Nicole Sulu, Fondatrice du Forum Makutano : ‘’ Nous devons augmenter le niveau d’échanges entre nos marchés pour faire de l’Afrique un espace de prospérité’’

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Nicole Sulu, Fondatrice du Forum Makutano :

Nous devons augmenter le niveau d'échanges entre nos marchés pour faire de l'Afrique un espace de prospérité

 

 

Pour la première fois depuis sa création, le Forum Makutano, le réseau d'affaires référents de RD Congo et d'Afrique centrale, se réunissait ‘'hors des murs'' à Abidjan, à la rencontre des patrons de la principale économie de l'UEMOA. Un évènement qui a tenu en haleine la capitale économique ivoirienne du 19 au 21 septembre dernier, et qui a permis de rapprocher deux milieux d'affaires qui ont beaucoup à partager en termes d'expérience et surtout d'opportunités de partenariats au service des deux économies, mais aussi de l'Afrique. 

Un mois après l'évènement, Nicole Sulu, Fondatrice du réseau, revient sur un évènement qui répond d'une grande ambition de voir le continent africain puiser en lui-même les ressorts de son développement et de sa prospérité. ‘'If we don't, who will'', a-t-elle l'habitude de dire.

Pouvez-vous vous présenter ? Comment est née l'idée du Réseau Makutano ? Quels sont les objectifs que vous poursuivez ?

Je suis Nicole Sulu, administratrice déléguée d'un groupe familial également actif dans les secteurs de l'hôtellerie, des ressources humaines et de la santé en République Démocratique du Congo (RDC).

Il y a près de 10 ans, j'ai été à l'initiative du réseau Makutano dont l'objectif est de favoriser les rencontres, les échanges et les partenariats entre les dirigeants du secteur privé. Nous sommes également un lieu de dialogue entre ces dirigeants et les décideurs publics pour créer ensemble un environnement propice au développement du secteur privé. Nous voulons que les plus de 650 dirigeants qui sont aujourd'hui membres du réseau puissent être force de proposition et puissent travailler avec l'ensemble des parties prenantes sur les enjeux cruciaux tels que le financement de l'économie, l'emploi ou l'énergie.

Le réseau Makutano est un lieu de dialogue entre ces dirigeants et les décideurs publics pour créer ensemble un environnement propice au développement du secteur privé.

C'est dans cet esprit que nous organisons chaque année le Forum Makutano, un rendez-vous pensé par les décideurs africains pour les décideurs africains et durant lequel des décideurs échangent à bâtons rompus et font germer des solutions qui se traduisent par des contrats et des projets communs.

La 9ème édition s'est tenue à Abidjan, en Côte d'Ivoire. Pourquoi avoir choisi ce pays ?

Bien que le forum Makutano soit né en RDC, notre ambition est résolument panafricaine. Depuis bientôt une décennie nous facilitons en Afrique centrale la rencontre, l'interaction et les partenariats entre acteurs privés ainsi que le dialogue avec les décideurs publics qui contribue à améliorer notre compétitivité et notre performance. Les fondations étant suffisamment solides, nous avons élargi notre action. Quand il a fallu répondre à la question : Quel est la destination export la plus pertinente pour un acteur francophone d'Afrique centrale ? La réponse est sans équivoque : la Côte d'ivoire !

La population francophone, c'est l'un des deux poumons économiques d'Afrique de l'Ouest avec le Nigeria, le port d'Abidjan dispose d'un hinterland significatif et la ville est  idéalement placée dans le couloir Abidjan-Lagos qui pèse près de 75% du PIB de la CEDEAO. Ce sont autant d'atouts qui rendent la destination incontournable.

Par ailleurs, les échanges entre la RDC et la Côte d'Ivoire évoluent positivement comme le témoigne la récente ouverture d'une ligne aérienne entre Abidjan-Kinshasa.

Les projets de collaboration conclus à l'issue du Forum confortent ce choix.

Une forte délégation d'officiels et de chefs d'entreprises congolais ont fait le déplacement à Abidjan. Pouvez-vous présenter les grandes figures qui étaient présentes ?

Absolument. Nous avons tout d'abord eu une forte délégation ministérielle conduite par le Premier Ministre, Jean Michel Sama Lukonde. Elle était constituée de 6 ministres importants que sont le Vice-Premier Ministre, Ministre de l'économie Vital Kamerhe, le Ministre d'État, Ministre de l'aménagement du territoire Guy Loando Mboyo, le Ministre des finances Nicolas Kazadi, le Ministre du Commerce Extérieur S.E.M Jean-Lucien Busa, le Ministre des Affaires foncières S.E.M Sakombi Molendo ainsi que le Ministre de l'agriculture S.E.M José Mpanda.

Plusieurs autres décideurs publics congolais ont été du voyage en Côte d'Ivoire comme Anthony Nkinzo Kamole, le Directeur Général de l'Agence Nationale pour la Promotion des Investissements (ANAPI), Yenga Mabolia, Directeur Général du Cadastre minier, Placide Nkala, Directeur Général de la Gécamines, Godelive Londji, Directeur Général des Impôts.

Le secteur privé n'a bien évidemment pas été en reste, nous avons eu parmi nous les principaux acteurs économiques congolais tels que Marna Cloete, Présidente d'Ivanhoe Mines, Godelive de Cordier Okit'otete, Directrice Générale de SUNU Assurances IARD RDC, Rahim Dhrolia, Directeur Général de Mining Engineering Services (MES), Oliver Meisenberg, Directeur Général de TMB, Alain Kaninda, Directeur Général de l'Autorité de Régulation et Contrôle des Assurances (ARCA), Harish Jagtani, Président du Groupe HJ, Vincent Mwepu, Directeur Général d'Activa Vie, ou encore Turhan Mildon, Président du Conseil d'administration de Milvest.

Quelles ont été les principales thématiques abordées au cours de ces assises ?

Notre thématique centrale était la croissance du commerce intra-africain. Le secteur privé doit être aux avant-postes du marché unique africain qui se profile avec la mise en œuvre de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Si nous voulons arriver à transformer nos pays en espace de prospérité économique et de progrès sociaux, nous devons augmenter le niveau d'échanges entre les marchés africains. Alors que les pays européens et asiatiques ont un commerce intrarégional de plus de 60%, nous plafonnons à moins de 15% en Afrique. Pourtant c'est une des voies les plus certaines pour booster la croissance du secteur privé, créer des emplois décents et intégrer nos entreprises dans les chaînes de valeur mondiales.

Si nous voulons arriver à transformer nos pays en espace de prospérité économique et de progrès sociaux, nous devons augmenter le niveau d'échanges entre les marchés africains.

Nous avons donc parlé des principaux sujets qui peuvent contribuer à atteindre cet objectif. Il s'agit notamment du financement, l'assurance, l'inclusion des jeunes et des femmes. Enfin, nous ne pouvons pas réunir la Côte d'Ivoire et la RDC sans parler de ressources naturelles. Pour l'occasion, nous avons eu des échanges autour du secteur minier.

Quels étaient vos objectifs pour cette 9ème édition ? pouvez-vous dire qu'ils ont été atteints ?

Des pays comme la Côte d'Ivoire et la RDC disposent de talents en grande quantité pour répondre aux défis de l'industrialisation par la transformation de nos matières premières et de la tertiarisation. Un défi gage de l'émergence de grands centres de R&D, de finance, de logistique intégrée dans les secteurs où nous avons un avantage concurrentiel comme les industries créatives et culturelles, le cacao, les mines, l'exploitation minière et forestière. Mes attentes pour le Forum Makutano 9 étaient de jeter les bases de partenariats allant dans ce sens.

Cette rencontre à Abidjan a été à la hauteur de ces attentes. Elle a ouvert une nouvelle porte à une collaboration qui façonne l'Afrique de demain grâce aux accords communs convenus, notamment dans le domaine des assurances.

Les associations des sociétés d'assurance et de réassurance de la Côte d'Ivoire et de la République Démocratique du Congo ont convenu d'actions communes visant à augmenter les taux de pénétration de l'assurance dans nos deux pays. Elles ont donc signé une convention de collaboration portant, entre autres, sur la formation des professionnels, l'assistance technique mutuelle, la mise en place d'instruments de développement et un cadre d'échange. Un Plan stratégique tripartite et triennal associant l'État, les assureurs et le régulateur, a par ailleurs été négocié autour de 4 axes principaux que sont la fiscalité, l'éducation, le financement et la croissance du secteur.

En tout, nous avons été à l'origine de six projets stratégiques promptement actionnables à l'instar, entre autres, de :

  • L'entente pour l'entame du processus de suppression des visas entre la Côte d'Ivoire et la République Démocratique du Congo
  • La signature d'un protocole d'accord de collaboration pour une promotion réciproque des investissements dans les deux pays
  • Le lancement d'une étude qualitative et quantitative sur les financements locaux mobilisables pour le développement de la République Démocratique du Congo afin de mesurer les capacités de financement du pays pour stimuler le développement économique

Quels ont été les acquis des précédentes éditions en termes d'impact pour l'économie congolaise voire africaine ?

Au Forum Makutano, nous mettons l'accent sur les solutions. Nous sommes plus intéressés par les solutions que nous pouvons trouver collectivement : au financement du commerce international, à l'intégration des chaînes de valeur panafricaine, à la formation des talents, etc. Ces trois dernières années, plus de 300 contrats ont été conclus au sein du réseau Makutano.

Ces trois dernières années, plus de 300 contrats ont été conclus au sein du réseau Makutano.

Sur les problématiques de financement par exemple, deux conventions d'une valeur de 15 millions de USD ont été signées au Makutano entre Proparco et les banques congolaises EquityBCDC et Advans Banque Congo. Elles visent à soutenir l'essor des PME, notamment par le développement à l'export. C'est par ce type de solutions concrètes facilitées par le Forum Makutano que les entreprises vont pouvoir opérationnaliser leurs stratégies d'expansion.

Un mot de fin?

Je vous remercie pour votre interview et profite de cette opportunité pour exhorter les entreprises ivoiriennes et africaines à prendre à bras le corps la question du commerce intra-africain. C'est une des voies pour assurer une croissance pérenne en accédant à un marché plus vaste.

Voir aussi - Gancho Kipulu, Corporate Market Country Head, Rawbank : ''Après la RD Congo, nous portons l'ambition d'être une banque panafricaine'''

Voir aussi - Nicolas KAZADI, ministre des Finances de la RDC : "Le secteur minier est le moteur de la croissance congolaise"

Jean Mermoz Konandi

Publié le 23/10/23 16:27

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