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Karitia COULIBALY DE MEDEIROS, DG de l'AGEFOP : ''Nous voulons changer la perception de la formation professionnelle et montrer qu'elle peut être un véritable tremplin vers le succès''
À la tête de l'AGEFOP depuis octobre 2023, Karitia COULIBALY De Medeiros incarne une nouvelle vision pour la formation professionnelle en Côte d'Ivoire. Forte d'une riche expérience dans la gestion de projets structurants, elle s'attaque aux défis d'un secteur clé pour l'insertion des jeunes et le développement économique. Dans cet entretien exclusif, elle revient sur son parcours, les ambitions de l'AGEFOP et les initiatives phares comme le Programme Passeport Compétences ou encore le Forum International des Métiers et des Compétences (FIMEC).
Avec une stratégie axée sur l'innovation, la collaboration avec les acteurs privés et publics, et la professionnalisation des compétences locales, Karitia COULIBALY trace les contours d'une formation professionnelle adaptée aux besoins du marché et à l'avenir de la jeunesse ivoirienne.
Madame Coulibaly De Medeiros, pouvez-vous nous parler de votre parcours et de votre nomination à la tête de l'AGEFOP ?
Je suis Karitia COULIBALY DE MEDEIROS, directrice générale de l'Agence nationale de la formation professionnelle (AGEFOP). J'ai été nommée à ce poste par décret présidentiel le 28 septembre 2023 et j'ai officiellement pris mes fonctions le 4 octobre de la même année.
Mon parcours académique m'a conduit en France et aux États-Unis après avoir obtenu mon baccalauréat en Côte d'Ivoire. J'ai décroché une maîtrise en économie à l'Université Paris-Dauphine et un DESS (l'équivalent d'un master) en finance d'entreprise à l'Université Harvard.
Après mes études, j'ai choisi de retourner en Côte d'Ivoire pour servir mon pays. J'ai débuté ma carrière dans le secteur privé où j'ai exercé durant une dizaine d'année, avant de rejoindre l'administration publique.
Après mes études, j'ai choisi de retourner en Côte d'Ivoire pour servir mon pays. J'ai débuté ma carrière dans le secteur privé où j'ai exercé une dizaine d'année notamment à l'Agence Française de Développement (AFD), chez Alsthom, à l'OIAC (Organisation interafricaine de café).
Par la suite, j'ai intégré l'administration publique en 2011 en tant que conseillère technique au ministère des Infrastructures économiques, où j'ai géré des projets structurants financés par le C2D, la Banque mondiale et d'autres partenaires dans des domaines tels les infrastructures routières, l'hydraulique ou encore dans les domaines portuaires, aéroportuaire et ferroviaire. J'ai également en qualité de directeur de cabinet du ministre de la Promotion de la Jeunesse, de l'Insertion professionnelle et du Service civique.
Quelles sont les missions principales de l'AGEFOP ?
L'AGEFOP est le cabinet d'ingénierie de la formation professionnelle de l'État ivoirien. Créée en 1992, elle a pour mission de contribuer à l'adéquation entre l'offre de formation et les besoins du marché du travail.
Concrètement, nous identifions les besoins en compétences des secteurs productifs, en partenariat avec les entreprises, artisans et autres acteurs économiques. Ces besoins sont traduits en référentiels de métiers et programmes de formation adaptés.
Créée en 1992, l'AGEFOP a pour mission de contribuer à l'adéquation entre l'offre de formation et les besoins du marché du travail.
Nous coordonnons également la mise en œuvre des formations sans disposer de centres propres. Nos formations par apprentissage combinent 25% de cours théoriques et 75% de pratique en entreprise pour garantir l'opérationnalité immédiate des bénéficiaires. Par ailleurs, nous proposons des formations qualifiantes de courte durée pour répondre aux besoins des personnes en reconversion ou sans diplôme, ainsi que des modules pour accompagner l'entrepreneuriat.
Il faut aussi noter que nos missions intègrent le volet professionnalisation des métiers et secteurs d'activité. Comme vous le savez, l'économie de la Côte d'Ivoire, comme pour la plupart des économies africaines, est en bonne partie portée par le secteur informel. Dans ce secteur, il y a des personnes qui exercent par exemple comme plombier ou artisans sans avoir suivi une formation classique, donc sans diplôme, mais qui ont une expertise. Ici, nous œuvrons à valider, à certifier ces compétences en vue de faciliter leur insertion dans le secteur formel ou, pour ceux qui sont en entreprise, aider à leur promotion dans la hiérarchie. C'est une vraie préoccupation exprimée par les entreprises elles-mêmes. Nous travaillons donc à généraliser la validation des acquis de l'expérience de ces acteurs.
Comment l'AGEFOP collabore-t-elle avec les acteurs privés et publics pour ses projets ?
Nos actions s'inscrivent dans une dynamique de co-construction avec le secteur privé, les collectivités territoriales, les structures d'insertion professionnelle, ainsi que les établissements de formation publics et privés.
Un de nos projets phares, le Programme national Passeport Compétences, vise à établir un diagnostic complet des besoins en compétences dans chaque région et secteur d'activité de Côte d'Ivoire.
Un de nos projets phares, le Programme national Passeport Compétences, vise à établir un diagnostic complet des besoins en compétences dans chaque région et secteur d'activité de Côte d'Ivoire. Ce programme repose sur un partenariat étroit avec les entreprises, qui expriment leurs besoins, et sur une collaboration avec d'autres institutions éducatives pour actualiser les programmes existants ou en concevoir de nouveaux. Le tout, avec en projet de co-construire, avec les acteurs locaux concernés, des curricula de formation qui répondent exactement aux attentes du marché local.
Pouvez-vous nous parler justement du Programme Passeport Compétences dont la phase pilote a démarré ?
‘'Après une cartographie des entreprises locales, nous procédons à un échantillonnage et réalisons des enquêtes pour recueillir des données sur leurs besoins en compétences, actuels et futurs. Sur cette base, nous concevons des formations adaptées.''
Nous avons lancé une phase pilote dans la région du Sud-Comoé [Sud-Est ivoirien], en partenariat avec le Conseil régional. Les secteurs prioritaires identifiés sont l'agriculture, l'agro-industrie, l'agropastoral, le tourisme/hôtellerie/restauration, et plus récemment, les mines et le pétrole.
Après une cartographie des entreprises locales, nous réalisons des enquêtes pour recueillir des données sur leurs besoins en compétences, actuels et futurs. Sur cette base, nous concevons des formations adaptées.
Après une cartographie des entreprises locales, nous procédons à un échantillonnage et réalisons des enquêtes pour recueillir des données sur leurs besoins en compétences, actuels et futurs. Sur cette base, nous concevons des formations adaptées. Nous évaluons en outre le dispositif de formation disponible localement en regardant s'il faut actualiser les programmes ou s'il faut implémenter de nouvelles formations.
Cette phase pilote va s'étendre, durant l'année 2025, à la région du Cavally, à l'Ouest, et dans le District des Savanes (Régions du Poro, de la Bagoué et du Tchologo), au Nord. L'objectif est la généralisation progressive de ce programme sur l'ensemble du territoire national à l'horizon 2030.
Quels sont les principaux défis auxquels l'AGEFOP fait face ?
L'AGEFOP fait face à quatre défis principaux. Primo, elle n'est pas suffisamment connue, secundo, elle a besoin de renforcer ses ressources humaines pour répondre aux besoins croissants et aux évolutions dans les divers domaines de formation, tertio, elle est contrainte par l'insuffisance de financements pour mener à bien ses missions et atteindre ses objectifs. Et par ailleurs, une meilleure synergie d'actions entre les acteurs publics, privés et territoriaux est essentielle pour assurer l'efficacité de nos projets.
Quels sont les résultats obtenus avec les formations par apprentissage jusqu'à présent ?
Grâce au financement de la Banque mondiale, nous avons formé des jeunes via un programme d'apprentissage modernisé. Une étude d'impact a révélé que ces formations améliorent les revenus des bénéficiaires de 14% par rapport à d'autres types de programmes.
Une étude d'impact a révélé que nos formations améliorent les revenus des bénéficiaires de 14% par rapport à d'autres types de programmes.
Ces formations par apprentissage, dispensées dans une quinzaine de localités à travers le pays, ont également favorisé l'auto-emploi, notamment dans les secteurs du BTP et de l'esthétique. Aujourd'hui, notre objectif est d'étendre ce modèle à l'échelle nationale et de l'adapter aux besoins spécifiques des territoires.
Quelles autres initiatives comptez-vous mettre en œuvre afin de renforcer l'impact de votre institution dans le développement des compétences professionnelles en Côte d'Ivoire ?
Nous venons de finaliser une plateforme d'e-learning (DIGIFOP) qui permettra aux bénéficiaires d'accéder aux formations de l'AGEFOP et de tous nos partenaires directement en ligne sans avoir à se déplacer. Cette plateforme sera mise également à la disposition de formateurs pour la dématérialisation du contenu de leurs formations.
En outre, nous prévoyons d'organiser en février 2025 la première édition du Forum International des Métiers et des Compétences (FIMEC), une plateforme d'échanges et de partage avec tous les acteurs de l'écosystème de la formation professionnelle et avec es experts internationaux, afin de nous inspirer des meilleures pratiques et de renforcer la coopération entre les acteurs locaux.
Nous prévoyons d'organiser en février 2025 la première édition du Forum International des Métiers et des Compétences (FIMEC).
Toutes les parties prenantes, secteur public, secteur privé, collectivités territoriales et jeunes, s'y retrouverons pour valoriser les initiatives existantes, souvent méconnues, et restaurer la confiance entre les acteurs de l'écosystème. Il s'agira également de promouvoir la formation professionnelle comme un levier puissant d'insertion durable pour les jeunes.
Enfin, ce forum sera aussi une opportunité pour les collectivités territoriales de présenter leurs besoins spécifiques en formation et pour les jeunes de comprendre que les métiers issus de la formation professionnelle sont porteurs, offrant des opportunités d'insertion durable et d'autonomie financière. Nous voulons changer leur perception sur la formation professionnelle et leur montrer qu'elle peut être un véritable tremplin vers le succès, que ce soit dans leur pays ou à l'international, mais dans un cadre organisé et valorisant.
Nous plaidons pour que soit systématiquement intégré une composante développement du capital humain dans tous les projets structurants de l'État.
Par ailleurs, nous plaidons pour que soit systématiquement intégré une composante développement du capital humain dans tous les projets structurants de l'État. Par exemple, dès la conception d'un projet de construction d'une infrastructure routière, ou d'une usine dans une localité, il faudrait identifier les besoins en compétences et former les populations locales en amont. L'avantage sera de disposer le moment venu des compétences nécessaire sans avoir besoin d'aller en chercher à l'extérieur. En outre, au terme du projet, l'on aura un vivier de compétences aguerries qui pourront valablement travailler sur d'autres projets similaires et favoriser le nécessaire transfert technique et de savoir-faire à d'autres cohortes de jeunes.
Un dernier mot ?
Je voudrais exhorter les jeunes à comprendre qu'au-delà du diplôme, la compétence est la clé, le passeport pour accéder au monde du travail ou réussir une initiative entrepreneuriale. Pour ce faire, l'AGEFOP se tient disponible pour les accompagner dans la construction de leur parcours professionnel.
Jean Mermoz Konandi
Publié le 20/12/24 17:28
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