Le cacao ivoirien bientôt interdit sur le sol américain ?

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C'est le très sérieux Washington Post qui revient sur l'affaire dans sa publication de ce 7 août : les Etats-Unis pourraient interdire les importations de cacao et de chocolat " made in Côte d'Ivoire ".

A l'origine de cette menace, les sénateurs américains Sherrod Brown (Ohio) et Ron Wyden (Oregon) qui ont appelé le mois dernier les autorités américaines à interdire l'arrivée de ces produits sur le sol américain, arguant détenir des " preuves accablantes " relatives au travail d'enfants dans les plantations ivoiriennes de cacao.

Cet appel vient faire écho à un reportage en juin du Washington Post dont les journalistes avaient interviewé une douzaine d'enfants dans des exploitations de cacao. Ces derniers avaient affirmé avoir quitté le Burkina Faso voisin, pour travailler dans les plantations de cacao.

" Le gouvernement américain a été extrêmement patient avec cette industrie pendant si longtemps. Ces entreprises (multinationales également parties prenantes dans la lutte contre le phénomène, ndlr) font ces promesses depuis 20 ans - sans impact ", a dénoncé Katherine McDonnell, directrice du Corporate Accountability Lab, auteur d'un rapport critique sur les pratiques de l'industrie du chocolat en Côte d'Ivoire, citée par le confrère.

Le fait est que cet appel peut être mis en application par les autorités douanières du pays sur la base d'une loi qui les autorise à saisir tout produit importé dont il est avéré qu'il est le fruit du travail d'enfants.

Engagée dans la lutte contre l'exploitation des enfants dans les plantations de cacao depuis plus de 20 ans, la Côte d'Ivoire, avec l'appui de multinationales du cacao et d'ONG, a mis en place une politique nationale spécifique afin de s'attaquer au problème. Mais force est de constater qu'il est bien difficile d'enrayer totalement le problème dans l'ensemble du pays.

La Côte d'Ivoire prépare la riposte

L'affaire est prise très au sérieux par les autorités ivoiriennes. En marge du forum sur l'AGOA tenu en début de semaine, la première dame Dominique Ouattara, en pointe dans la lutte contre le phénomène, avait reçu en audience, le 5 août, une délégation américaine comprenant notamment des fonctionnaires du Congrès, afin d'expliquer les efforts engagés par le pays.

" L'article du Washington Post dit vrai, mais c'est quelque chose qui n'est pas fréquent. Il s'agit d'un cas isolé parce qu'il existe des plantations qui n'emploient pas des enfants " a indiqué Dominique Ouattara qui a souligné qu'un éventuel embargo apparaîtrait comme une sanction " injuste " contre le dur labeur des paysans et le pays tout entier.

" J'ai l'impression que tous les efforts que nous faisons ne sont pas assez connus et reconnus (…) J'ai l'intention de faire un voyage aux Etats-Unis en septembre pour expliquer notre travail " avait en outre ajouté Dominique Ouattara.

La question a par ailleurs été très probablement abordée par le président ivoirien Alassane Ouattara qui recevait en audience ce 8 août Michel Arrion, directeur exécutif de l'ICCO, l'organisation internationale du cacao dont le siège est à Abidjan.

Les Américains comptent-ils, avec cette menace, accentuer la pression sur les autorités ivoiriennes afin d'exiger plus de résultats tangibles dans la lutte contre le travail des enfants, ou s'agit-il d'une réelle volonté d'appliquer une menace qui plane depuis plus de 20 ans ?

Il faut en outre faire remarquer que cette affaire refait surface alors que la Côte d'Ivoire et le Ghana tentent d'imposer au marché international un prix minimum d'achat du cacao, une stratégie qui ne fait pas que des heureux.

Les Etats-Unis sont l'un des principaux importateurs de fèves de Côte d'Ivoire qui alimentent en partie sa florissante industrie chocolatière. Et une mesure d'interdiction du cacao ivoirien pourrait s'étendre à d'autres grands pays occidentaux importateurs. Une perspective le pays devra tout faire pour éviter.

Notons que selon le Washington Post, la Forced Labor Division, la division en charge de la lutte contre le travail des enfants du Département américain de la sécurité intérieure, a diligenté depuis plusieurs une enquête dont les conclusions sont très attendues.

Jean Mermoz Konandi

Publié le 08/08/19 17:00

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