Marcel Zadi Kessy, le grand patron ivoirien, s’en est allé

La Côte d'Ivoire vient de perdre l'un de ses plus illustres capitaines d'entreprise. Marcel Zadi Kessy, l'ex président du groupe CIE/SODECI, a tiré sa révérence. Il aura marqué le secteur privé ivoirien dont il a été l'une des plus grandes figures durant les années 1990 et 2000.

Ingénieur des techniques d`équipement rural, il a entamé sa carrière au sein d'une société publique du secteur agricole avant d'intégrer la SODECI, société en charge du service public de l'eau, détenue par SAUR, une filiale du groupe Bouygues. Devenu président directeur général, il est appelé au début des années 1990 à la tête de la CIE, la compagnie ivoirienne d'électricité, contrôlée alors par le groupe Bouygues qui venait de racheter l'EECI, la société publique d'électricité au bord de la faillite.

Il va diriger, comme PDG, les deux sociétés qu'il fait prospérer, avant d'en être nommé président du conseil d'administration à compter de 2002.

Il fera des deux sociétés les références dans leurs secteurs d'activité respectifs en Afrique à travers un style de management associant pratiques modernes de gestion et leviers culturelles pour améliorer la gouvernance et entretenir la motivation et l'engagement  de ses collaborateurs. " La pauvreté ne se partage pas " aimait-il à répéter comme pour dire qu'il n'y a que la richesse créée par le travail de chacun qui peut être par la suite redistribuée au bénéfice de tous : toute une philosophie!

Devant les retombées de cette approche managériale qui s'est ressentie sur les performances financières des sociétés qu'il dirige, Marcel Zadi Kessy décide d'écrire un livre, Culture africaine et Gestion de l'entreprise moderne, qui fut un grand succès à l'époque.

Outre son passage à la tête du patronat ivoirien entre 1993 et 1998, il s'est aussi distingué par son engagement auprès des siens, dans son village de Yacolidabouo, sa terre natale dans le sud-ouest ivoirien, qui a été le champ d'expérimentation de sa vision de la lutte contre la pauvreté par le développement à la base. Sous son impulsion, ce hameau s'est transformé en petite ville moderne avec toutes les commodités : eau, électricité, écoles, centre de santé, radio communautaire, bitume, etc. " C'est un village où tous, vieux comme jeunes, enrichis par le fruit de leurs terres qu'ils mettent en valeur à travers différentes spéculations (hévéa, cacao, etc.), préfèrent rester et s'y investir plutôt d'aller grossir les rangs des chômeurs dans les villes ", confient un de ses anciens plus proches collaborateurs. Après un tel succès, il va parcourir d'autres hameaux ivoiriens pour pêcher le développement à la base avec l'espoir de voir répliquer ce modèle. Il va consigner cette expérience dans un autre livre : Développement de proximité et Gestion des Communautés villageoises.

S'il a été une grande figure du secteur privé, en politique, il s'est de tout temps montré plus discret. Annoncé à la primature à plusieurs reprises, il sera nommé en 2011 président du conseil économique et social. Une fonction qu'il a dû quitter, notamment en raison de son état de santé.

Né en 1936, Marcel Zadi Kessy nous a quitté à l'âge de 84 ans.

Jean Mermoz Konandi

Publié le 14/10/20 17:58