En Guinée, le pouvoir militaire poursuit sa reprise en main du secteur minier. Dans une déclaration annoncée à la télévision nationale, ce 16 mai, la junte dirigée par le général Mamadi Doumbouya a procédé au retrait de plus d'une centaine de titres miniers à des sociétés. Sont concernés, des permis de recherche et des autorisations d'exploitation de carrières, détenus jusqu'alors par plusieurs dizaines d'entreprises opérant dans les domaines de l'or, du fer, de la bauxite ou encore du diamant.
La lecture de l'arrêté gouvernemental a duré près de 45 minutes à l'antenne, durant lesquelles le ministre en charge de la Communication, Fana Soumah, a énuméré les noms des entreprises frappées par cette décision. Parmi elles, figure Ram-Ras (or), Engineering Sal (bauxite) et bien d'autres.
Cette mesure s'inscrit dans une volonté affichée de ‘'nettoyer'' le cadastre minier guinéen, souvent critiqué pour son opacité. Les autorités n'ont pas officiellement motivé les retraits, mais selon plusieurs observateurs du secteur, cette mesure vise à évincer les sociétés qui n'ont pas concrétisé leurs engagements, faute de capacités techniques ou financières. Elle entend ainsi faire place nette pour des investisseurs ‘'sérieux'', dotés des ressources nécessaires pour exploiter réellement les richesses du sous-sol guinéen au bénéfice de la population.
‘'C'est une opération d'assainissement indispensable. De nombreux permis sont attribués sans évaluation rigoureuse….'', a déclaré Amadou Bah, directeur exécutif de l'ONG Action Mines Guinée, membre de l'Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), sur les antennes de TV5 Monde Afrique.
Depuis son arrivée au pouvoir par un coup d'Etat en septembre 2021, le général Doumbouya a fait de la réforme du secteur minier l'un des axes centraux de sa gouvernance. La Guinée dispose de ressources naturelles abondantes, notamment le plus grand gisement mondial de bauxite, mais demeure paradoxalement l'un des pays les plus pauvres du monde. En cause, une exploitation souvent déséquilibrée au profit de multinationales, un manque chronique d'investissements locaux, des infrastructures déficientes et une corruption systémique.
Vers une nouvelle ère minière ?
Cette reprise en main du secteur minier est de l'avis de certains observateurs, perçu aussi comme une stratégie de légitimation politique pour le régime. En effet, à défaut d'élections rapides, les militaires chercheraient à démontrer leur efficacité en matière de gestion économique. Les discours de ‘'redressement'' et de ‘'souveraineté'' résonnent fortement dans un pays lassé de décennies de promesses non tenues.
En outre, les analystes restent cependant prudents. Si cette opération crée un espace pour une meilleure gouvernance des ressources, elle doit s'accompagner de réformes structurelles, entre autres le renforcement des institutions de régulation, la révision des textes miniers, la transparence des nouveaux appels d'offres, et surtout, un meilleur partage des revenus avec les populations locales.
‘'Il ne suffit pas de retirer des permis, encore faut-il garantir que les nouveaux opérateurs auront un impact réel sur l'économie guinéenne et le développement local'', avertit un chercheur sur le secteur extractif en Guinée. Pour l'heure, le pays attend de voir si cette grande opération de nettoyage du cadastre marquera le début d'une nouvelle ère minière, plus équitable et plus bénéfique pour ses citoyens.
Narcisse Angan
Publié le 19/05/25 12:29
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