Les trois pays de l'Alliance des États du Sahel (AES) viennent de prendre une décision historique en interdisant l'entrée de leur territoire aux citoyens américains. Le Mali et le Burkina Faso ont officialisé cette mesure ce 30 décembre, tandis que le Niger l'avait annoncée quelques jours plus tôt. Cette riposte diplomatique fait suite à la décision prise par Washington le 16 décembre d'élargir ses restrictions d'entrée aux ressortissants de ces trois nations sahéliennes.
Dans leurs communiqués officiels, les ministères des Affaires étrangères du Mali et du Burkina Faso ont invoqué le principe de réciprocité pour justifier l'application immédiate des mêmes conditions d'entrée que celles imposées par les États-Unis à leurs propres citoyens. Le Niger, qui avait pris les devants, est allé encore plus loin en interdisant totalement et définitivement la délivrance de visas aux citoyens américains, ainsi que leur entrée sur le territoire nigérien.
Pour rappel, la décision américaine, a placé le Burkina Faso, le Mali et le Niger sur la liste des 19 pays dont les ressortissants se voient refuser l'accès au territoire américain. Ces restrictions, qui entre en vigueur à partir du 1er janvier 2026, s'appliquent aussi bien aux visas d'immigrant qu'aux visas de non-immigrant, avec quelques exceptions limitées notamment pour les visas diplomatiques et les situations d'urgence humanitaire.
Le communiqué malien exprime le regret de Bamako face à cette décision unilatérale prise sans concertation préalable. Les autorités maliennes déplorent particulièrement le motif sécuritaire invoqué par Washington pour justifier ces restrictions. Le ministre malien des Affaires étrangères souligne que cette décision va à l'encontre de l'esprit de coopération qui devrait caractériser les relations bilatérales entre les deux pays.
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Du côté burkinabè, le ministre des Affaires étrangères Karamogo Jean Marie Traoré a tenu à rappeler dans son communiqué que son pays reste attaché au respect mutuel et à l'égalité souveraine des États. Tout en annonçant l'application de mesures équivalentes, Ouagadougou se déclare néanmoins ouvert à une coopération future, à condition qu'elle soit fondée sur le respect des intérêts réciproques et la dignité de chaque partie.
Cette escalade dans les relations entre Washington et les capitales sahéliennes intervient dans un contexte déjà tendu. En octobre 2025, les États-Unis avaient déjà imposé une caution de 5 000 à 15 000 dollars pour les demandeurs de visa de certains pays africains, dont le Mali, la Mauritanie, la Tanzanie, la Gambie et le Malawi. Cette mesure, justifiée par des taux élevés de dépassement de séjour, avait déjà provoqué une première réaction de Bamako. Le Mali avait brièvement instauré une mesure de réciprocité avant d'être retiré de la liste américaine en novembre. Mais cette fois, la situation semble différente et plus définitive.
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La proclamation américaine cite des préoccupations sécuritaires pour justifier ces restrictions. Concernant le Niger, le document mentionne la présence active de terroristes dans le pays et des taux de dépassement de visa atteignant 13,41% pour les visas touristiques et d'affaires, et 16,46% pour les visas étudiants. Pour le Mali, Washington évoque les conflits armés récurrents entre le gouvernement et divers groupes armés à travers le pays. Le Burkina Faso fait également face à des défis sécuritaires similaires dans un contexte sahélien marqué par l'instabilité.
Au-delà de l'aspect diplomatique, cette fermeture réciproque des frontières aura des répercussions concrètes sur les échanges humains, économiques et universitaires entre ces pays. Les diasporas des trois nations sahéliennes aux États-Unis, ainsi que les citoyens américains présents ou ayant des intérêts au Mali, au Niger et au Burkina Faso, se retrouvent dans une situation complexe. Les programmes d'échanges académiques, les investissements bilatéraux et les relations familiales risquent d'être considérablement affectés par ce bras de fer diplomatique.
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Les trois gouvernements sahéliens ont néanmoins laissé la porte ouverte à d'éventuelles négociations futures. Ils réaffirment tous leur attachement à des relations internationales fondées sur le respect mutuel, l'égalité souveraine et la coopération équitable. Reste à savoir si cette position ferme s'inscrira dans la durée ou si elle ouvrira la voie à un dialogue permettant de dénouer cette crise diplomatique qui s'annonce durable.
Pour l'instant, à compter du 1er janvier 2026, les ressortissants américains ne peuvent plus obtenir de visa pour se rendre au Mali, au Niger ou au Burkina Faso, tandis que les citoyens de ces trois pays se voient refuser l'accès au territoire américain, marquant ainsi un tournant majeur dans les relations entre Washington et cette région stratégique de l'Afrique de l'Ouest.
Fanuelle YAO
La Rédaction
Publié le 31/12/25 12:47


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