CEDEAO/Monnaie unique : Où en sont les Etats avec les critères de convergence ?

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Lors du 65ème sommet ordinaire des chefs de l'Etat et de gouvernement de la CEDEAO, tenu à Abuja, au Nigéria, plusieurs sujets cruciaux ont été abordés, dont celui de la monnaie unique, l'ECO. Cette initiative de création d'une monnaie unique a été lancée le 1er juin 1983 à Conakry, en Guinée, dans le but de renforcer l'intégration économique de la région et donc faciliter les échanges.

Dans le cadre de la mise en place de cette monnaie unique, des critères de convergence ont été établis. Pour rappel, les critères de convergence sont un ensemble d'indicateurs économiques, de normes que les Etats se doivent de respecter et qui ont pour but de créer un cadre économique cohérent. La finalité est que les économies évoluent suivant une même dynamique et, de ce fait, soient plus susceptibles de réagir de manière harmonieuse aux politiques monétaire et budgétaire qui seront mises en œuvre dans le cadre régional.

Au nombre de ces critères, l'on a les critères de premier rang et les critères de second rang définis par l'Agence monétaire de l'Afrique de l'Ouest (AMAO), institution mise en place par la CEDEAO en charge du projet de la monnaie unique.

Les critères de premier rang comprennent un déficit budgétaire inférieur ou égal à 3% du PIB, une inflation annuelle inférieure ou égale à 5%, le financement du déficit budgétaire par la banque centrale inférieur ou égal à 10% des recettes fiscales, et des réserves extérieures brutes supérieures ou égales à trois mois d'importations. Les critères de second rang intègrent un taux d'endettement (ratio dette publique/PIB) inférieur ou égal à 70% et une variation du taux de change nominal limitée à ±10%.

Dans le cadre de cet article, notre étude portera sur les données de la région à fin 2023 fournies par la BIDC, la banque d'investissement de la CEDEAO, relatives au déficit budgétaire, à l'inflation et au taux d'endettement.

L'analyse de l'état de convergence des pays de la CEDEAO révèle qu'aucun pays n'a respecté intégralement les trois critères retenus dans le cadre de cet article.
En matière de déficit budgétaire, à l'exception du Cap-Vert (0,3%), de la Guinée (1,6%) et de la Gambie (3%), aucun pays n'est conforme. Il faut noter que les pays de l'UEMOA devraient en principe ramener progressivement leurs déficits à 3% dans les 2 à 3 prochaines années, une exigence de la BCEAO qui avait été mise en veilleuse suite à la crise de la Covid-19.

En outre, près de la moitié des pays de la CEDEAO ont respecté la norme au niveau de l'inflation à l'exception de la Sierra Léone (47,7%), le Ghana (37,5%) et le Nigéria (24,7%) qui affichent des taux alarmants. Soulignons que presque tous les pays de l'UEMOA, certainement du fait de l'arrimage du Franc CFA à l'euro, sont parvenus à contenir l'inflation dans la limite définie, contrairement à ceux de la zone ZMAO+ (Etats hors UEMOA).

Au niveau du critère du taux d'endettement, 9 pays sur 15 font figure de bons élèves, sauf le Cap-Vert (115,4%), le Ghana (86,1%), la Sierra Léone (80%), le Sénégal (79,6%) et la Guinée-Bissau (77,8%), où les taux d'endettement sont les plus élevés de la région.

En somme, aucun pays en 2023 n'a respecté les trois critères majeurs de convergence de l'Eco, tout comme ce fut le cas en 2022. Cette situation illustre bien les difficultés de mise en œuvre d'une monnaie unique qui ne parvient toujours pas à se concrétiser.

Quand la Covid-19 fait dérailler les économies

Bien plus, en 2023, aucun État membre n'a été en mesure de respecter l'ensemble des six (6) critères de convergence édictés par l'AMAO ; une situation observable depuis 2020. Toutefois, la Côte d'Ivoire, le Bénin et le Togo ont respecté les 6 critères de convergence successivement en 2018 et 2019, le Mali et le Niger l'avaient fait respectivement en 2019 et en 2018.


De même, le nombre d'États membres ayant rempli au moins cinq (5) critères est passé de 10 en 2018 à 2 en 2022. Ce qui peut bien s'expliquer par les effets des chocs successifs des crises de la Covid-19 et de la guerre en Ukraine qui affectent les finances publiques et exacerbent l'inflation dans la région.

L'Eco en 2027 ?

Ce tableau vient suffisamment expliquer les raisons du report du lancement de l'Eco initialement annoncé en 2020, du fait des difficultés de la région à constituer des économies homogènes à même de réagir de manière harmonieuse à une même politique monétaire et budgétaire.

La question été soulevée par les chefs d'Etat et de gouvernement de la CEDEAO le 7 juillet. Ces derniers ont réaffirmé leur volonté de voir le projet se concrétiser et manœuvrent pour faire bouger les lignes.

A cet effet, les Etats membres sont invités à élaborer et transmettre à la commission de la CEDEAO leur agenda de conformité aux critères de convergence, qui ont été par ailleurs maintenus en l'état, pour la période 2025-2029 au plus tard le 31 octobre 2024.

En outre, il a été demandé à l'AMAO de " procéder à l'évaluation des coûts, à l'identification des sources et des modalités de financement de la mise en place des institutions nécessaires pour la création de l'Eco " à soumettre courant 2025.

Il ressort ainsi que la perspective d'une monnaie unique reste d'actualité pour les dirigeants de la région avec une nouvelle échéance en 2027, un cap qui avait été fixé lors de la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement tenue le 19 juin 2021 à Accra, au Ghana.

DONGO Henri

La Rédaction

Publié le 22/07/24 12:29

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