imposé par sa vision panafricaine inclusive, son expérience éprouvée dans la réforme des institutions financières, et sa capacité à construire des ponts entre les États, les régions et les partenaires de développement.

Une voix du Sud, une légitimité continentale

Originaire de Mauritanie, Sidi Ould Tah cumule plus de 30 ans d'expérience dans l'économie du développement, la finance publique et la coopération internationale. Depuis 2015, il dirigeait la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), qu'il a profondément modernisée et repositionnée comme un acteur clé de l'architecture financière du continent.

Son élection incarne une volonté des actionnaires de la BAD de ramener la Banque plus près des réalités des États, tout en maintenant une exigence d'efficacité, de souveraineté et de réactivité. Homme de consensus, de dialogue et de réforme, Sidi Ould Tah bénéficie d'une reconnaissance transversale — tant auprès des pays francophones qu'anglophones, des institutions continentales que de la société civile africaine.

Un cap affirmé : souveraineté, inclusion, efficacité

Dans son discours d'acceptation, le nouveau président a appelé à " réancrer la Banque dans les priorités concrètes des Africains ", en plaçant au cœur de son mandat l'industrialisation du continent, l'investissement dans les infrastructures de base, la transformation agricole, et l'autonomisation des femmes et des jeunes.

Sa feuille de route repose sur trois piliers :

  • une BAD plus proche des États, capable de mieux adapter ses instruments aux besoins locaux ;
  • une BAD plus agile, qui accélère ses décaissements et réduit les délais de mise en œuvre des projets ;
  • une BAD plus souveraine, qui investit davantage dans le capital africain — fiscal, naturel, humain, commercial et financier.

Dans un continent confronté à 587 milliards de dollars de fuite de capitaux chaque année, et fort d'un potentiel mobilisable estimé à 1 430 milliards de ressources internes, Sidi Ould Tah prône une Banque qui ‘'accompagne les États dans la reconquête de leur marge de manœuvre budgétaire''.

Un signal fort en faveur de la coopération Sud-Sud

Sidi Ould Tah est aussi l'architecte d'un renouveau de la coopération arabe-africaine, qu'il a consolidée au sein de la BADEA. Il défend une approche pragmatique du partenariat, fondée sur le respect de la souveraineté, la complémentarité des financements, et une logique de co-développement. Son élection peut être interprétée comme un rééquilibrage géopolitique, accordant davantage de poids aux institutions africaines partenaires et à la coopération interrégionale Sud-Sud.

Une BAD prête à se réinventer pour relever les défis d'une décennie cruciale

Sidi Ould Tah prend la tête d'une institution robuste — avec un portefeuille de 318 milliards de dollars et une présence dans plus de 50 pays — mais appelée à se réinventer dans un contexte de tensions budgétaires, de mutation climatique, et de forte attente sociale. La stratégie décennale 2024–2033 de la Banque, qui appelle à une transformation systémique de l'économie africaine, attend désormais un pilote capable d'en concrétiser les ambitions.

Son défi sera de conjuguer l'impact et la proximité, la discipline financière et la flexibilité stratégique.

En ce 29 mai 2025, la BAD change de visage, mais pas d'objectif : accélérer une Afrique forte, intégrée, prospère et souveraine.

Dr Ange Ponou

Publié le 29/05/25 13:09

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