Les pays de la CEMAC pourraient économiser plus de 2000 milliards FCFA/an de réserves de change

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Les pays de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) pourraient économiser annuellement plus de 2 000 milliards FCFA (environ 3,2 milliards USD) de réserves de change, s'ils mettaient fin aux importations de produits pétroliers raffinés. Ce chiffre a été révélé par le gouverneur de la Banque des États de l'Afrique centrale (BEAC), Yvon Sana Bangui, ce 17 juin à Yaoundé, à l'ouverture de la Finance Week, plateforme régionale de réflexion sur les politiques économiques et monétaires.

Selon le patron de l'institut d'émission, cette facture annuelle colossale pour les seuls produits pétroliers (super, gasoil, pétrole lampant, gaz domestique, etc.) constitue une ponction massive sur les avoirs extérieurs de la sous-région, alors même que cinq des six pays membres — à l'exception de la République centrafricaine — sont producteurs de pétrole brut. ‘'Nous disposons de la matière première, dont la tendance des coûts est baissière. En s'inscrivant dans la stratégie d'import-substitution, transformons notre pétrole'', a-t-il martelé.

Le gouverneur plaide pour une industrialisation urgente, au service d'une souveraineté monétaire et économique. ‘'Le coût des infrastructures routières attendues par les opérateurs économiques est très onéreux dans notre zone. Pour éviter cela, nous devons localement produire le bitume. Nous devons localement produire les lubrifiants. Produire l'engrais se fait aussi à partir du pétrole'', a-t-il souligné devant un parterre d'acteurs publics et privés de la finance.

Vers une relance de la Sonara ?

Le cas du Cameroun illustre les limites de la situation actuelle. Depuis l'incendie de la Sonara en mai 2019 — seule raffinerie du pays, qui déjà dépendait d'un brut importé — le pays a totalement basculé vers l'importation des produits pétroliers finis. Le redémarrage de ses activités, initialement annoncé pour 2022, reste attendu, malgré un coût de réhabilitation estimé à 250 milliards FCFA. ‘'Si, dans les deux ou trois prochaines années, nous parvenons à implanter une raffinerie opérationnelle dans notre zone – au Cameroun ou ailleurs – cette facture pourrait être considérablement réduite. Nous avons le pétrole, dont le prix est relativement stable voire orienté à la baisse. Il nous suffit désormais d'adopter une stratégie d'import-substitution audacieuse et cohérente'', a-t-il déclaré.

Au-delà du secteur pétrolier, la BEAC recommande d'élargir la stratégie d'import-substitution à d'autres segments industriels clefs. Le gouverneur a notamment cité la filière textile. Selon lui, structurer une véritable industrie régionale permettrait d'habiller les 60 millions de citoyens de la zone, et de supprimer l'importation de vêtements de seconde main, qui coûte environ 100 milliards FCFA par an.

Des signaux positifs existent toutefois. ‘'Je salue la mise en service par Cimencam d'une unité de production de clinker, qui permettra de réduire nos importations de ciment. Je salue également l'initiative en cours pour une usine de bitume à Kribi. L'année dernière, Prometal a aussi renforcé ses capacités'', a-t-il déclaré, soulignant l'engagement croissant du secteur privé.

Depuis son entrée en vigueur en 2019, la nouvelle réglementation des changes en zone CEMAC constitue, selon la BEAC, l'ossature du redressement macroéconomique sous-régional. Ce dispositif vise à renforcer la traçabilité des flux de capitaux, stabiliser la monnaie commune, et sécuriser les devises destinées à financer les investissements structurants. Cinq ans après sa mise en œuvre, la banque centrale appelle à une consolidation du dispositif, en cohérence avec les ambitions industrielles de la sous-région.

‘'Nous avons les moyens d'atteindre 10 mois de couverture d'importations. Et pour les pays producteurs de pétrole, pourquoi ne pas viser 15 à 20 mois ? À condition, bien entendu, que les recettes issues de ces exportations soient effectivement rapatriées'', a souligné Yvon Sana Bangui.

Pour rappel, les réserves de change des États membres de la CEMAC devraient augmenter de 4% en 2025 pour atteindre 7 584,9 milliards FCFA, selon les projections de la BEAC. Cette progression permettrait de couvrir l'équivalent de 4,8 mois d'importations de biens et services, contre 4,6 mois estimés à fin 2024. En termes de couverture des importations, ce niveau ramènerait les avoirs extérieurs à leur situation de 2023, après plusieurs années de repli successif, selon les analyses de la Banque centrale.

Perton Biyiha

La Rédaction

Publié le 18/06/25 17:43

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