Investir dans l’aquaculture en Côte d’Ivoire

BRVMC0000000 - BRVMC
La BRVM Ouvre dans 1h30min

 

Le cabinet conseil à l'investissement AFRIKA FORWARD, dont le siège est basé à Abidjan, publie sur notre site web des notes à l'attention des investisseurs, relatives à certains secteurs porteurs. Ces notes sont une synthèse des critères majeurs macro et microéconomiques entrant dans le processus de prise de décision à l'investissement.

Plus d'informations au +225 27 20 23 05 21 et sur www.afrikaforward.com " 

 

1- HISTORIQUE ET CONTEXTE DE L'AQUACULTURE EN CÔTE D'IVOIRE 

Située le long du Golfe de Guinée, la Côte d'Ivoire s'étend sur une superficie de 322.462 km² et compte 29 millions d'habitants en 2021.

La position de la Côte d'Ivoire dans la zone intertropicale humide lui fait bénéficier de plusieurs atouts sur le plan hydrographique : 150 000 ha de lagunes, 350 000 ha de lacs et de nombreux bas-fonds propices à l'implantation d'exploitations aquacoles (figure 1), ainsi qu'une riche faune aquatique. De ce fait, l'aquaculture[1] constitue un véritable potentiel national qui mérite d'être largement exploité.

L'économie ivoirienne, essentiellement basée sur l'agriculture, présente des déficits chroniques en matière de disponibilité en protéines animales et halieutiques[2], avec pour conséquence des importations régulières de viandes et de produits d'origine animale et halieutique.

Les premières tentatives d'aquaculture en Côte d'Ivoire remontent à 1955, lorsque l'administration coloniale a créé une section de pisciculture[3] au sein du Service des eaux et forêts. En 1958, un centre de recherche a été créé près de Bouaké par le Centre Technique Forestier Tropical (France). A partir de 1960, l'administration ivoirienne s'est elle-même engagée dans le développement de la pisciculture : des cantonnements piscicoles chargés de l'encadrement, des stations étatiques d'alevinage et des centres de recherche ont été créés.

L'intérêt pour l'aquaculture en Côte d'Ivoire a commencé principalement au cours des années 90 avec une production annuelle de 200 à 300 tonnes par la ferme d'Etat de Jacqueville, devenue privée plus tard sous le nom de Société Ivoirienne d'Aquaculture Lagunaire (SIAL). A cette époque, la production globale des fermes privées atteignait 30 à 50 tonnes par an (essentiellement de mâchoirons).

Au cours de cette période, 3,69 milliards de FCFA ont été mobilisés auprès de partenaires (Coopération belge, Coopération française et Banque Africaine de Développement) pour soutenir une stratégie de développement piscicole au niveau régional.

La majorité des projets régionaux ont ainsi été mis en œuvre : i) Projet Piscicole du Centre-Ouest (PPCO 1992 à 1999), ii) Projet d'Appui à la Profession Piscicole dans l'Est de la Côte d'Ivoire (PAPPE 1996 à 2003), et iii) Projet de Développement Rural Intégré de la Région Forestière Ouest (BAD-OUEST 1992-2003).

Toutefois, le décollage de l'aquaculture en Côte d'Ivoire s'est trouvé ralenti en 2002 suite à la crise politico-militaire.

Globalement, le développement de l'aquaculture en Côte d'Ivoire est fortement tributaire des financements extérieurs dans le cadre des projets. Quasiment tous les projets d'envergure ont été soutenus par des partenaires étrangers. Jusqu'à ce jour, la contribution financière de la Côte d'Ivoire était résiduelle. En effet, le volume des investissements publics consacrés au secteur n'a pas excédé en moyenne 16 milliards de FCFA par an, soit une part inférieure à 0,3% du budget annuel de la Côte d'Ivoire.

L'aquaculture continentale en Côte d'Ivoire est une activité encore essentiellement rurale, secondaire et généralement pratiquée sur de petites fermes, dans de petits étangs d'eau douce de faible productivité. Les exploitations sont de plusieurs types. Ce sont soit des exploitations avec petits plans d'eau ou des fermes de subsistance, soit des exploitations à petite échelle commerciale. D'une façon générale, il s'agit essentiellement d'élevage de tilapias, de mâchoirons et de silures.

Afin de relever le défi du développement du secteur des ressources animales et halieutiques, le Gouvernement ivoirien a défini de nouvelles politiques et stratégies dans le but de réduire la dépendance du pays vis-à-vis de l'extérieur en produits halieutiques.

Malgré les progrès obtenus au cours des sept (7) dernières années, l'aquaculture ne représente que 10 % de la production halieutique nationale. La production aquacole (production issue de l'aquaculture) est passée de 1 290 tonnes en 2007 à 3 394 tonnes en 2011, mais elle est restée à un niveau plafonné à 4 500 tonnes depuis 2017.

2- MARCHE MONDIAL  

Sur l'ensemble des produits halieutiques alimentant le commerce mondial, les poissons occupent une place prépondérante, mais d'autres espèces comme les algues ou les coquillages sont toutes aussi importantes.

Selon l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), en 2020, l'aquaculture fournissait dans le monde 60% des poissons d'eau douce, 40% des mollusques, 30% des crevettes et 5% des poissons d'eau de mer.

La forte croissance de l'aquaculture a permis à la production halieutique mondiale d'atteindre des niveaux records.

La production mondiale de poissons est passée de 110 millions de tonnes dans les années 1990 à 177 millions de tonnes en 2020, ce qui représente une croissance de 60%. Cette croissance s'explique principalement par le boom de la production de l'aquaculture, qui est passée de 21 millions de tonnes dans les années 1990 à 87 millions de tonnes en 2020, soit une croissance de 300%.

En 2020, l'aquaculture a représenté 49,2% de la production mondiale de poissons contre 20% en 1990.

Cette production halieutique mondiale a été principalement dominée par l'Asie, qui a représenté 70% de la production mondiale suivi des pays d'Amériques (12%), de l'Europe (10%), l'Afrique (7%) et l'Océanie (1%).

Les principaux pays producteurs de poissons issus de l'aquaculture sont la Chine avec 58% de la production mondiale, l'Indonésie (12%), l'Inde (7%), le Vietnam (4%), le Bangladesh (2%) et l'Egypte, la Norvège, le Chili qui représentent conjointement 4% de la production mondiale de produits aquacoles.

Toutes les régions du monde, à l'exception de l'Afrique, ont enregistré une croissance continue de leurs productions aquacoles en 2020. Cette croissance a été favorisée par l'expansion des activités au Chili, en Chine et en Norvège – principaux producteurs dans leurs régions respectives –. Les deux principaux pays producteurs africains, l'Égypte (67,62% de la production Africaine) et le Nigéria (11,12% de la production Africaine), ont connu un recul respectivement de 1,2% et 9,6% en 2020 par rapport à2019, tandis que le reste du continent a enregistré une croissance de 14,5%.

Depuis 1961, le taux de croissance annuel mondial de la consommation de poissons a augmenté de 3% en moyenne, pour un taux de croissance démographique de 1,6% : la consommation de poissons augmente presque deux (2) fois plus vite que la croissance démographique mondiale.

Selon la FAO, l'aquaculture a un potentiel significatif pour nourrir une population mondiale en augmentation. Selon les projections, les tendances alimentaires devraient entraîner une progression de 15% de la consommation de produits alimentaires d'origine aquatique, soit une consommation moyenne à satisfaire de 21,4 kg par habitant en 2030 contre 9,9 kg en moyenne dans les années 1960 et 20,2 kg en 2020.

3- POTENTIEL DU MARCHE LOCAL  

Le poisson est la principale source de protéines animales consommée par les ivoiriens, avec une moyenne de 24 kg/an par personne d'après le Ministère des Ressources Animales et Halieutiques. La production halieutique nationale, s'élevant à 50 000 tonnes par an, combinée à l'aquaculture (5 000 tonnes en moyenne par an), ne suffit pas à couvrir les besoins du pays qui s'accroissent rapidement.

Les besoins en produits halieutiques de la Côte d'Ivoire s'élèvent à plus de 700 000 tonnes et ne sont satisfaits localement qu'à hauteur de 15%, les 85% restants étant comblés par des importations de plus en plus importantes.

En effet, les importations en volume sont passées de 481 880 tonnes en 2017 à 651 242 tonnes en 2021, soit un taux de croissance de 35%.

Les importations de produits halieutiques s'élevaient à 414 milliards de FCFA en 2021 contre 266 milliards de FCFA en 2017, soit un taux de croissance annuel moyen de 12% de 2017 à 2021. Le potentiel de marché de la Côte d'Ivoire est grandissant.

Malgré les nombreux atouts et le potentiel hydrographique dont dispose la Côte d'Ivoire, la part de l'aquaculture dans la production halieutique nationale ne représente que 10%.

La quantité de produits halieutiques issus de la pêche est en nette diminution, avec une moyenne de décroissance de 1% sur la période 2017-2020 (FAO). L'aquaculture représente alors le seul moyen de combler la demande croissante des consommateurs ivoiriens en produits halieutiques.

4- REGLEMENTATION ET MESURES GOUVERNEMENTALES 

En Côte d'Ivoire, le Ministère des Ressources Animales et Halieutiques (MIRAH), est l'institution qui est chargée de la régulation, du contrôle et du suivi des activités de pêche et d'aquaculture.

En juillet 2016, l'Assemblée Nationale ivoirienne a adopté la Loi n°2016-554 du 26 juillet 2016 relative à la pêche et à l'aquaculture en vue de régir les activités de pêche et d'aquaculture.

Cette nouvelle loi vient compléter la loi n°086-478 du 1er juillet 1986, relative à la pêche en y ajoutant le volet aquaculture qui n'était pas pris en compte. Des textes règlementaires pour mettre en œuvre les différents articles de la loi sont encore en cours de rédaction et d'adoption.

Par ailleurs, le Gouvernement a entrepris différentes initiatives ces dernières années pour accroître la production aquacole locale : 

  • le Projet PREPICO (2016-2019), dont l'objectif principal était de contribuer au développement de la pisciculture continentale ivoirienne par l'amélioration de la production piscicole, a permis d'élaborer deux documents : " le Plan d'action nationale de développement de la pisciculture (PANDEP) et les " Directives techniques pour une pisciculture durable ". 
  • le projet TIVO, lancé en 2012 pour une durée de 05 ans et renouvelé en juillet 2022 pour une même durée. Sa mise en place a eu pour résultat, la réhabilitation de 65% au moins des structures de production de la station piscicole de Loka (Bouaké), la constitution d'un pool génétique de qualité de tilapias, la fourniture de manière permanente de produits vétérinaires et aliments industriels de qualité pour le stock de géniteurs de poissons et la production de semences améliorées de tilapias. 
  • la phase II du projet TIVO a pour objectifs de contribuer à la mise à niveau des infrastructures de production et d'appui à l'amélioration génétique, apporter un appui institutionnel à la recherche-développement, assurer la production du matériel génétique performant aux aquaculteurs privés, jeunes déscolarisés et aux femmes commerçantes et transformatrices de poissons

Le MIRAH a élaboré une nouvelle stratégie de développement du secteur de l'aquaculture nommée Stratégie Nationale de Développement de l'Aquaculture (SNDA) qui est l'un des 5 piliers de la Politique Nationale de Développement de l'Elevage, de la Pêche et de l'Aquaculture (PONADEPA) 2022-2026, dont les objectifs sont l'amélioration de la productivité et la compétitivité des filières animales et halieutiques, de la gouvernance du secteur et des moyens d'existence des acteurs du secteur.

En août 2022, le chef du Gouvernement ivoirien a officiellement lancé le Programme Stratégique de Transformation de l'Aquaculture en Côte d'Ivoire (PSTACI) pour une période de 5 ans renouvelables. Il est issu de la SNDA et vise une production nationale à hauteur de 70% des besoins de consommation en produits halieutiques d'ici 2030 à travers l'accélération des investissements et les projets pilotes, le renforcement des règles gouvernementales et l'augmentation de la production d'alevins pour sa première phase.

Perspectives gouvernementales

Le Gouvernement ivoirien dans sa feuille de route 2023 annonce le lancement des projets de développement suivants :

  • le Projet de diversification de la production aquacole (PDPA) : il a pour objectif d'améliorer la couverture des besoins nationaux en produits halieutiques à travers la mise en place d'un centre expérimental et d'apprentissage pour maîtriser la production de nouvelles espèces aquacoles marines et la formation de 50 acteurs de la pêche à l'aquaculture marine ; 
  • le Projet de développement des techniques de valorisation des produits halieutiques : il permettra de promouvoir la consommation des produits halieutiques et améliorer la nutrition par l'utilisation rationnelle et durable des ressources halieutiques.

Le MIRAH prévoit également dans le cadre du Projet d'Amélioration de la Production d'Intrants Piscicoles Performants (PRAPIP) d'atteindre en 2023 les résultats suivants :

  • 150 000 Géniteurs performants seront acquis et mis à la disposition des écloseries ; 
  • 1 structure locale de fabrication d'aliments sera appuyée en matériel (extrudeuse).

5- CONTRAINTES

En Côte d'Ivoire, les entraves à la pratique de l'aquaculture sont multiples. À tous les niveaux du processus de production, les aquaculteurs rencontrent des obstacles. Ces contraintes sont d'autant plus grandes lorsqu'il s'agit de l'aquaculture lagunaire, car elle emploie des méthodes et techniques plus élaborées qu'en étang.

Nous pouvons citer, au titre des faiblesses présentes dans le secteur :

  • La faible disponibilité d'alevins de qualité et d'aliments de qualité pour les poissons ; 
  • L'insuffisance des compétences techniques et de savoir-faire dans l'aménagement des espaces aquacoles, ce qui peut entraîner une mortalité élevée chez les poissons élevés et un manque de compétitivité des poissons d'aquaculture ; 
  • La faible structuration de la chaîne de valeur dans l'aquaculture ;

 6- OPPORTUNITES

Le secteur aquacole ivoirien reste confronté à certaines faiblesses qui jusqu'à présent ont limité son impulsion. Toutefois, la Côte d'Ivoire dispose de plusieurs atouts et potentialités pour le développement de l'aquaculture.

Nous pouvons citer, au titre des opportunités présentes dans le secteur :

  • Le potentiel hydrographique de la Côte d'Ivoire peut lui permettre de produire plus d'un million de tonnes de poisson par an ; 
  • Un besoin en exploitations aquacoles plus productives et compétitives afin de couvrir les besoins de la population ivoirienne estimée à plus de 700 000 tonnes de poissons par an ; 
  • Un besoin d'optimisation de la chaîne de valeur du secteur des produits de l'aquaculture ; 
  • Un besoin d'unités de production d'alevins et d'aliments de qualité pour poissons ; 
  • L'existence d'un Programme Stratégique de Transformation de l'Aquaculture en Côte d'Ivoire (PSTACI) pour le développement d'une chaîne de valeur aquacole ; 
  • Les tendances de croissance de la consommation mondiale de produits halieutiques de 15% pour atteindre une moyenne de 21,4 kg par habitant en 2030 ; 
  • Les exonérations fiscales et douanières accordées par le code des investissements aux entreprises du secteur de l'aquaculture.

 

7- ANALYSE SWOT 

 

8- CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

Malgré un réseau hydrographique dense, capable de produire 1 million de tonnes par an, des conditions climatiques favorables et une main-d'œuvre jeune et abondante, l'aquaculture produit en Côte d'Ivoire moins de 1% des poissons consommés localement et ne représente que 10% de la production halieutique nationale.

En effet, l'émergence de ce secteur a été jusque-là confrontée à plusieurs défis, notamment la faible disponibilité d'alevins et d'aliments de qualité pour les poissons, la faible disponibilité de technologie et de savoir-faire dans l'aménagement d'espaces aquacoles et le manque de structuration optimale de la chaîne de valeur.

Ainsi, la consommation de produits halieutiques en Côte d'Ivoire dépend principalement des importations, avec environ 651 000 tonnes de produits halieutiques importés en 2021, représentant plus de 400 milliards de F CFA.

Or, il existe des opportunités d'investissement sur toute la chaîne de valeur du secteur, notamment la production, la transformation, la distribution, la commercialisation des poissons, la production d'aliments, l'aménagement d'espaces aquacoles, etc.

On note depuis quelques années, la mise en place par le gouvernement ivoirien de plusieurs stratégies et programmes visant à accélérer le développement de l'aquaculture et réduire la dépendance du pays vis-à-vis de l'extérieur en produits halieutiques, parmi lesquels on peut citer le Programme Stratégique de Transformation de l'Aquaculture en Côte d'Ivoire (PSTACI), qui a pour objectif majeur de porter la production annuelle de la Côte d'Ivoire à 500 000 tonnes de poissons à l'horizon 2030.

En conclusion, le secteur de l'aquaculture en Côte d'Ivoire présente de nombreuses opportunités et potentialités mais il est également confronté à de nombreuses contraintes et menaces. Les investisseurs doivent être conscients de ces facteurs et prendre les mesures appropriées pour gérer les risques et saisir les opportunités qui se présentent.

 Par Wilfried KONAN, Economiste Junior, AFRIKA FORWARD

 

Voir aussi - Côte d'Ivoire : Investir dans la transformation de la noix de cajou

Voir aussi - Investir dans la transformation de l'hévéa en Côte d'Ivoire

Voir aussi - Investir dans la transformation du cacao en Côte d'Ivoire

[1] L'aquaculture désigne la culture d'organismes aquatiques, y compris les poissons, mollusques, crustacés et plantes aquatiques. La culture implique une certaine forme d'intervention humaine pour augmenter les rendements.

[2] Les ressources halieutiques désignent les ressources aquatiques exploitées par l'homme, elles désignent l'exploitation et la gestion des ressources issues de la pêche et de l'aquaculture

[3] La pisciculture est une spécialisation de l'aquaculture, elle désigne l'élevage des poissons en milieu naturel ou en bassin artificiel, destinés à la consommation.

 

Plus d'informations au +225 27 20 23 05 21 et sur www.afrikaforward.com 

 

Communiqué

Publié le 28/03/23 08:46

SOYEZ LE PREMIER A REAGIR A CET ARTICLE

Pour poster un commentaire, merci de vous identifier.

60wV9ZmPlur62uoXM3TnEnTJNLJEQQiQacaTCaHZohc False