En Afrique, l'économie circulaire n'est plus un simple concept environnemental. Elle se révèle désormais comme un véritable moteur de croissance, capable de transformer durablement les économies nationales.
Selon les estimations issues des travaux menés par l'Alliance africaine pour l'économie circulaire (ACEA) et la Facilité pour l'économie circulaire en Afrique (ACEF), l'adoption massive de ce modèle pourrait générer jusqu'à 546 milliards USD supplémentaires pour le PIB africain à l'horizon 2030, tout en créant près de 11 millions d'emplois.
Un marché colossal à saisir
L'économie circulaire est fondée sur la réutilisation, la réparation, le recyclage et la valorisation des déchets, afin de prolonger le cycle de vie des produits. Ce changement de paradigme place l'Afrique face à un marché global en pleine expansion, estimé à 4 500 milliards USD d'ici 2030.
Le continent pourrait en capter une part significative, notamment grâce au marché africain de la gestion des déchets, évalué déjà à 21,7 milliards USD et promis à une croissance rapide.
L'ACEA a ciblé quatre domaines prioritaires où l'impact de la circularité peut être immédiat : l'agroalimentaire, avec la conversion des déchets organiques en engrais pour réduire les pertes agricoles et renforcer la sécurité alimentaire ; le textile et la mode, où le recyclage des déchets vestimentaires ouvre la voie à de nouvelles chaînes de valeur ; le bâtiment et la construction, grâce à l'utilisation de matériaux durables comme le contreplaqué recyclé ; et l'électronique, avec la mise en place de filières industrielles pour la collecte et le recyclage des déchets électroniques, un gisement aujourd'hui largement inexploité.
Des bénéfices multiples
Au-delà des gains financiers, l'économie circulaire pourrait réduire de 60% les émissions de gaz à effet de serre du continent, selon les projections de la Banque africaine de développement. Elle constitue ainsi un levier incontournable pour la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD), en conjuguant croissance économique, inclusion sociale et protection environnementale.
Plusieurs pays africains ont déjà lancé leurs feuilles de route nationales pour accélérer la transition. Le Bénin, le Cameroun, le Tchad, l'Éthiopie et l'Ouganda bénéficient de l'accompagnement technique de l'ACEF pour bâtir un cadre réglementaire favorable.
En parallèle, des programmes comme AfriCircular Innovators soutiennent directement des dizaines de PME en Côte d'Ivoire, au Ghana et au Rwanda, preuve que la circularité peut devenir une réalité entrepreneuriale à grande échelle.
Si le potentiel est immense, sa concrétisation dépendra de la capacité des États et des acteurs privés à mobiliser des financements adaptés et à renforcer la gouvernance des filières. Les fraudes, les importations massives de déchets non traités et l'absence de normes de qualité constituent encore des freins majeurs.
Toutefois, l'existence d'un fonds dédié, comme l'ACEF logé à la Banque africaine de développement, offre un cadre structurant pour accélérer le mouvement.
Dr Ange Ponou
Publié le 21/08/25 18:13