Abdoulaye FADIGA, une figure indélébile dans l’histoire de la BCEAO

BRVMC0000000 - BRVMC
La BRVM Ouvre dans 18h20min

A la faveur des festivités des 60 ans de la BCEAO, Sika Finance publie une série de textes relatifs à l'évènement parus dans l'édition de juillet dernier (#8) de son magazine.

Abdoulaye FADIGA, une figure indélébile dans l'histoire de la BCEAO

Abdoulaye FADIGA, premier gouverneur de la BCEAO.

 

L'histoire de la BCEAO reste intimement liée à celle d'Abdoulaye FADIGA, son tout premier gouverneur qui a posé ses jalons et l'aura façonnée pour en faire une institution de premier plan. 

Abdoulaye FADIGA demeure mémorable dans les annales de la BCEAO, institution monétaire commune aux 8 pays de l'UEMOA. Abdoulaye FADIGA, premier gouverneur de la Banque centrale aura marqué l'histoire de cette prestigieuse institution ayant son siège à Dakar au Sénégal.  

Né le 10 mars 1935 à Touba, ville du Nord-Ouest de la Côte d'Ivoire, Abdoulaye FADIGA est issu d'une famille musulmane pratiquante et a été éduqué dans le plus grand respect des valeurs traditionnelles. Il sera ensuite inscrit à l'école primaire de Touba en 1943 puis de Bingerville où il va se révéler particulièrement brillant. Il y décrochera son CEPE, son certificat d'études primaires, ce qui lui ouvre les portes du cours secondaire d'Abidjan (actuel Lycée Classique d'Abidjan), où étaient scolarisés à cette époque les meilleurs élèves du pays. 

Elève excellent, il décroche en octobre 1948 une bourse pour la France où il est accueilli au Lycée de Troyes dans le département de l'Aube et y obtient son baccalauréat en 1954. 

Il entre ensuite à la faculté de droit et des sciences économiques de l'Université de Dijon où il obtient une licence en droit en 1957. Il ne s'arrête pas à là, il va opérer une rafle successive des diplômes d'études supérieures d'économie politique, de sciences économiques et de droit public, respectivement en 1958, 1959 et 1960.

Parallèlement à ces années de brillantes études, l'on retient qu'il était engagé dans un militantisme intense tous azimuts qui a sûrement contribué à forger son caractère de leader. Il fut président de l'association des étudiants de l'université de Dijon, président des étudiants ivoiriens de France et vice-président de l'union générale des étudiants et élèves de Côte d'Ivoire. Il était également membre de la Fédération des Etudiants d'Afrique Noire en France (FEANF). Du fait de ses positions idéologiques, il va même séjourner 6 mois en prison en Côte d'Ivoire. 

Bardé de diplômes à l'âge de 25 ans, il sera très vite repéré par le Président Félix Houphouët-Boigny et va être nommé en 1960, Secrétaire général de l'Organisation Interafricaine du Café (OIAC) à Paris. Deux années plus tard, soit en 1962, il retourne au pays pour occuper le poste de directeur général adjoint de la Caisse de stabilisation et de soutien des produits agricoles de la Côte d'Ivoire (CAISTAB), un établissement public stratégique impliqué notamment dans la gestion du binôme café-cacao, la mamelle nourricière du pays. Un poste qu'il saura tenir, recrutant progressivement des cadres ivoiriens en remplacement des expatriés, avec des résultats probants qui lui ont valu toute la confiance du Président d'alors Félix Houphouët-Boigny. Au bout de six années, en 1968, et à seulement 33 ans, il est promu directeur général de la CAISTAB. 

Le 15 décembre 1974, Abdoulaye FADIGA est nommé gouverneur de la BCEAO par le Conseil des Ministres de l'UMOA réuni à Ouagadougou au Burkina Faso. Il est le premier Africain à être promu à ce poste. Sa nomination va marquer un véritable tournant au sein de l'institution et montre une volonté des Etats de prendre en main la gestion de leur monnaie commune. Il prend fonction le 10 février 1975 après une prestation de serment devant les chefs d'Etat de l'organisation et des plus hautes personnalités de la finance d'Afrique et du monde. Il s'attèle aussitôt à l'africanisation du personnel autrefois dominé par les Européens de même qu'à l'accélération du processus de transfert du siège de la BCEAO de Paris en Afrique, à Dakar. Des choix qui ont parfois suscité de vives tensions avec les anciens pensionnaires du siège de l'institution à Paris, mais qu'il a menés à bien sans céder d'un pouce.

C'est dans ce contexte qu'il entame le recrutement de ses collaborateurs en veillant à créer un cadre multiculturel intégrant les ressortissants de l'ensemble des Etats. Une mission qui n'était pas aisée d'autant qu'il fallait repérer et attirer les meilleurs talents à l'époque, de jeunes cadres africains désireux de prendre part à l'aventure. Un processus qui a mené au recrutement de la première cohorte d'une dizaine de membres composée de grandes figures tels Daniel CABOU, Bila Charles KABORE, Marcel KODJO, Alassane OUATTARA, Charles KONAN BANNY ou encore Tiémoko Meyliet KONE. 

Il conduit avec cette jeune équipe dynamique le processus du transfert du siège de l'institution monétaire à Dakar qui sera inauguré le 26 mai 1979 en présence des chefs d'Etat des pays de l'UEMOA et de nombreuses personnalités. 

Banquier émérite, rigoureux et dévoué, réputé intègre, Abdoulaye FADIGA était un gouverneur profondément attaché à l'intégration économique et monétaire des pays de l'UEMOA et à la défense de la monnaie centrale. 

Gestionnaire compétent, il était également un homme d'une simplicité légendaire qui avait placé les relations humaines au premier plan et reconnu par tous ceux qui l'avaient connu et côtoyé.

Voir aussi – Spécial 60 ans de la BCEAO : La BCEAO en 20 dates

Animé par le désir de construire une élite africaine bien formée répondant aux meilleurs standards internationaux, il créa le Centre Ouest-africain de Formation et d'Etudes Bancaires (COFEB) qui a ouvert ses portes le 3 octobre 1977 à Dakar. Un centre qui est encore aujourd'hui un centre d'excellence de réputation internationale pour la formation à la profession de banquier.

Alors qu'il venait d'être reconduit pour un nouveau mandant de 6 ans, le destin d'Abdoulaye FADIGA va s'acharner. Pris d'un malaise lors d'une réunion des ministres de la zone franc à Paris dans l'une des salles de Bercy, Abdoulaye FADIGA va s'éteindre quelques jours plus tard, soit le 11 octobre 1988 à Dakar à l'âge de 53 ans, après 14 années de combat pour asseoir une institution forte à même de soutenir le développement des Etats de la région. Il repose depuis le 14 octobre 1988 à Man. 

En son hommage, cette salle à Bercy a été baptisée en son nom, traduisant tout le respect et l'admiration qu'inspirait le gouverneur FADIGA dans la sphère économique. Et pour entretenir sa mémoire, la BCEAO a institué depuis 2008 le " Prix Abdoulaye FADIGA pour la promotion de la recherche économique " avec l'objectif de promouvoir des travaux de recherches en sciences économiques dans la zone UEMOA.

Nos articles sur les 60 ans de la BCEAO à retrouver dans ce magazine en téléchargement gratuit. Cliquer sur l'image.

Narcisse Angan

Publié le 28/11/22 09:50

SOYEZ LE PREMIER A REAGIR A CET ARTICLE

Pour poster un commentaire, merci de vous identifier.

1yYI1UvPGTwYv-HdC2QfnjgWtIbP1myg8SnwEE5pOvA False