Star Market ou la folie du Nasdaq chinois

400% de plus-value en quelques heures. Ce 22 juillet la séance inaugurale de Star (Science and Technology Innovation Board) Market, la bourse des startups technologiques chinoises, a donné lieu à une euphorie générale avec des valeurs qui ont touché des plafonds inimaginables, créant automatiquement de nouveaux milliardaires.

Star Market est l'alternative que Pékin a inventé pour tenter de contrer le Nasdaq, la bourse américaine des valeurs technologiques. Le Nasdaq accueille les pépites chinoises du secteur dont Alibaba, qui vont y lever de ressources pour financer leur développement. Et dans le contexte de guerre commerciale que se livrent les deux géants de l'économie mondiale, la Chine prend ses précautions en se préparant à anticiper de potentiels représailles américaines qui pourraient s'étendre aux marchés financiers et cibler ses entreprises technologiques qui ont réussi à briser, voire surpasser, le monopole américain dans certains domaines de pointe.

Star Market a été conçu avec pour ambition d'aider les startups à fort potentiel de l'empire (probablement les futurs mastodontes technologiques) à trouver sur place les moyens de leurs développement. Les places financières chinoises traditionnelles sont en effet particulièrement contraignantes. Au nombre de ces contraintes, l'on notera par exemple l'obligation pour ces entreprises d'être bénéficiaires avant toute entrée en bourse, une condition généralement inaccessible aux startups.

140% de hausse en une journée

25 startups (sur plus d'une centaine de candidatures) spécialisées notamment dans l'intelligence artificielle, la biotechnologie, les IT ou encore dans les énergies renouvelables, ont intégré la cote de Star Market, à la bourse de Shanghai. Au terme de la première journée du lundi 22 juillet, ces valeurs ont bondi de 140% pour un volume d'échange de 49 milliards de yuans, soit environ 7 milliards de dollars.

Une effervescence qui a surtout profité à AMT (Anji Microelectronics Technology), spécialiste des semi-conducteurs, qui a gagné 520% à l'ouverture avant de terminer la séance sur une hausse de 400%. Conséquence, en une journée, le géant chinois a enregistré de nouveaux riches, voire des  milliardaires (en yuans).

Cette première journée de folie était bien prévisible, les OPV des 25 sociétés avaient en effet été largement sursouscrites de près de 1 700 fois, de quoi donner le tournis.

La frénésie ne s'est pas arrêtée durant la semaine,  même si l'ampleur n'a plus été la même pour les jours suivants. La première semaine (du 22 au 26 juillet) s'est en effet soldée par une progression moyenne de 140% eu égard aux prix d'introduction, a rapporté vendredi le site scmp.com.

Cependant, à compter de cette semaine, le régulateur a pris les choses en main afin de tempérer l'enthousiasme général. La limite quotidienne de progression des titres est fixée à un maximum de 20%.

Eviter les échecs passés

Avec l'aventure de STAR, les autorités chinoises espèrent éviter le flop des deux premières expériences avec le ChiNext et le SME, deux marchés qui avaient été créées avec les mêmes ambitions. Cependant, les places concurrentes de New-York (Nasdaq) et de Hong Kong, jugées plus attractives pour les startups, avaient fini par évincer ces précédentes initiatives, se rappelle le confrère South China Morning Post.

Initié avec le soutien du président Xi Jipping, le STAR Market est un nouveau défi pour la Chine désireuse à tout prix de s'extirper de toute dépendance américaine. Les menaces sur Huawei ont suffisamment donné d'indices sur les tournures que peuvent prendre les relations avec son rival américain. Restera à savoir si STAR Market suffira pour que la Chine parvienne à couver, sur son territoire, ses stars naissantes de la tech, voire convaincre ses multinationales du secteur à revenir sur ses places financières.

Jean Mermoz Konandi

Publié le 30/07/19 09:22