Prévisions budgétaires : Le talon d’Achille des politiques publiques

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L'efficacité de l'action publique commence bien avant le premier franc dépensé. Elle se joue au moment de l'élaboration du budget, lorsque les gouvernements fixent leurs prévisions de recettes et de dépenses. Des chiffres mal calibrés peuvent compromettre la réalisation de projets essentiels, affaiblir la stabilité financière et, in fine, réduire la qualité des services rendus aux citoyens.

Une analyse récente menée sur la base du cadre international PEFA (Dépenses publiques et responsabilité financière) apporte un éclairage inédit sur la capacité des États à exécuter leur budget tel qu'il a été voté. Elle se fonde sur 307 ensembles de données couvrant 85 pays et territoires entre 2012 et 2024, et mesure l'écart entre prévisions et réalisations, tant pour les recettes que pour les dépenses.

Quatre scénarios d'exécution budgétaire

L'étude distingue quatre configurations possibles. Dans 18% des cas, recettes et dépenses dépassent les prévisions. Dans 19%, les recettes excèdent les attentes mais les dépenses restent en deçà. À l'inverse, 14% des budgets affichent des dépenses supérieures aux prévisions malgré des recettes insuffisantes. Mais c'est le quatrième scénario qui domine : dans près d'un cas sur deux, l'État collecte moins que prévu et dépense également moins.

Cette configuration traduit souvent une dépendance mécanique entre recettes et dépenses. L'analyse statistique montre qu'une variation de 1% des recettes entraîne en moyenne une variation de 0,59% des dépenses. Autrement dit, chaque franc supplémentaire perçu se traduit, en moyenne, par 59 centimes investis en plus dans les écoles, les hôpitaux ou les routes.

Une tendance persistante à surestimer les recettes

L'étude révèle que 63% des budgets analysés surestiment les recettes, et que 68% des gouvernements n'atteignent pas leurs objectifs de dépenses. Dans la majorité des cas, cette sous-exécution des dépenses découle directement d'une collecte de recettes inférieure aux prévisions. Les conséquences sont tangibles : projets d'infrastructures reportés, programmes sociaux réduits, services publics dégradés.

Ces résultats rappellent que la crédibilité budgétaire n'est pas un exercice comptable abstrait mais un déterminant central de l'efficacité publique. Des prévisions réalistes, appuyées sur des méthodes robustes de projection et une administration fiscale performante, permettent non seulement d'éviter les coupes imprévues mais aussi d'assurer aux citoyens que les engagements pris se traduiront effectivement dans les faits.

Pour les gouvernements, améliorer la précision des prévisions de recettes est un levier stratégique. Une collecte plus fiable permet de sécuriser les dépenses prioritaires et de garantir la continuité des politiques publiques. Pour les citoyens, c'est l'assurance que les promesses budgétaires ne resteront pas lettre morte.

Dr Ange Ponou

Publié le 08/08/25 12:08

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